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Comment l’ANCT encourage la création de bases adresses locales

Face à la complexité de la fusion des bases adresse existantes dans la base adresse nationale, l’ANCT privilégie, avec le soutien des associations d’élus locaux, la création de bases adresses locales. L’objectif de la start-up créée à cet effet est d’outiller les communes pour les aider à exercer pleinement une prérogative qui leur appartient.

L’existence d’adresses normalisées est la condition première à l’arrivée de la fibre dans chaque foyer ou entreprise. C’est aussi une donnée qui peut sauver des vies en facilitant l’acheminement des secours. C’est enfin un élément indispensable pour se faire livrer d’un colis à l’ère du tout dématérialisé. C’est pour toutes ces raisons que l’État a fait de l’adresse une donnée de référence et créé en 2015 la BAN ou base adresse nationale. Une base "unique" compilant l’ensemble des bases adresses préexistantes gérées, par la DGFIP, l’IGN, La Poste, OpenStreetMap. Le projet initial était de s’appuyer uniquement sur les grandes bases pour créer une seule BAN mais "cela n’a pas marché" ont reconnu les intervenants à une table ronde organisée par l’Avicca lors de son Trip d’automne des 25 et 26 novembre 2020. Les opérateurs d’infrastructures déployant la fibre reprochent notamment à la BAN d’être insuffisamment à jour du fait de process trop compliqués et trop éloignés du terrain. Avec parfois pour conséquence la constitution de bases de données parallèles, propriété d’acteurs privés…

 

Des communes sans adresses

Or comme l’a rappelé l’Association des ingénieurs territoriaux de France (AITF), l’adresse est une compétence des communes reconnue au travers du décret 94-1112 (publicité́ foncière) et de l’article L2213-28 du code général des collectivités territoriales (numérotation). Les communes et EPCI à s’être saisis pleinement de l’adressage restent cependant minoritaires. "Bon nombre d’élus de communes rurales sont convaincus à tort que l’adresse relève de La Poste, des impôts ou encore qu’il faut absolument rémunérer un prestataire pour réaliser un plan d’adressage", explique Sophie Clairet en charge de la start-up d’État sur la base adresse locale incubée par l’Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT). Le résultat de cette situation est une carte de France des données d’adresse qui tient du caléidoscope. L’état des lieux produit par la direction interministérielle du numérique (Dinum) montre ainsi que 31.363 communes, soit la quasi-totalité, ont des bases adresses multi-sources avec des niveaux de fiabilité extrêmement variables. Parallèlement, 2.152 communes gèrent une base adresse locale. 700 communes sont considérées en "zone blanche", totalement dépourvues d’adresses numériques normalisées. 

 

Libérer la commune de la dissémination des adresses

Une autre catégorie émerge cependant depuis quelques mois. Elle réunit les 814 communes utilisatrices du "guichet adresse" porté par la Dinum et l’ANCT avec le soutien de l’AMF et de l’AITF. "L’objectif de ce projet est simple mais ambitieux. Il s’agit de donner la possibilité aux communes ou aux EPCI de créer et mettre à jour facilement leur propre base adresse locale", résume Sophie Clairet. Synchronisé avec la BAN, ce fichier est "libératoire de toute autre formalité". En clair, il évite aux communes de devoir en informer les éditeurs de GPS, Google, La Poste, les opérateurs de réseaux, les secours, la DGFiP ou encore l’INSEE. 

Concrètement, les communes souhaitant créer leur base adresse locale ont deux possibilités. Soit il existe un EPCI ou une structure de mutualisation pour porter le projet et, accessoirement, accompagner les communes de la création des adresses jusqu’à la pose des plaques de rue. C’est le cas par exemple de la Dordogne dont plus de 200 communes utilisent un outil adossé au système d’information géographique (SIG) de l’agence technique départementale (ATD24). Les adresses créées, dûment validées par une délibération des conseils municipaux, ont pour premiers bénéficiaires le syndicat mixte en charge du déploiement de la fibre Périgord numérique, le service départemental d'incendie et de secours (Sdis) et les collectivités pour leurs propres besoins. Et grâce à la passerelle mise en place entre ATD24 et data.gouv.fr, elles sont reversées chaque mois dans BAN sans demander de consolidation. 

 

Outiller communes et EPCI

Pour les petites communes n’ayant ni SIG ni structure de mutualisation, l’ANCT a ensuite conçu avec Etalab la plateforme adresse.data.gouv.fr. "À Planès (66), commune comptant 57 habitants à l’année mais qui est aussi une station de ski, la mairie était tannée par l’opérateur pour mettre en place des adresses. Le devis présenté par le prestataire se montait à 3.000 euros. C’est la secrétaire de mairie qui est tombée sur notre site. Elle se demandait si c’était fiable et gratuit", raconte Sophie Clairet. Rassurée sur ces deux points, la secrétaire de mairie a mis quelques jours pour finaliser son plan d’adressage. Généralement, ces initiatives font "tâche d’huile" et l’un des objectifs de la start-up d’État est bien de créer un "réseau des référents adresse", notamment au niveau des EPCI. Des structures intercommunales auxquelles la start-up propose des outils comme un validateur d’adresses à partir d’un fichier tabulaire ou un tableau de bord de suivi de l’adressage territorial.

 

Un cadre juridique modernisé à la faveur de la loi 4D

Du côté de l’AITF, on se préoccupe aussi de renforcer l’assise juridique de l’adressage. "Il s’agit à la fois de réaffirmer le rôle central de la commune et d’adapter un cadre juridique à l’ère numérique", explique Maël Reboux qui coordonne un groupe de travail sur ce sujet. En pratique l’AITF, qui s’est alliée à l’Afigese, un réseau des financiers, gestionnaires, évaluateurs, manageurs des collectivités territoriales, souhaite utiliser la future loi 4D pour proposer un toilettage de la réglementation. Les associations voudraient rendre l’adressage obligatoire pour toutes les communes, définir des formats numériques reprenant les standards qu’elles ont conçu – il s’agit en particulier de rassurer les élus sur la préservation des toponymes et des lieux-dits – et, bien entendu, d’imposer leur publication en open data via le portail adresse.data.gouv.fr. "Une publication qui vaudra information des tiers selon le principe 'dites-le nous une fois'", précise le technicien. 

L’appropriation de ces outils par les territoires prendra cependant nécessairement du temps : la BAN agglomérée n’a pas vocation à disparaître du jour au lendemain, l’idée étant plutôt une montée en charges progressive des bases adresses locales.

 

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