Formation professionnelle - Dans son livre blanc, l'Afpa propose de créer un statut de l'actif
L'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa) a présenté le 15 décembre 2011 son livre blanc sur la formation à l'occasion d'un colloque organisé au Conseil économique social et environnemental (Cese). "Pas un rapport, ni un diagnostic, ce livre blanc intitulé "Quelle formation demain ?", appelle à une triple révolution économique, pédagogique et culturelle", précise l'association, dans un communiqué.
Le document est nourri de nombreux témoignages et interviews de stagiaires, salariés, demandeurs d'emploi, mais aussi issus des régions, par le biais des conseils économiques sociaux et environnementaux régionaux (Ceser) et des entreprises. L'objectif est de dépasser l'approche institutionnelle axée sur les questions de gouvernance et des circuits de financements (thématiques largement abordées par ailleurs, comme dans le dernier avis du Cese sur la formation professionnelle), "en s'appuyant sur des champs disciplinaires multiples comme l'économie, la pédagogie, les sciences cognitives, afin de développer une réflexion prospective sur la formation à l'horizon 2030", explique Jean-Luc Vergne, président de l'Afpa, en introduction. Neuf propositions pour la formation de demain sont avancées par Marc Ferracci, maître de conférences à l'université de Paris et chercheur au Crest, à qui l'Afpa a demandé d'intervenir. Des propositions parmi lesquelles : la création d'un "statut de l'actif" qui garantirait un droit à la formation indépendant de la situation de l'individu et fondé sur des critères objectifs permettant d'accroître l'équité du système (le niveau de formation initiale ou l'âge, par exemple).
Part variable dans la rémunération des prestataires
"A l'heure actuelle, le système incite à des formations utiles aux entreprises, mais répond mal à la démarche de mobilité volontaire des individus, explique ainsi le rapport, l'enjeu essentiel est donc de substituer à la logique de statuts qui prévaut aujourd'hui une logique de parcours. L'idée de replacer l'individu au centre du système prend un sens précis : il s'agirait de favoriser la liberté et la responsabilité des travailleurs vis-à-vis de leur propre parcours professionnel."
Autre proposition de Marc Ferracci : "Engager la réflexion sur le lien entre impact des formations et rémunération des prestataires." La proposition reviendrait à prévoir le principe d'une part variable dans la rémunération des opérateurs de formation. Une part déterminée avec les acheteurs de la formation, sur la base de critères différents selon les publics. "La formation réussie de publics en difficulté devrait ainsi donner lieu à une rémunération majorée, car leur insertion présente une valeur sociale importante", précise le livre blanc. Marc Ferracci propose de s'inspirer des mécanismes mis en place dans le cadre de l'externalisation par Pôle emploi des actions de reclassement des chômeurs : une part fixe, versée lors de la prise en charge du demandeur d'emploi, une première part variable, versée en cas de retour à l'emploi, et une seconde part variable, versée si l'individu se trouve toujours en emploi au bout d'une période déterminée (six mois ou un an).
Le livre blanc propose aussi que les opérateurs de formation financent des dispositifs de suivi et d'enquête sur le devenir de leurs bénéficiaires. Il avance l'idée de mettre en place un droit universel à la formation professionnelle, inversement proportionnel au niveau de formation initiale.
Doublons
Parmi les autres propositions : améliorer la certification des formations et des prestataires, harmoniser les outils d'analyse sur les métiers et l'offre de formation, et rendre l'information accessible aux salariés et aux demandeurs d'emploi, et articuler de façon plus étroite les démarches de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC) et de formation.
Le livre blanc laisse aussi une large part aux régions, à travers la contribution des Ceser et celle d'Alain Rousset, président de l'Association des régions de France (ARF). Les Ceser recommandent de changer le regard sur la formation en passant d'une logique de développement et d'épanouissement personnel plutôt que d'adaptation, et d'engager une démarche collective à tous les niveaux (entre le monde pédagogique et professionnel, entre les différentes instances administratives territoriales, entre le niveau national et régional, entre les structures de formation). De son côté, Alain Rousset insiste sur la place particulière que doivent avoir les régions dans ce domaine et sur la nécessité d'avoir un pilote capable de répondre aux besoins. "Avec leur double compétence, développement économique et formation professionnelle, les régions sont les mieux à même de réaliser, dans la proximité, la bonne adéquation entre les besoins des entreprises et l'organisation de l'offre de formation, plaide une nouvelle fois Alain Rousset, pour orchestrer ce lien entre les acteurs, cette cohérence du marché, la mobilité des publics, une nouvelle gouvernance régionale reste à construire." Le président de l'ARF estime qu'il y a trop de doublons sur les territoires et dans les services, "on frise le n'importe quoi", insiste-t-il.