Commande publique - Confier à un tiers l'exécution d'un service de transport est un acte de pouvoir adjudicateur
Lorsqu'une personne publique confie à un tiers l'exécution du service de transport des personnes à mobilité réduite, agit-elle en tant que pouvoir adjudicateur ou en tant qu'entité adjudicatrice ? Confrontés à cette question, le juge des référés et le Conseil d'Etat ont des avis totalement différents.
En effet, le juge des référés a considéré que la conclusion d'un tel contrat relevait de la compétence d'une entité adjudicatrice. Le magistrat justifiait cette solution par deux éléments : la communauté d'agglomération était compétente en matière de transport. Par ailleurs, elle assurait "directement l'organisation de l'exploitation du réseau des transports urbains en assumant le risque économique et en contrôlant son exécution".
Les magistrats du Palais-Royal ne partagent pas cet avis. Dans l'affaire en cause, ils relèvent que "la personne publique ne s'est pas bornée à faire l'acquisition d'équipements ou de matériels adaptés au transport des personnes à mobilité réduite et s'intégrant au réseau de transport public de l'ensemble de la population déjà constitué et exploité en régie". Au contraire, en confiant l'exécution d'un service de transport à l'attributaire, la personne publique agissait en tant que pouvoir adjudicateur.
Cette position du Conseil d'Etat n'est pas nouvelle. Elle s'inscrit dans le prolongement de plusieurs jurisprudences.
Pour rappel, en 2007 les magistrats de la Haute Juridiction justifiaient déjà leur position de la manière suivante : en confiant l'exécution d'un service de transport à une autre entité, la personne publique se dessaisit du réseau. De ce fait, elle perd sa qualité d'entité adjudicatrice.
Des conclusions similaires ont été rendues en 2009 : l'acte par lequel une personne publique confie "à un tiers l'exécution du service de transport scolaire n'était pas constitutif d'une activité d'exploitation de réseau ni davantage une activité de mise à disposition de réseau au sens de l'article 135 du Code des marchés publics". Et ce, malgré "la circonstance que le contrat envisagé comporte des stipulations manifestant le contrôle du département sur les conditions d'organisation et de fonctionnement du service public en cause". Dès lors, la personne publique ne pouvait être considérée comme agissant en tant qu'entité adjudicatrice.
L'Apasp
Références : Conseil d'Etat, 23 novembre 2011, Société GIHP Lorraine Transports, n°349746, Conseil d'Etat, 9 juillet 2007, Syndicat EGF-BTP, n°297711, Conseil d'Etat, 14 décembre 2009, département du Cher c/ société Kéolis Centre, n°330052.