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Biodiversité - Comment tirer profit des services liés aux écosystèmes à travers les politiques locales ?

Elaboré par le groupe d'étude baptisé "L'économie des écosystèmes et de la biodiversité" (TEEB, The Economics of Ecosystems and Biodiversity), sous les auspices du programme des Nations unies pour l'environnement, un rapport intitulé "L'économie des écosystèmes et de la biodiversité pour les décideurs politiques locaux et régionaux" a été publié le 9 septembre dernier. Il invite les acteurs locaux à prendre conscience de la dimension économique associée à leur patrimoine naturel local et évalue l'importance des services liés aux écosystèmes dans l'élaboration des politiques locales.

Le projet TEEB a été lancé à la suite d’une discussion sur l’économie de la perte des écosystèmes et de la biodiversité qui s’est tenue lors de la rencontre des ministres de l’Environnement du G8+5, organisée à Potsdam en mars 2007. Financé par la Commission européenne et certains gouvernements, le projet TEEB doit permettre de formuler des arguments économiques susceptibles de faire évoluer la manière d’évaluer et de gérer les ressources naturelles. Il s’agit par ailleurs d’une piste explorée au niveau national, notamment au sein d’un important rapport remis en mai 2009 et rédigé par un groupe de travail réuni par le Centre d'analyse stratégique et piloté par le scientifique Bernard Chevassus-au-Louis.
Dans le cadre du projet TEEB, deux précédents rapports étaient destinés aux décideurs nationaux et aux entreprises (respectivement publiés en novembre 2009 et juillet 2010). Ce troisième rapport s’adresse quant à lui aux décideurs locaux et régionaux et "leur indique comment mieux comprendre la valeur et les services associés à leur patrimoine naturel, comme les zones boisées, les parcs et les voies navigables, afin d'en tirer profit à travers les politiques locales telles que la gestion urbaine, l'aménagement du territoire et la gestion des zones protégées", relève le communiqué de presse de la Commission européenne.

L’étude montre à quel point les villes dépendent de la nature et révèle comment les services liés aux écosystèmes peuvent fournir des solutions rentables aux services municipaux. Pour Pavan Sukhdev, chargé de diriger le projet TEEB, les valeurs multiples et complexes de la nature ont en effet "une incidence économique directe sur le bien-être individuel ainsi que sur les dépenses publiques, tant au niveau local que national". Or, les autorités locales et régionales de planification détiennent "un immense pouvoir et peuvent jouer un rôle extrêmement positif ", relève Janez Potočnik, membre de la Commission européenne chargé de l’environnement.
Ce rapport a vocation à être un outil consultatif utile pour les décideurs locaux et régionaux ou encore pour les organisations non-gouvernementales. A travers 200 pages, il fournit ainsi des conseils pratiques sur la façon de traiter, à un niveau local et régional, le défi de la perte de biodiversité. Il examine ce que les collectivités locales peuvent faire en ce qui concerne l'utilisation des ressources naturelles, la gestion et le maintien de la biodiversité, notamment à travers la conception des politiques urbanistiques ou des approches économiques.
Le rapport insiste sur les trois points fondamentaux qui doivent être pris en considération pour que le patrimoine naturel puisse contribuer au développement local : répartir équitablement les droits d'accès aux ressources naturelles ; utiliser au mieux les compétences scientifiques et pratiques disponibles, afin d'établir un langage commun ; impliquer les acteurs concernés tout au long du processus de manière à définir les priorités et à concevoir des politiques locales réalistes et efficaces. A ce titre, il recommande en particulier d'inclure des systèmes de rétribution des services rendus par les écosystèmes, d'élaborer des lignes directrices visant à récompenser une bonne gestion du patrimoine naturel local, ainsi que de mettre en place des processus de certification et de labellisation.
Le rapport, qui réunit des études de cas concernant de nombreux pays tels que l'Afrique du Sud, l'Inde, l'Australie, le Vietnam ou le Pérou, cite en outre de nombreux exemples d'intégration réussie des idées en faveur de la biodiversité dans les décisions de planification locales et précise les avantages à en retirer pour les populations locales. Il montre notamment comment la ville de Rome tire profit de ses 5.000 ha d'espaces verts publics, ou comment les autorités locales du pays de Galles améliorent la santé des citoyens en augmentant le nombre d'espaces verts disponibles.
Ce troisième rapport précède la présentation des résultats complets de l'étude TEEB lors de la dixième Conférence des Parties (COP 10) de la Convention sur la diversité biologique, qui aura lieu en octobre à Nagoya (Japon).

Philie Marcangelo-Leos / Victoires Editions