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Chauffage urbain : la CLCV alerte sur les tarifs, les contrats et la gouvernance

La CLCV appelle les pouvoirs publics et les parlementaires à introduire de nouvelles mesures permettant d'éviter les dérives de certains systèmes de chauffage urbain, jugés trop coûteux. Face à une gouvernance des services jugée peu transparente et parfois défaillante, l'association de consommateurs demande aussi aux collectivités locales concernées de mieux contrôler cette activité.

Des systèmes "trop coûteux", une gouvernance des services "peu transparente" et "parfois défaillante" : la CLCV a alerté ce 30 octobre sur "la récurrence des situations anormales" qu’elle a constatées sur le terrain dans les services de chauffage urbain et qui impose selon elle "une sérieuse remise en ordre".
"D’une manière générale, le choix du chauffage urbain, qui est favorisé par les pouvoirs publics pour son contenu en énergie renouvelable (dont nous pouvons partager le principe) ne s’avère pas toujours être une solution économiquement intéressante pour les usagers, contrairement à ce qui est affiché, et malgré les importantes aides dont ces services bénéficient, pointe l’association de consommateurs. Cette question est particulièrement importante dans le logement social. En effet, si les copropriétés ont la liberté de se raccorder (sous réserve de disposer d’informations fiables), bien souvent, les collectivités locales dimensionnent un projet de chauffage urbain en imposant aux organismes HLM le raccordement de leur immeuble. Les habitants deviennent un public captif et voient parfois leurs factures grimper".

"Tarifs exorbitants"

La CLCV dénonce ainsi en de nombreux endroits des "tarifs exorbitants". A Clermont-Ferrand, la mise en place d’un système de chauffage urbain censé induire une baisse des coûts du chauffage a au contraire entraîné une hausse de la facture de 27% sur 4 ans. La municipalité de Grenoble est aussi épinglée pour avoir signé avec un prestataire privé un contrat "très désavantageux" pour les usagers.
A Paris, le chauffage fait l’objet d’un contrat de délégation jugé "archaïque". "Par exemple, c’est l’entreprise qui fixe le tarif et non la collectivité, dénonce la CLCV. Dans ce contexte déplorable de gouvernance, les usagers n’ont pas eu la répercussion sur leur facture de la baisse du taux de TVA." L’association reprend aussi d’autres exemples relevés par l’Agence du contrôle du logement social (Ancols) et les chambres régionales des comptes. Ainsi, les 4.700 logements du bailleur social Mâcon Habitat (71) équipés en chauffage urbain payent deux fois plus cher ce service que les autres locataires du bailleur.
Clichy (92) représente aussi selon elle "un cas choquant de discrimination tarifaire". "Les particuliers ont connu une hausse de tarif plus de quatre fois supérieure à la hausse de tarif des abonnés ‘bâtiments publics’", illustre-t-elle.
"A Bobigny (93), les 10.000 logements reliés aux systèmes de chauffage urbain payent environ 20% trop cher car ce service finance d’autres activités de la municipalité", souligne encore l’association.

"Gouvernance défaillante"

D’une manière plus générale, un rapport de l’Ancols montre que dans le parc HLM d’Ile-de-France le chauffage urbain est près de 50% plus cher que la moyenne du chauffage collectif de ce même parc, fait valoir la CLCV. A ces problèmes tarifaires s’ajoutent selon elle des difficultés à obtenir des informations, la majorité des services de chauffage urbain ne communiquant pas leur rapport annuel. L’association soulève aussi ce qui constitue à ses yeux "un problème de fond", à savoir "une gouvernance défaillante". "Le chauffage urbain est une compétence des collectivités locales, rappelle-t-elle. Dans 90% des cas, celles-ci passent par une délégation de service public (DSP), le plus souvent sous forme de concession, avec une entreprise. Un rapport récent de la Cour des comptes montre que l’on trouve dans ce secteur les traits caricaturaux d’une gestion défaillante de DSP et qui rappelle la distribution d’eau dans les années 1990 : un marché aux mains de deux entreprises, des contrats de très longue durée, une trop grande latitude tarifaire laissée au délégataire, un manque de contrôle par la collectivité, etc.".

Trois types de mesures à mettre en oeuvre

Pour la CLCV, du fait de son contenu en énergie renouvelable et de la possible stabilisation du prix qu’il offre, le chauffage urbain reste une solution d’avenir et de nombreux cas positifs en attestent. "Mais sa mise en place soulève au moins trois problèmes de fond qui appellent à des mesures collectives, d’autant plus que les réseaux de chaleur bénéficient d’importantes subventions publiques", note l’association.
La gouvernance étant régulièrement jugée trop faible, face aux quelques entreprises qui tiennent le marché (Cofely, Engie, Dalkia, etc.), la CLCV demande d’abord un plafonnement des durées de contrat à 10/12 ans (alors qu’ils sont souvent entre 25 et 30 ans), un contrôle plus effectif des comptes et de l’activité par la collectivité locale et une publication systématique des rapports annuels pour davantage de transparence.
La CLCV demande aussi que les nouveaux systèmes de chauffage urbain soient mieux évalués, ce qui implique selon elle une plus forte concertation avec les habitants. La Commission de régulation de l’énergie doit aussi pouvoir émettre un avis préalable avant le lancement d’un nouveau projet, en ayant connaissance du résultat des concertations locales. Il s’agit ainsi d’éviter les erreurs qui ont conduit à réaliser des projets qui n’étaient pas viables car engageant trop peu de volumes de consommation. Dès lors, "l’équilibre économique n’est pas atteint et les usagers doivent en assumer un surcoût d’autant plus important qu’un nouvel abonné ne se raccorde pas étant donné que le tarif de départ est prohibitif", souligne l’association.
Enfin, elle demande l’abolition du dispositif de facturation des charges du chauffage urbain en logement social tel qu’il a été modifié par la Loi Nome de 2011, à la demande des bailleurs sociaux. Cela a affecté selon elle tout le coût du service dans les charges du locataire, y compris les dépenses d’investissement, alors que les charges rémunèrent normalement ces dépenses d’exploitation. Cette mesure législative a ainsi "considérablement alourdi la dépense de chauffage urbain des locataires HLM", dénonce-t-elle.
La CLCV appelle les pouvoirs publics et les parlementaires à introduire ces dispositions qui permettraient un "développement plus équilibré du chauffage urbain". Elle demande aussi aux collectivités locales concernées de mieux contrôler cette activité dont elles ont la responsabilité.

 

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