Personnes handicapées - Conférence nationale du handicap : premier grand rendez-vous depuis la loi de 2005

Ce 10 juin à dix heures, le président de la République ouvre à la Cinémathèque française (la seule salle parisienne totalement accessible) la première Conférence nationale du handicap. Celle-ci résulte de l'Article 3 de la loi Handicap du 11 février 2005, prévoyant que "le gouvernement organise tous les trois ans, à compter du 1er janvier 2006, une conférence nationale du handicap à laquelle il convie notamment les associations représentatives des personnes handicapées, les représentants des organismes gestionnaires des établissements ou services sociaux et médico-sociaux accueillant des personnes handicapées, les représentants des départements et des organismes de sécurité sociale, les organisations syndicales et patronales représentatives et les organismes qualifiés, afin de débattre des orientations et des moyens de la politique concernant les personnes handicapées". A la suite de cette réunion et après avoir recueilli l'avis du Conseil national consultatif des personnes handicapées (CNCPH), le gouvernement déposera sur le bureau des assemblées - sans doute en septembre - un rapport sur la mise en oeuvre de la politique nationale en faveur des personnes handicapées, qui pourra donner lieu à un débat.

Emploi, AAH et MDPH

La Conférence a été préparée par le comité de pilotage de suivi de la réforme de la politique du handicap, mis en place par la Secrétaire d'Etat aux solidarités en octobre 2007. Plusieurs rapports (Parlement, CNCPH, délégué interministériel aux personnes handicapées, Médiateur de la République...) ont également apporté leur pierre au débat. Le chef de l'Etat devrait donc profiter de la Conférence pour annoncer plusieurs innovations ou aménagements issus de ces réflexions. La plupart d'entre elles intéressent les collectivités, et plus particulièrement les départements.
Les modalités de fonctionnement des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) - maillon faible de la réforme de 2005 - pourraient ainsi être revues. Des aménagements sont également attendus sur le dispositif de scolarisation des enfants handicapés, avec un possible renforcement et une plus grande professionnalisation du dispositif d'accompagnement. L'accès à l'emploi devrait, lui aussi, faire l'objet d'annonces significatives. Lors de son déplacement dans les Hautes-Pyrénées consacré à ce thème, le 25 mars dernier, Nicolas Sarkozy avait promis une application beaucoup plus stricte de l'obligation d'emploi, indiquant notamment que "les administrations qui ne feront pas leur place aux travailleurs porteurs d'un handicap, qui ne respecteront pas les 6%, ne verront pas leur masse salariale augmenter".
Mais les annonces les plus attendues concernent la réforme de l'AAH. Si le gouvernement n'a ni l'intention, ni les moyens, d'aller au-delà de la revalorisation générale de 25% annoncée il y a trois mois, il travaille en revanche à un cumul entre l'AAH et un revenu professionnel, sur le modèle du revenu de solidarité active (RSA). Lors de leur rencontre du 31 mars avec Xavier Bertrand et Valérie Létard - au lendemain de la manifestation parisienne de "Ni pauvre, ni soumis - les associations s'étaient toutefois déclarées déçues des premières pistes évoquées par les deux ministres.

Jean-Noël Escudié / PCA


Les associations entre scepticisme et mobilisation

L'occasion solennelle de cette Conférence nationale suscite à la fois attentes et scepticisme, surtout après la polémique sur les ressources des personnes handicapées, lancée en mars dernier par le collectif "Ni pauvre, ni soumis", et l'annonce par Nicolas Sarkozy d'une revalorisation de l'allocation aux adultes handicapés (AAH) de 25% sur cinq ans. Tout en reconnaissant les progrès de la loi de 2005, les associations sont particulièrement mobilisées sur les lenteurs de sa mise en oeuvre, dans un registre qui va de l'indifférence feinte à la revendication.
Le collectif "Ni pauvre, ni soumis" affirme ainsi qu'il est "fort peu probable, encore une fois, que cette conférence réponde concrètement sur le fond à la question des ressources" et organise le même jour une manifestation et une conférence de presse... devant la préfecture de La Roche-sur-Yon (Vendée).
L'Association des paralysés de France (APF) se veut plus constructive, en évoquant un "grand oral de rattrapage pour Nicolas Sarkozy" et en demandant l'annonce de mesures concrètes comme "l'impulsion d'une politique d'accessibilité universelle par des mesures d'incitation financière, d'information et de formation de tous les acteurs concernés". L'APF appuie ses revendications sur un sondage Ifop, réalisé les 30 et 31 mai, montrant que "73% des personnes en situation de handicap n'ont perçu aucune amélioration dans leur vie quotidienne depuis l'adoption de la loi du 11 février 2005". Cette affirmation et ce sondage présentent toutefois un sérieux biais méthodologique, puisque l'échantillon de 402 répondants se compose uniquement d'adhérents de l'APF.
Pour sa part, la Fnath (accidentés de la vie) attend en priorité des annonces sur l'accès à l'emploi et sur le complément de ressources. L'Unapei (handicap mental) souhaite que la Conférence soit "l'occasion de lancer une nouvelle politique en faveur des personnes handicapées mentales et de leurs familles afin qu'elles puissent pleinement accéder à la vie de la cité" et insiste particulièrement sur l'effectivité du droit à l'éducation et à la scolarisation, ainsi que l'accès à l'emploi. De son côté, l'Association française contre les myopathies (AFM) souhaite "une compensation intégrale et équitable, quel que soit le département".
J.-N. E. / PCA


 

 

 

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