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Urbanisme - Changer l'image des quartiers de gare, une préoccupation européenne ?

Défraîchis, isolés, encombrés par les friches industrielles, les quartiers de gare sont parfois le reflet d'un certain déclin, surtout dans les villes de taille moyenne. Un enjeu pour la Picardie, qui se rapproche de ses voisins belge et néerlandais et veut faire émerger un réseau européen d'échange.

Abordé sous un angle européen, le ferroviaire est plus souvent associé à la mise en concurrence des transporteurs qu’à l’amélioration de l’environnement urbain des gares. C’est pourtant ce dernier volet qui intéresse aujourd’hui plusieurs collectivités européennes, emmenées par la région Picardie.
En France, le modèle de la gare isolée en rase campagne, aussi connue sous le nom de "gare aux betteraves", tend à encourager l’usage de la voiture sans pour autant générer de fortes retombées économiques. Coincée entre Saint-Quentin et Amiens, la gare TGV de Haute-Picardie a néanmoins inspiré de nombreuses agglomérations françaises, ballottées au gré des querelles d’élus sur l’emplacement des lignes ferroviaires. Les plaines rurales aux alentours de Metz abritent ainsi deux gares TGV et la ville d’Aix-en-Provence, qui se distingue par le dynamisme de son trafic de voyageurs, fait arrêter les trains à grande vitesse entre la garrigue et l’autoroute, où une pagaille de voitures s’entasse au-delà des zones de stationnement saturées.

Ligne de démarcation

"La gare ne doit pas être le lieu où l’on monte et l’on descend du train, objecte Claude Gewerc, président de la région Picardie. On doit pouvoir y trouver des services publics, des commerces, de l’activité économique. Ce doit être un lieu de vie qui dynamise un territoire", résume-t-il, à l’issue d’une rencontre organisée le 8 décembre à Bruxelles avec des représentants de Louvain (Belgique) et Breda (Pays-Bas).
Dans la ville flamande, l’aménagement de la gare a été repensé avec l’essor urbain de la fin des années 70. A la suite d’un regroupement de communes, la gare de Louvain devient la ligne de démarcation entre la vieille ville et les quartiers plus modernes. Architectes et urbanistes se sont alors employés à combler le fossé entre les différentes zones, aménageant une grande place, construisant un tunnel souterrain et multipliant les stations de vélos.
A Breda, la métamorphose qui opèrera d’ici 2015 est encore plus frappante. Dans cette ville située au sud des Pays-Bas, le quartier de la gare s’apprête à accueillir un centre d’affaires, un tribunal, une université, des espaces récréatifs, des étals de marché, etc.

Compétition

Autant d’initiatives qui pourraient être déclinées sur le territoire picard, où l’absence de grande métropole contrebalancée par un maillage de villes de taille moyenne a abouti à un mode de gouvernance singulier. Depuis quelques mois, la région tente d’animer un réseau de communes désireuses de désenclaver les quartiers de gare. Une dizaine de communautés d’agglomérations, dont celles d’Amiens, de Beauvais ou de Creil, ont rejoint ce club, où les échanges se concentrent sur des thématiques précises (réhabilitation de friches industrielles polluées, diversification des modes de transport aux abords des gares, utilisation de terrains appartenant à la SNCF ou à RFF, etc.).
Cette mise en réseau de villes moyennes à l’échelle de la région tranche avec la logique de compétition entre les territoires qui s’immisce habituellement dans la politique des transports. A l'échelle nationale, l'aménagement du territoire et le secteur ferroviaire renvoient à des acteurs bien identifiés comme l’Etat ou la branche "gares et connexions" de la SNCF, habilitée à conduire des projets immobiliers. Mais les collectivités s’affirment de plus en plus comme des actrices à part entière dans ce domaine, en témoigne la charte tripartite signée le 13 décembre entre l’Association des maires de France, RFF et la SNCF. Au niveau européen en revanche, tout reste à construire, puisque la politique régionale de l’UE ne prévoit pas d’actions spécifiques en faveur des quartiers de gare.
"Il faut dépasser la logique où chaque Etat dit à la Commission européenne ce qu’il veut faire, plaide le patron de la Picardie. L’Europe ne consiste pas en une succession de projets nationaux." Cette inclinaison comporte bien sûr un enjeu financier : à l’heure où les crédits publics se contractent, l’Union européenne devient une précieuse courroie de transmission. Un sujet sur lequel la région pourrait mobiliser les commissaires européens Johannes Hahn (politique régionale) et Siim Kallas (transports).

 

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