Cession d'une propriété publique contre charges : comment éviter une requalification ?

Constat : La cession d’un bien immobilier par une collectivité territoriale peut parfois poser question, lorsqu’elle est assortie de charges sous forme de travaux. Le risque de requalification en marché public est alors à considérer.

Réponse : Une cession foncière avec charges induit que l’acquéreur s’engage à satisfaire certaines conditions imposées par la personne publique dans le cadre de cette vente. Ces contreparties peuvent revêtir des formes diverses. Mais lorsqu’elles consistent en la réalisation de travaux, elles peuvent être requalifiées en marché public par le juge en cas de saisine. La qualification d’une aliénation immobilière en marché de travaux suppose, plus précisément, que les charges imposées par la personne publique portent sur des travaux ou un ouvrage qui répondent à ses besoins spécifiques et qui présentent un caractère onéreux. 

Pour le juge européen comme administratif, il n’est même pas nécessaire que le bien revienne ultérieurement à son ancien propriétaire pour que cette qualification soit retenue ; il peut suffire que l’opération réponde à l’intérêt économique direct du vendeur, qui est aussi acheteur public au sens du code de la commande publique. Le juge examinera toutefois avec précision la nature de cette contrepartie ; des orientations générales ne constitueront en principe pas une charge susceptible d’être reconsidérée en un marché public. 

Le caractère onéreux de la charge s’apprécie au regard du paiement d’un prix ou d’un abandon de recettes. C’est ainsi que si le bien est vendu conformément à l’évaluation domaniale, l’onérosité aura peu de raisons d’être retenue. Il pourrait en être autrement en cas de cession à un prix inférieur à celui prescrit par la direction de l’immobilier de l’Etat. 

C’est donc par la méthode du faisceau d’indices que le juge est appelé à se prononcer, position dorénavant également adoptée par le juge judiciaire. Dans un arrêt du 26 octobre 2023, la Cour de cassation, dans le cadre d’une vente de terrains à une société civile et à deux promoteurs avec charge d’édifier 250 logements, a recherché si les travaux relevaient d’un intérêt économique direct pour la commune et si celle-ci avait eu une influence déterminante dans la conception du projet. Dans le cas d’espèce, son analyse l’a conduite à considérer qu’il n’y avait pas lieu de prononcer une requalification, notamment car le cahier des charges n’était pas très contraignant et la part du projet rétrocédée à la collectivité marginale. 

Références :

CJUE, 25 mars 2010, Helmut Müller, aff. C-451/08 ; CAA Bordeaux, 18 juillet 2016, n° 15BX00192 ; CAA Bordeaux, 3 septembre 2020, n° 18BX04475 ; Cass. Civ. 3ème, 26 octobre 2023, n° 22-19.444

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