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Avenir de la sidérurgie : le Sénat demande d'associer les élus aux grandes décisions

Mieux associer les élus aux décisions, nommer un ministre de l'Industrie, revoir les mesures antidumping… la mission d'information du Sénat sur la filière sidérurgique a rendu publiques ses trente propositions le 10 juillet 2019, reconnaissant le rôle central du niveau local dans l'accompagnement des bassins sidérurgiques français.

"Le niveau local est l'échelon d'avenir pour l'accompagnement des bassins sidérurgiques." Dans le cadre de son rapport sur les "Enjeux de la filière sidérurgique dans la France du XXIe siècle", rendu public le 10 juillet 2019, la mission d'information du Sénat a insisté sur le rôle des élus locaux, "souvent premiers interlocuteurs des industriels", qui "disposent de la connaissance de terrain". Cette mission avait été constituée en janvier 2019 à l'initiative du groupe Union centriste, en réaction à la situation critique de l'aciérie d'Ascoval dans les Hauts-de-France à la suite de la liquidation de sa maison-mère, Asco Industries. Le rapporteur de la mission, Valérie Létard, sénatrice Union centriste du Nord, dresse un diagnostic sans appel de la filière sidérurgique : en 20 ans, la France est passée du neuvième au quinzième rang mondial en matière de production d'acier et le nombre de hauts-fourneaux s'est effondré (de 152 en 1954 à 8 aujourd'hui). La France ne représente plus que 1% de la production mondiale alors que la Chine produit désormais plus de la moitié de l'acier mondial contre 15% en 2000. Le nombre d'emploi (38.000 personnes) a chuté de 20% au cours des dix dernières années et continue à baisser. Pourtant la filière française reste compétitive sur ses segments de prédilection que sont les marchés des aciers plats, pour le secteur automobile, dominé par ArcelorMittal, des aciers plats inox et des aciers longs, destinés à la construction.

Ne pas réduire les élus à de simples financeurs

Parmi les trente propositions de la mission : mieux associer les élus aux décisions de l'État et prendre en compte leurs politiques locales, sans réduire les collectivités à de simples financeurs. Il faut dire que les critiques des présidents de région auditionnés, Xavier Bertrand pour les Hauts-de-France et Jean Rottner pour le Grand Est, sont acerbes. Le premier estimant que "les régions sont devenues les supplétifs de l'État, simplement sollicitées pour faire un chèque sans être associées aux négociations préalables", le second regrettant le manque de moyens financiers et humains nécessaires au repérage des entreprises en difficulté et l'insuffisance du dialogue entre État et régions. Pour la mission, il faut associer les représentants des régions aux travaux du comité stratégique de filière "Mines et métallurgie". La mission s'est aussi penchée sur le programme Territoires d'industrie, lancé par le gouvernement en novembre 2018, associant industriels et collectivités sous le pilotage des régions. "Il devra faire ses preuves", estime la mission, qui regrette que le programme ne soit accompagné d'aucun financement propre. Un programme qui "s'assimile davantage à un effort de lisibilité de la part de l'État sur les outils déjà mis à disposition ainsi qu'un soutien à l'initiative locale". Sa recommandation : s'assurer que les dispositifs existants suffisent à répondre aux besoins des industriels et, le cas échéant, les compléter par de nouveaux outils de financement ou d'accompagnement.

Nommer un ministre de l'Industrie

Au-delà de cette approche partenariale à mettre en place avec les territoires, la mission considère qu'il faut nommer un ministre de l'Industrie. "L'État est trop souvent dénué d'outils de pilotage stratégique, avec une capacité d'anticipation limitée et se contentant de jouer le rôle de 'pompier' face aux situations difficiles". Au niveau européen, la mission plaide pour un document de politique industrielle, déclinant la stratégie globale à l'échelle de chaque filière.
D'autres recommandations sont avancées pour lutter contre la concurrence mondiale. Face au dumping massif des producteurs chinois, indiens et russes sur le marché européen, l'Union européenne a mis en place 25 nouvelles mesures antidumping, mais pour les rapporteurs, ces efforts ne sont pas suffisants. "Il faut rapidement que la Commission européenne réexamine ces mesures pour combattre les contournements et améliorer leur calibrage", estiment-ils.
Le rapport aborde aussi la question de l'amélioration de l'image de la sidérurgie, dont les besoins en recrutement (près de 5.600 personnes d'ici 2025 du fait des départs à la retraite) sont difficilement couverts. Autre préconisation : aider le secteur à assurer sa transition énergétique, avec notamment la mise en place d'une taxe "carbone" aux frontières de l'Union européenne.

 

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