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Commerce extérieur - Comment les régions sont devenues les pilotes de l'export

En quelques mois, les régions se sont imposées comme les pilotes de l'animation du réseau des acteurs de l'export sur leur territoire. Cette stratégie voulue par la ministre du Commerce extérieur Nicole Bricq, s'appuie sur les nouveaux plans régionaux d'internationalisation des entreprises. Les trois quarts de ces plans devraient être prêts en mars 2013, indique l'ARF. L'objectif : atteindre 10.000 entreprises exportatrices de plus d'ici trois ans.

On les attendait sur le développement économique, mais c'est sur l'export que le rôle des régions a le plus avancé ces derniers mois et ce avant même la future loi de décentralisation. Les trois quarts des régions devraient avoir terminé leurs plans régionaux d'internationalisation des entreprises (Prie) d'ici le mois de mars 2013. "C'est un sujet qui se passe bien depuis le début, notamment dans les relations entre l'Association des régions de France (ARF) et le cabinet du ministère", explique-t-on à l'ARF, en allusion au travail effectué avec l'équipe de Nicole Bricq, ministre du Commerce extérieur. Celle-ci en a fait son cheval de bataille : ramener le commerce extérieur à l'équilibre, hors énergie, d'ici la fin du quinquennat. Un objectif ambitieux, puisqu'il s'agit de gagner 25 à 26 milliards d'euros sur un déficit de la balance commerciale de 66 milliards d'euros. Pour atteindre cette cible, la ministre compte s'appuyer sur les régions en approfondissant le travail entrepris par le précédent gouvernement avec la création de guichets régionaux de l'export. "Il faut disposer d'une bonne organisation territoriale, a ainsi précisé Nicole Bricq à l'occasion de son audition devant la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale le 29 janvier 2013. Le chantier prioritaire est d'organiser le partenariat des territoires." 
En septembre 2012, après les engagements généraux pris entre les régions et l'Etat dans le cadre du pacte de confiance pour la croissance et pour l'emploi, la ministre a réuni à son tour les présidents de région pour prendre des engagements en matière d'internationalisation des entreprises. "Elle a positionné les régions comme pilotes de l'export sur leur territoire, détaille l'ARF. Fortes de ce positionnement, les régions se sont engagées dans des Prie qui ont vocation à intégrer les futurs schémas régionaux de développement économique (SRDE), pour devenir la partie opérationnelle du volet international." Ce que devrait consacrer le projet de loi de décentralisation. Une délégation de l'ARF devait justement rencontrer Marylise Lebranchu, ministre de la Fonction publique et de la Décentralisation, et Anne-Marie Escoffier la ministre déléguée à la Décentralisation, ce mardi, pour un dernier tour de table sur les compétences. "Tout le monde voit arriver la région comme le chef de file sur le plan économique ; pour l'export, c'est la suite logique, ou l'anticipation de ce qui va se passer", explique l'ARF. Certaines régions ont d'ailleurs anticipé le mouvement. Ainsi, en Bretagne, la région a fusionné avec la chambre régionale de commerce et d'industrie (CRCI) sur la partie internationale pour que les entreprises n'aient qu'un seul interlocuteur. Dans les Pays de la Loire, la CRCI a été choisie par la région pour devenir l'outil opérationnel de l'internationalisation des entreprises.


"C'est compliqué de s'y retrouver pour une entreprise"

En Provence-Alpes-Côte d'Azur, la région a choisi de mettre en place une plateforme de services unique. La région, qui exporte chaque année 40 milliards d'euros de biens et de services, a initié en partenariat avec la mission de développement économique régional (MDER) la création d'un cluster dédié au commerce international. Ce cluster s'est réuni pour la première fois le 9 février 2012. 
Quant aux chartes régionales de l'export signées au fil de l'eau lors du précédent quinquennat, l'idée n'est pas de les annuler mais de les améliorer. "Le nouveau positionnement permet de les rediscuter. Il ne faut pas casser ce qui fonctionne, mais offrir un nouveau cadre là où les discussions sont plus difficiles", détaille l'ARF. Et ce nouveau positionnement, avec les régions comme chefs de file, devrait permettre de clarifier le rôle de chacun et l'organisation territoriale. L'ARF en est convaincue : "La région va assurer l'animation de la mise en réseau de tous les acteurs, c'est une manière de clarifier le paysage pour que les entreprises sachent qui fait quoi, et que les acteurs ne se marchent pas sur les pieds." Car comme l'a reconnu la ministre lors de son audition, il est "compliqué de s'y retrouver pour une entreprise" et l'offre commerciale à l'international n'est pas très lisible... D'après l'ARF, le pilotage des régions faisait défaut dans la stratégie du gouvernement précédent : "Tous les partenaires avaient voulu être positionnés comme un élément central. Là, la région est positionnée comme chef de file, et cela fonctionne, cela montre que quand on donne une responsabilité aux régions et qu'on leur fait confiance, il y a tout de suite une forte mobilisation."

Des développeurs à l'international

Un comité de liaison s'est déjà réuni trois fois pour suivre, au niveau national, les avancées du chantier. Quant aux objectifs et indicateurs donnés dans ces nouveaux Prie, rien n'est encore précisé sur la manière de les définir. Mais une règle du jeu s'impose déjà : laisser les régions s'organiser comme bon leur semble, en fonction de leurs contraintes et de leurs spécificités territoriales. "Ce n'est pas un jardin à la française qui permettra de revenir à l'équilibre mais une bonne mise en réseau et un bon partenariat dans chaque région tenant compte des acteurs locaux et de leur organisation", assure l'ARF. 
Lors d'un déplacement à Marseille le 28 janvier, sur le thème des volontaires internationaux en entreprises et de la filière numérique à l'export, Nicole Bricq était allée dans ce sens. "Plutôt que de construire des usines à gaz, je préfère des démarches opérationnelles et m'appuyer sur les bonnes pratiques", avait-elle souligné. Les fonds que la Banque publique d'investissement (BPI) doit réserver à l'international devraient aussi aider les régions à développer leur accompagnement aux entreprises. "Je me suis battue pour que la BPI ait un volet international, ce qui n'était pas acquis", a insisté la ministre lors de son audition, précisant qu'une trentaine de développeurs à l'international, issus des effectifs d'Ubifrance, seront mis en place dès cette année. Ces nouveaux développeurs prendront place aux côtés des collaborateurs de la BPI en charge des financements, des fonds propres, des prêts et de l'innovation, pour accompagner les entreprises dans leurs démarches à l'international. Les régions se sont engagées à faire progresser durablement de 10.000 le nombre de PME/ETI exportatrices à l'horizon de trois ans, en se focalisant sur les entreprises innovantes, et d'accroître le chiffre d'affaires export des entreprises déjà présentes à l'international, dont une bonne part d'ETI.