Des communes de la Loire changent de fournisseur d'électricité, et c'est moins cher !!

Le Syndicat intercommunal d'énergies de la Loire (Siel) n'aura pas attendu pour profiter de la libéralisation du marché de l'énergie. C'est un concurrent d'EDF qui a remporté l'appel d'offres pour une partie de l'éclairage public. Avec des prix inférieurs au tarif réglementé.

Depuis le 1er juillet, les réverbères des communes du nord du département de la Loire sont alimentés par du courant fourni par la Compagnie nationale du Rhône (CNR). Pour être prêt à cette date, le Siel (Syndicat intercommunal d'énergies de la Loire), à qui 200 communes du département ont transféré la compétence de l'éclairage public, a travaillé sur ce dossier depuis janvier 2003. Il a lancé un appel d'offres en janvier 2004 et en a informé par courrier l'ensemble des fournisseurs recensés par la Commission de régulation de l'énergie. Cinq ont demandé le dossier de consultation et quatre ont remis une offre début mai : EDF, CNR, Poweo, Gaz Electricité de Grenoble.
Pour faire davantage jouer la concurrence, le marché (environ 1 million d'euros) avait été divisé en trois lots : un premier pour l'éclairage public du sud du département (10 GWh/an), un second pour le nord (8 GWh/an) et un troisième, plus marginal, pour la consommation du bâtiment du Siel. C'est la CNR qui a remporté le second lot, avec un système de contrat unique (fourniture et acheminement) et EDF le premier lot avec un contrat Card (contrat d'accès aux réseaux de distribution) distinct du contrat de fourniture. Mais il s'est révélé qu'il n'était pas encore possible de signer un contrat Card pour les compteurs inférieurs à 36 kVA non télérelevés. Ce marché a donc été déclaré infructueux et le Siel a lancé une nouvelle consultation sur l'option avec contrat unique, dans le cadre d'un marché négocié.

Prix fermes non révisables sur quatre ans

La concurrence a t-elle finalement joué sur les prix proposés ? "En fait, il y avait très peu d'écarts entre les offres concurrentes sur les prix HT mais les écarts se creusaient sur les prix TTC en fonction des différents régimes de TVA applicables selon les contrats", explique Daniel Belon, le directeur du Siel. Or, pour les collectivités locales qui ne se font pas rembourser la TVA, il est impératif de raisonner en TTC. Les écarts de prix étaient par contre beaucoup plus forts concernant la fourniture d'électricité verte. La CNR, qui a été retenue pour le lot 1, proposait pour sa part 25% d'énergie verte sans surcoût.
Pour se préserver des hausses des prix annoncées, le Siel a fixé la durée du contrat à deux ans, renouvelable une fois, "à prix ferme sans actualisation ni révision". Plus encore : le Siel garde la possibilité de ne pas renouveler le contrat dans deux ans si les prix, issus du lancement d'une nouvelle consultation, sont plus avantageux. "Malgré ces clauses contraignantes, nous avons quand même eu des prix inférieurs au tarif réglementé, avec une garantie de durée", se félicite Daniel Belon. Selon lui, le problème majeur pour les fournisseurs n'est pas tant de garantir des prix fermes sur quatre ans que la durée de validité de leur tarif entre le moment où ils remettent leur offre et le moment où le marché est notifié. C'est pourquoi le Siel a réduit ce délai de 90 jours dans la procédure classique d'appel d'offres à 60 jours.

Pour un groupement constitué de 150 communes et du CG

Prochaine étape : la constitution d'un groupement de commandes d'ici fin 2004-début 2005 pour la consommation d'électricité des bâtiments communaux. 150 communes et le conseil général de la Loire participent pour l'instant au groupe de travail. "L'intérêt est de mutualiser l'expertise sur l'analyse des consommations et de faire jouer la solidarité intercommunale avec la péréquation des prix", explique le directeur du Siel. L'amendement (article 28A) récemment adopté par les députés dans le projet de loi de changement du statut d'EDF-GDF, qui n'oblige plus les collectivités à faire jouer leur éligibilité au 1er juillet 2004, risque de changer la donne. "Les petites communes ne vont plus forcément être intéressées pour adhérer au groupement de commandes si elles ont la possibilité de rester au tarif réglementé."
Avec toujours une longueur d'avance, le Siel réfléchit aussi déjà à l'ouverture totale du marché de l'énergie à la concurrence prévue en 2007. "Nous militons pour un service public de fourniture pour les petits consommateurs [inférieur à 36 kVA]: particuliers, PME, artisans, commerçants." Cela pourrait se traduire par un appel d'offres organisé par une collectivité à l'échelle départementale pour choisir un fournisseur de référence. En cas de suppression du tarif réglementé, les petits consommateurs auraient ainsi la possibilité d'avoir une garantie de prix et de services auprès de ce fournisseur.


Emmanuelle Yohana / EVS pour Localtis

 

Lorient : "Une bonne gestion des consommations d'électricité permet d'obtenir de meilleurs tarifs"


 

La ville de Lorient (Morbihan) doit notifier début juillet son marché pour la fourniture en gaz et électricité, suite à l'appel d'offres lancé en avril. Une mise en concurrence qui a paru "logique" à cette collectivité impliquée de longue date dans une politique d'économies d'énergie.

 

A l'heure où le marché français de l'énergie s'ouvre à la concurrence pour les clients professionnels, peu de collectivités se sont véritablement préparées à cette échéance. Qu'est-ce qui a motivé la ville de Lorient à lancer un appel d'offres dès la fin mars ?

Jean-Pierre Aucher, adjoint au maire en charge de l'environnement : La ville a depuis longtemps une expérience grâce à sa cellule énergie-environnement. Elle dispose ainsi d'une connaissance pointue des consommations de son patrimoine, des points de comptage, des points de livraison et assure un suivi des factures. Elle travaille aussi sur les économies d'énergie depuis 20 ans (lampes basse consommation, réseau de chaleur, passage d'une chaufferie fioul à une chaufferie bois, d'une cuisson électrique à une cuisson gaz pour la restauration scolaire, mise en commun des transformateurs, plancher solaire...). Il nous a donc paru logique de nous engager rapidement dans cette démarche de mise en concurrence. De plus, sachant que les tarifs de l'électricité vont certainement augmenter dans les mois à venir, on avait intérêt à lancer au plus tôt un appel d'offres pour bénéficier des prix du marché avant cette hausse attendue, avec une clause de prix fermes garantis sur quatre ans.

La ville de Lorient a rédigé elle-même le cahier des charges pour son appel d'offres. Quels sont les éléments les plus importants à prendre en compte ?

Paul Cornic, responsable de la cellule énergie-environnement : Il faut simplement bien savoir ce que l'on veut ! C'est-à-dire déjà bien connaître ses consommations (nombre de points de livraison et puissance de chaque point, nature des consommations...) pour pouvoir recenser ses besoins et estimer leurs évolutions. Cela n'a pas présenté de difficultés majeures pour la ville de Lorient qui centralise déjà depuis longtemps ses besoins énergétiques et qui dispose de compteurs à courbes de charge pour l'électricité comme pour le gaz permettant de suivre l'évolution des consommations toutes les 10 minutes.

Qu'attendez-vous de la libéralisation des marchés de l'électricité et du gaz pour une collectivité comme Lorient ?

J-P. Aucher : Déjà, comme je l'ai dit, une certaine garantie sur des prix non révisables à l'horizon de quatre ans pour l'électricité et deux ans pour le gaz. La ville continuera également à travailler sur les économies d'énergie grâce auxquelles elle observe depuis 1990 une stabilité de ses consommations d'électricité des bâtiments. Cet appel d'offres a été aussi l'occasion de formaliser notre volonté politique de recourir aux "énergies vertes" pour 21% de la fourniture d'électricité sans que cette clause environnementale se traduise par une augmentation des tarifs de l'électricité (les offres devaient également chiffrer l'option 100% énergie verte). Le cahier des charges incluait également des services annexes : conseils en matière de maîtrise de l'énergie, contribution au développement des hautes performances énergétiques, étiquette énergie pour la consommation des bâtiments, et un volet social dans le cadre d'une politique publique ciblée sur les impayés.

Cette mise en concurrence a-t-elle permis d'obtenir de tarifs plus avantageux que ceux de vos contrats précédents ?

P. Cornic : Ce n'est pas la libéralisation du marché de l'énergie qui va permettre d'avoir des meilleurs tarifs mais c'est une bonne gestion des consommations d'électricité et de gaz, avec une visibilité claire sur le volume et la répartition dans le temps des consommations. D'autant plus que les collectivités sont des clients pérennes, qui payent leur facture régulièrement et qui ont une consommation électrique non négligeable. A Lorient, cela fait longtemps que les élus ont engagé les services municipaux dans une pratique de bonne gestion énergétique, dans le cadre d'une politique de développement durable. Ce qui se traduit par des dépenses énergétiques limitées à 1,2 million d'euros sur un budget global de 98 millions d'euros.

Pourquoi ne pas avoir constitué un groupement de commandes, notamment avec la communauté d'agglomération, comme l'envisagent aujourd'hui beaucoup de collectivités locales ?

J-P. Aucher : Un groupement de commandes n'aurait pas forcément permis à la ville de bénéficier de tarifs plus avantageux. Notamment parce qu'il n'est pas sûr qu'on arrive à une meilleure définition des besoins à cette échelle de l'agglomération. Le groupement de commandes peut certes faciliter le travail des petites communes qui ne disposent pas de l'expertise nécessaire pour appréhender ce nouveau marché, mais ce n'était pas le cas pour Lorient. Nous avons juste procédé, dans un souci de solidarité, à un regroupement des achats de fourniture d'énergie de la ville (11 GWh) et du Ccas (1/2 GWh).
 
 


 Achat d'électricité : dans quel cas et comment choisir son assistant à maîtrise d'ouvrage ?


Les collectivités, qui n'ont pas forcément l'expertise en interne pour recenser leurs besoins et organiser une consultation pour les nouveaux marchés de l'énergie, ont intérêt à s'entourer des conseils d'un AMO (assistant à maîtrise d'ouvrage)*. Récapitulatif des bonnes questions à se poser.

Pourquoi et dans quel cas recourir à un AMO  ?

- s'interroger sur le niveau de compétence en interne : existe t-il un service en charge de l'énergie ? existe t-il déjà un suivi énergétique des consommations ? quels sont les moyens humains disponibles (techniques et administratifs) ? est-il pertinent d'embaucher ?
- quelle est la volonté d'implication des élus sur le sujet ?
- existe-t-il, à un autre niveau, une compétence suffisante ou les moyens de l'acquérir (intercommunalité, groupement de commandes) ?
- quel peut être le rôle d'une agence locale de l'énergie ?
- le coût de l'AMO sera-t-il rentabilisé ?
- la mission de l'AMO peut-elle être subventionnée ? (par exemple par l'Ademe s'il y a un volet maîtrise des dépenses d'énergie ou une part d'énergies renouvelables)

Qui sont les AMO ?

Plus d'une cinquantaine de bureaux d'études recensés par la Commission de régulation de l'énergie (CRE), auxquels se rajoutent des cabinets d'avocats. Il s'agit soit de bureaux d'études expérimentés dans l'achat d'électricité mais avec une faible connaissance du secteur des collectivités locales, soit de bureaux d'études ayant une expérience des collectivités mais pas de l'achat de fourniture d'énergie. On trouve également de nombreux nouveaux venus sans beaucoup de références.
Ces bureaux d'études proposent deux types d'offre : à l'intéressement  (rémunéré sur les économies réalisées), ou plus généralement au forfait (rémunéré au nombre de jour d'ingénieur).

Que faut-il mettre dans le CCTP  (cahier des clauses techniques particulières) d'AMO ?

- Présentation du contexte général de la démarche de la collectivité
- Mission 1 (optionnelle) : étude générale de la problématique
- Mission 2 : recensement et évaluation des consommations et organisation des informations
- Mission 3 (optionnelle) : pré-diagnostic d'utilisation rationnelle de l'énergie et aide à la décision
- Mission 4 : organisation de la consultation
- Mission 5 : élaboration du dossier de consultation
- Mission 6 (conditionnelle) : analyse des offres
- Mission 7 (conditionnelle) : mise au point définitive des marchés
- Mission 8 (conditionnelle et optionnelle) : mise en place et optimisation des contrats d'accès aux réseaux de distribution
- Mission 9 (conditionnelle et optionnelle) : suivi de l'application du marché et/ou transfert de compétence vers la collectivité pour les prochains appels d'offres 
* L'association Amorce, en lien avec l'Association des ingénieurs territoriaux, a rédigé à l'attention des collectivités locales un modèle de cahier des charges techniques d'assistance à maîtrise d'ouvrage (AMO) pour la fourniture d'électricité.

Association Amorce

10 quai Sarrail
69006 LYON
amorce@amorce.asso.fr

Daniel Belon

Directeur du Syndicat intercommunal d'énergies de la Loire (Siel)

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