Coopération transnationale pour la valorisation du patrimoine troglodytique bergeracois

Ouvrages défensifs, culturels, funéraires, économiques ou maisons d'habitation... les traces troglodytes sont nombreuses et mal connues dans le monde. Pour valoriser son patrimoine troglodytique, le pays du Grand Bergeracois s'est lancé avec bonheur dans une aventure transnationale.

Tout a commencé par un accident dans le pays du Grand Bergeracois (159 communes, 14 communautés de communes et 102.000 habitants) : une vanne du barrage EDF de Tuilières, sur la Dordogne, a cédé le 29 janvier 2006 entraînant une baisse du niveau de l'eau de quinze mètres. L'été suivant, des membres de l'association de valorisation du patrimoine local, "Les Pesqueyroux", découvrent un ensemble remarquable de neuf cavités, grottes ayant été habitées par l'homme, appelées localement "cluzeaux", englouties depuis un siècle sous les eaux.
Comme l'explique Frédéric Gontier, président des Pesqueyroux, premier adjoint au mairie de Saint-Capraise-de-Lalinde, vice-président de la communauté de communes Entre Dordogne et Louyre et vice-président du pays du Grand  Bergeracois, les cavités peuvent avoir deux rôles différents : elles servaient de poste de guet, pièce unique et exiguë, ou de refuge aux paysans qui ne disposaient pas d'autres protections (remparts, château, église fortifiée...). Dans ce dernier cas, elles présentent deux voire trois pièces aménagées avec portes, niches et les indispensables "trous de visée" qui permettaient de se débarrasser d'un assaillant trop téméraire.

 

Un ouvrage de 120 pages sur les cluzeaux

En Périgord, le terme "cluzeau" désigne un souterrain-refuge pour abriter et protéger. Par exemple, la Dordogne servait de frontière avec l'Angleterre, pendant la guerre de Cent Ans. Compte tenu de la disposition des cavités, en alternance d'une rive à l'autre, comme la forme de la lettre W, on suppose qu'elles permettaient de surveiller et de signaler l'arrivée d'ennemis. Les différentes encoches dans la roche semblent prouver qu'on y posait des madriers pour protéger les familles qui s'y réfugiaient.
En 2006, une course contre la montre s'engage car la fin de la réparation du barrage et la remise en eau est prévue pour janvier 2009. Il s'agit de répertorier chaque cluzeau, d'établir des plans précis, de les dessiner et de les filmer pour enrichir le patrimoine local. La préfecture de la Dordogne, par le biais de la direction départementale de l'Equipement (DDE) accorde à l'association le droit de recenser les différentes cavités et de les photographier. Un ouvrage de cent vingt pages est réalisé et publié sur internet.

 

Un projet de coopération entre seize territoires, espagnols, français et italiens

Suite à cette publication, au printemps 2007, des Espagnols entrent en contact avec le pays du Grand Bergeracois pour proposer la participation à un projet de coopération intitulé "Valorisation du patrimoine troglodytique" dans le cadre d'un programme européen Leader. En effet, en Andalousie, dans la région de Guadix, il existe un patrimoine troglodytique de premier ordre, exploité de manière active par les professionnels du tourisme local. Une étude révèle que l'histoire du troglodytisme est mal connue. Le groupe d'action local (GAL) Comarca de Guadix, chef de file du projet, recherche des partenaires européens, bénéficiaires du programme européen Leader+, détenant un patrimoine troglodytique, pour étendre la coopération. Les Espagnols contactent en même temps le GAL Sud-Charente pour lequel le patrimoine troglodyte se résume en un édifice remarquable sur la commune d'Aubeterre.
Les deux territoires français décident de s'inscrire dans ce projet de coopération dont l'objectif est d'explorer et de valoriser ce patrimoine international. Un accord de partenariat liant les structures porteuses est signé. Au final, cette action de coopération compte seize partenaires : treize espagnols, deux français et un italien.

 

Une exposition sur les troglodytes va tourner en Aquitaine et en Poitou-Charentes

Lancé en 2006 par les Espagnols, ce projet s'est achevé en été 2008. Trois actions concrètes ont été menées côté français. François Queval, chargé de projet pour le GAL du Grand Bergeracois, a participé à des rencontres internationales, en Andalousie, en mai 2008, autour d'une exposition espagnole sur le troglodytisme dans le monde et dans les régions partenaires. L'association Les Pesqueyroux a enrichi le site web du projet www.troglos.eu avec ses textes et ses photos. Elle a réalisé une exposition à Bergerac avec les documents réunis pour l'exposition espagnole, puis à Aubeterre. Elle devrait continuer à tourner ensuite en Aquitaine et en Poitou-Charentes. Localement, l'association a organisé une conférence et accueilli une délégation de représentants espagnols et charentais.
Si la langue et les distances ont été une difficulté pour conduire ce projet transnational, la satisfaction est grande de l'avoir mené à bien. L'ambition initiale a toutefois été revue à la baisse pour des raisons financières : si les Espagnols ont investi une somme importante (environ 100.000 euros), le pays de Bergerac n'a pu consacrer au projet que 4.000 euros dont 3.000 pour l'exposition française. Selon François Queval, ce projet est une réussite car il a permis de mettre en évidence l'universalité du patrimoine troglodytique dans le monde, de faire prendre conscience aux acteurs locaux de l'importance de ce patrimoine et d'acquérir des méthodes de travail pour l'étudier et le valoriser.

 

Nathalie Froissart, pour la rubrique Expériences des sites Mairie-conseils et Localtis

Association Les Pesqueyroux

pesqueyroux@wanadoo.fr

Frédéric Gontier

Président, vice-président du pays du Grand Bergeracois

Association du pays du Grand Bergeracois

43 bd Maine de Biran
24100 Bergerac
fqueval@pays-de-bergerac.com

François Queval

Chargé de projet

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