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Artificialisation des sols - Consommation des terres agricoles : vers une fusion des Safer et des EPF ?

A l'occasion d'un colloque organisé par l'Association nationale de développement des espaces ruraux (Ander) le 6 février, la question de la fusion des Safer et des établissements publics fonciers (EPF) a été posée. Objectif : renforcer leur poids pour mieux endiguer la consommation excessive de terres agricoles au profit des zones urbaines.

Comment freiner la consommation toujours plus grande des terres agricoles au profit des zones urbaines ? La question a été une fois de plus posée à l'occasion d'un colloque organisé le 6 février 2012 par l'Association nationale de développement des espaces ruraux (Ander). "La baisse très forte du nombre d'exploitants agricoles ne semble pas connaître de plancher", a déploré Vincent Piveteau, directeur de l'école nationale supérieure du paysage de Versailles, président du collectif "Ville-Campagne". Sur les cinquante dernières années, les surfaces agricoles ont reculé de 20%, dont 2,5 millions d'hectares sous l'effet de l'extension de la ville et 4,5 millions d'hectares au profit de la forêt. D'après les tendances actuelles, la chute se poursuivrait dans les années à venir. Les surfaces agricoles seraient ainsi amenées à régresser de 12% d'ici à 2050.
Des outils ont été mis en place pour limiter cette consommation excessive des terres agricoles dans le cadre de la loi de modernisation de l'agriculture et de la pêche du 27 juillet 2010 et de la loi de finances rectificative du 29 décembre 2010. Un nouveau dispositif, qui entrera en vigueur le 1er mars 2012, est prévu dans la loi de finances rectificatives pour 2010, reposant sur une taxe d'aménagement (TA) et le versement pour sous-densité (VSD). La première remplace la taxe locale d'équipement, la taxe départementale des espaces naturels et sensibles et la taxe départementale pour le financement des conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement. Elle est instituée dans les communes dotées d'un plan local d'urbanisme (PLU) ou d'un plan d'occupation des sols (POS) et établie sur la construction, la reconstruction, l'agrandissement des bâtiments et les aménagements de toute nature nécessitant une autorisation d'urbanisme. Son objectif : simplifier et rendre plus lisible la fiscalité. Le VSD, quant à lui, a été créé pour inciter à une utilisation plus économe de l'espace. Il a pour objectif de densifier les surfaces construites en privilégiant le développement vertical plutôt que l'urbanisation horizontale. Il pourra être instauré par les communes pour les constructions sur les zones urbanisées ou à urbaniser de leur territoire. Mais ces outils sont-ils suffisamment dissuasifs ? "Ce sont des outils parmi d'autres, a expliqué Brigitte Barèges, députée (UMP) du Tarn-et-Garonne et maire de Montauban, il faut surtout que les maires utilisent des outils comme les PLU ou les zones d'aménagement concertées (ZAC) pour freiner l'expansion de terrains constructibles. Ce n'est pas facile mais c'est possible. Il faut aussi qu'ils aient une véritable politique d'urbanisation et d'aménagement du territoire."

Des champs d'action de plus en plus perméables

L'élue a de son côté créé une ZAC au nord-ouest de la ville de Montauban pour permettre une expansion maîtrisée de l'urbanisation. La ZAC de Bas Pays doit ainsi accueillir 10.000 habitants d'ici 2013, "avec la mise en œuvre de périmètres de zones constructibles au-delà desquelles nous n'irons pas", a détaillé la maire de Montauban. Dans cette zone, des quartiers vont être développés avec les équipements publics et commerces nécessaires. "Il faut que les collectivités locales se réapproprient cette question, a assuré Marc Kasynski, directeur général de l'Etablissement public foncier Nord-Pas-de-Calais, président de l'Association des études foncières (Adef), il faudrait des stratégies claires, et des outils adaptés, avec des moyens." Les établissements publics fonciers sont là pour tenter de réguler l'offre et la demande, tout comme les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (Safer), chacun dans sa spécialité : les premiers, pour l'urbain, les seconds, pour la régulation du foncier agricole et environnemental. 19 établissements locaux et 13 établissements d'Etat existent actuellement sur le territoire et 26 Safer. Mais si chacune de ces structures a un rôle bien particulier, leur champ d'action devient de plus en plus perméable. Pour faciliter les aménagements publics, les établissements publics fonciers (EPF) sont ainsi souvent amenés à construire des projets territoriaux qui permettent de préserver les espaces agricoles autour des villes, pour les rendre plus attractives. Et vice-versa. "La question de la complémentarité est sur la table, a souligné Marc Kasynski, y compris là où il n'y a pas d'EPF. Il faut savoir comment la puissance publique veut utiliser des outils d'intervention sur les marchés." Suite aux Assises nationales du foncier, qui ont eu lieu fin juin début juillet 2011, un groupe de travail au sein de l'Adef a été mis en place pour travailler sur ce sujet, et rendre compte des partenariats existants et envisageables entre les deux structures. "Avant de parler de fusion, il faut réfléchir à ce qui peut être complémentaire", a indiqué Michel Heimann, directeur général de la Fédération nationale des Safer (FNSafer). Si les deux structures étaient amenées à se rapprocher et se réorganiser, leur poids pourrait être renforcé et freiner l'avancée des villes.

Emilie Zapalski

Références : loi n°2010-874 du 27 juillet 2010 de modernisation de l'agriculture et de la pêche ; loi n°2010-1658 du 29 décembre 2010 de finances rectificatives pour 2010. 

 

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