Culture : la FNCC tient congrès sur fond de tensions budgétaires

La Fédération nationale des collectivités pour la culture tient, à Marseille les 11 et 12 avril, son premier congrès depuis 2017. Pour son président, les débats, placés sous le signe de tensions budgétaires, devront aboutir à des solutions.

Baisse des moyens du ministère de la Culture et des collectivités, absence de marges de manœuvre fiscales, tels sont les principaux points de tension mis en avant par Frédéric Hocquard, président de la Fédération nationale des collectivités pour la culture (FNCC), lors d'un point presse de présentation du 25e congrès de l'organisation, qui se tiendra à Marseille les 11 et 12 avril et rassemblera pour la première fois depuis 2017 plus de deux cents élus venus de toute la France et représentants tous les strates de collectivités.

"On arrive dans un temps budgétaire pour la culture qui n'est pas simple, explique l'adjoint à la maire de Paris chargé du tourisme et de la vie nocturne. La ministre de la Culture a annoncé il y a peu une baisse très importante de son budget, de l'ordre de 10% cette année." De leur côté, les collectivités territoriales ne sont pas exemptes de difficultés en la matière, notamment en raison d'importantes augmentations de coût de fonctionnement enregistrées ces dernières années. "Si vous devez boucler le budget d'une collectivité et que vous avez des charges obligatoires, sur le foncier, le social, quand arrive la question du budget de la culture, les points de tension sont un peu plus forts que les années précédentes", admet-il.

Souplesse fiscale

Frédéric Hocquard se montre particulièrement préoccupé par le sort des scènes labellisées et du patrimoine. "Avec les 200 millions d'euros d'économies dans la culture [dans le cadre du plan d'économies de 10 milliards annoncé en février par le gouvernement, ndlr], dont 90 millions sur la création, on voit bien que l'État va baisser sa part de cofinancement. Ça va toucher les scènes labellisées. Que va-t-il se passer pour ces scènes alors que parallèlement, elles ont des coûts de fonctionnement plus importants ?" s'interroge l'élu. Et parmi les réponses possibles, il en élimine immédiatement une : "Si on se tourne vers nous, les collectivités, pour compenser la baisse des interventions de l'État, on ne pourra pas le faire." Un avertissement qui vaut également pour le patrimoine avec l'annonce, là encore à la suite du plan d'économies du gouvernement, d'une baisse des crédits à hauteur de 100 millions d'euros. "Comme vous le savez, le patrimoine appartient souvent aux collectivités mais elles n'ont pas toutes les moyens de l'entretenir", prévient-il.

Pour pallier le manque de ressources financières, Frédéric Hocquard milite pour un assouplissement des marges de manœuvre fiscales et met en avant un principe auquel il est très attaché : la libre administration des collectivités locales. Pour le président de la FNCC, "la question est de savoir s'il peut y avoir des leviers fiscaux supplémentaires qui bougent ou non. C'est une discussion globale, pas forcément fléchée vers la culture. Sur la question des transports en Île-de-France, une solution a été trouvée entre la région et l'État pour affecter la taxe de séjour de l'année 2024 aux questions de transports. Faut-il aller vers ce type de solutions ?" Pour lui, selon cette logique de libre administration des collectivités, celles qui veulent augmenter les impôts pour donner plus de moyens à la culture devraient avoir le droit de le faire. "Nous ne proposons pas de mettre en place un 'impôt culture' mais mettons ce sujet en discussion", avance-t-il.

Pour une culture coconstruite avec l'État

Mais la tension ne porte pas que sur l'aspect budgétaire. Le dialogue entre l'État et les collectivités doit aussi être remis au goût du jour, estime les responsables de la FNCC. "Je vous renvoie au dernier congrès de l'AMF, une association pluraliste, dont le bureau a lancé un appel ferme et fort sur le fait que les collectivités territoriales devaient être plus et mieux écoutées par l'État du point de vue du portage des politiques publiques. Sur les questions de culture, on est à un moment particulier car les politiques culturelles sont coconstruites entre l'État et les collectivités. Là aussi on a besoin d'évoquer des choses en termes de perspectives et de propositions. Ce sera un des sujets abordés au cours de notre congrès."

Les remous qui touchent depuis plus d'un an les écoles d'art territoriales, auxquelles la FNCC consacrera une table ronde, illustrent ce besoin de dialogue. Si Frédéric Hocquard se félicite qu'il s'agisse d'un dossier sur lequel la coconstruction entre l'État et les collectivités fonctionne depuis très longtemps, il n'en a pas moins trouvé "très inquiétantes" les récentes déclarations de la ministre de la Culture. Lors d'une audition à l'Assemblée nationale le 19 mars (lire notre article), Rachida Dati avait fustigé la "jungle" des formations et envisagé la fermeture de certaines écoles, avant de nuancer ses déclarations. "On est très attentifs à cette question et on ne s'en sortira qu'avec un dialogue entre les collectivités et l'État. On ne pourra pas se payer de mots", avance Frédéric Hocquard. Pour lui, une des raisons des difficultés actuelles tient dans la transformation à marche forcée des écoles d'art en EPCC (établissements culturels de coopération culturelle) à la demande de l'État il y a une quinzaine d'années. "Or la base de l'EPCC, c'est la coopération", plaide l'élu, avant d'ajouter : "Si on peut revenir là-dessus, si certaines souhaitent avoir des formes différentes, pourquoi pas ?"

Après avoir rappelé que la co-intervention de l'État et des collectivités en faveur de la culture s'élevait à environ 15 milliards d'euros par an, le président de la FNCC estime cependant que dans ce domaine, "la coopération et la coconstruction est en retard par rapport à d'autres politiques publiques". Frédéric Hocquard reconnaît toutefois des réussites, à l'image des conseils locaux des territoires pour la culture (CLTC) ou des comités régionaux des professions du spectacle (Coreps). Et de conclure : "Nous voulons faire un congrès des solutions, un congrès durant lequel on explique, sur les sujets de culture, comment les collectivités territoriales qui y sont confrontées, innovent, inventent des solutions, trouvent des réponses."