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Fonction publique - Amélioration du pouvoir d'achat des agents : le gouvernement avance ses propositions

La ministre de la Fonction publique Marylise Lebranchu propose de revaloriser sur cinq ou six ans les grilles de rémunération des quelque 5 millions d'agents publics. Elle entend boucler le 2 juin la négociation avec les syndicats.

Les agents publics vont bénéficier d'une "vague" de revalorisation de leurs carrières qui s'étalera au-delà de 2017 pour aller, même, jusqu'à 2020 ou 2021, a annoncé ce 10 mars la ministre en charge de la Fonction publique à la suite d'une réunion avec les représentants syndicaux. Cette revalorisation sera inédite depuis le vaste accord Durafour de 1990 rénovant les grilles salariales, dont l'application s'étendait sur sept ans. Elle concernera toutes les catégories de personnels, à la différence de celle de 2014-2015 qui visait exclusivement les agents de catégorie C. Parallèlement, le déroulement de carrière des agents sera allongé, pour passer "de 25 ou 26 ans" en moyenne aujourd'hui à 35 ans après la réforme. Cette durée sera la même pour les trois versants de la fonction publique, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. La mesure fera davantage coïncider la durée d'avancement des agents et le nombre d'années travaillées (lequel s'est accru depuis la réforme des retraites de 2010). De plus, elle rendra les fins de carrière plus attractives en permettant aux agents de voir leur rémunération progresser encore à ce moment-là et non stagner comme parfois aujourd'hui.
Evoquant l'allongement de la durée des carrières, Marylise Lebranchu l'a qualifié de "contrepartie". Mais sur l'ensemble de leur carrière, les agents seront gagnants. En effet, la refonte des grilles ne se fera pas à coût constant, mais elle coûtera au budget des employeurs publics. "J'ai obtenu que ce soit inscrit dans la trajectoire des finances publiques", a précisé la ministre, qui s'est toutefois refusée à donner des chiffres. Compte tenu des difficultés budgétaires, "on va étaler ce coût pour l'absorber", a-t-elle ajouté.

Faciliter la mobilité des agents

Les rencontres qui vont débuter avec les organisations syndicales se concluront le 2 juin prochain. La ministre a exprimé sa préférence pour la signature d'un accord global, sans cependant être certaine que cette solution prévaudra. Ce calendrier permet au gouvernement d'envisager la programmation de mesures de revalorisation des agents publics dans les textes financiers de fin d'année.
La refonte des grilles de rémunération répond à l'enjeu de l'attractivité de la fonction publique, mise à mal par le gel du point d'indice depuis 2010. "On a des postes non pourvus", a reconnu la ministre. En cause, le niveau de rémunération des agents, notamment ceux de catégorie A. Quand ils le peuvent, les cadres préfèrent travailler dans le privé, où ils y sont mieux rémunérés. La ministre entend aussi relever le défi de l'attractivité de "tous les territoires", y compris ceux qui sont défavorisés. Par ailleurs, elle a dit vouloir venir à bout de blocages qui empêchent notamment les agents de catégorie C d'atteindre le haut de leur catégorie et donc d'avoir une meilleure rémunération.
Marylise Lebranchu entend encore faciliter la mobilité au sein de chaque fonction publique et entre les fonctions publiques. Les solutions passent selon elle par la poursuite de la fusion des corps et la mise en place pour certaines fonctions de "cadres communs aux trois fonctions publiques", idée inspirée du rapport remis par Bernard Pêcheur en décembre 2013 sur la fonction publique. Les conservateurs du patrimoine et des bibliothèques seraient ainsi concernés.

Des avancements de grade plus limités ?

La ministre a aussi évoqué des mesures de simplification. De source syndicale, on sait par exemple qu'en cas de détachement d'un agent, l'avis de la commission administrative paritaire de départ ne serait plus sollicité. Pour la ministre, la mobilité pourrait progresser en particulier pour les agents qui mettent en œuvre des politiques partagées entre les collectivités et l'Etat. Citant l'exemple des politiques économiques, "il y a un bon travail à faire entre la Direccte, la Dreal [c'est-à-dire les services de l'Etat] et les directions des collectivités territoriales pour répondre en termes de parcours professionnel et de mobilité", a-t-elle estimé.
"Le gouvernement semble prêt à faire un geste en direction de la fonction publique", se réjouit Johann Laurency, secrétaire fédéral à la fédération Force ouvrière des personnels des services publics et de santé. Lequel note toutefois que le coût des mesures ne devrait être significatif qu'à partir de 2017 et pas avant. Johann Laurency observe aussi, avec une certaine irritation, la volonté de la part du gouvernement de "reprendre en main l'évolution de la masse salariale des trois fonctions publiques". Selon des informations venant de l'entourage de la ministre et recueillies par le responsable syndical, les avancements de grade à la durée minimale seraient moins nombreux et seraient expressément liés aux résultats et à la valeur professionnelle de l'agent. Le ministère en charge de la Fonction publique aurait aussi émis l'idée de déterminer les ratios d'avancement de grade dans les décrets statutaires. Cela signifierait une perte de liberté pour les exécutifs des collectivités locales, qui aujourd'hui fixent ces ratios après avis du comité technique.
Dans un communiqué, la CFDT Fonctions publiques a affirmé de son côté qu'elle "sera particulièrement attentive à ce que l'ensemble des agents soient gagnants".