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Réforme des institutions - Différenciation locale, cumul des mandats dans le temps, procédure parlementaire...

Après des semaines de consultations et tractations, la réforme des institutions, évoquée par Emmanuel Macron en juillet dernier devant le Parlement réuni en Congrès à Versailles, a été partiellement dévoilée ce mercredi 4 avril.
Edouard Philippe est intervenu sur le sujet ce mercredi 4 avril en conseil des ministres puis en a présenté "les grandes lignes" à la presse en fin de journée. La réforme sera bien constituée de trois textes : un projet de loi constitutionnelle, un projet de loi organique et un projet de loi ordinaire. Le premier sera déposé au Conseil d'Etat dès ce 5 avril, les deux autres le seront "la semaine prochaine" et l'ensemble sera présenté en conseil des ministres le 9 mai.
La suite du calendrier est déjà tracée : une première lecture de ces textes à l'Assemblée "avant la pause estivale", pour "parachever cette réforme en 2019". Initialement, le chef de l'Etat avait fixé comme terme l'été 2018.

"Adapter les règles"

S’agissant du projet de loi constitutionnelle, les collectivités retiendront avant tout que la réforme inclura bien des dispositions relatives au droit à la "différenciation" plusieurs fois évoqué par l'exécutif. Edouard Philippe a parlé mercredi de "confiance dans la capacité des collectivités locales de métropole et d’outre-mer d’adapter elles-mêmes les règles qui régissent leurs domaines de compétence à la réalité de leur territoire", de "pacte girondin" proposé aux territoires, sur la base des recommandations du Conseil d’Etat (lire notre article). Il a, parallèlement, confirmé que "la Corse trouvera sa place dans notre Constitution, ce qui permettra d’adapter les lois de la République aux spécificités insulaires, mais sous le contrôle du Parlement".
Sur le terrain parlementaire, le gouvernement a finalement renoncé à "contingenter" le nombre d'amendements pouvant être déposés. Il est toutefois prévu de "limiter les amendements sans portée normative, sans lien direct avec le texte ou qui ne seraient pas du domaine de la loi". En outre, a indiqué le Premier ministre, "sans revenir sur la réforme de 2008, qui a défini un équilibre entre une semaine de contrôle, une semaine d’initiative législative parlementaire et deux semaines d’initiative législative gouvernementale, les projets de texte les plus importants ou urgents pourront bénéficier d’une inscription prioritaire à l’ordre du jour".
Autres dispositions prévues : "la procédure sera accélérée après la commission mixte paritaire", "la discussion en séance pourra être focalisée sur les points principaux, grâce à un meilleur travail en commission", "l’évaluation des lois sera plus systématique" avec possibilité de "corrections ou simplifications" des lois évaluées. Enfin, le vote des projets de lois de finances devra intervenir en 50 jours, contre 70 jours actuellement. Avec un temps dédié "chaque printemps à l’évaluation des politiques publiques et au contrôle de l’exécution du budget par les ministres".
Autre confirmation : le Conseil économique social et environnemental (Cese) fera l'objet d'une "transformation profonde" afin de devenir une "chambre de la société civile chargée d’organiser les consultations des citoyens et des experts"… avec, au passage, le nombre de membres divisé par deux.
On saura enfin que "l’impératif de lutte contre le changement climatique" sera inscrit à l’article 34 de la Constitution, qui définit le domaine de la loi, et que le Conseil d'Etat sera consulté pour savoir si le projet de service national universel nécessite ou pas un "fondement constitutionnel".

Du côté des projets de loi organique et ordinaire, c'est cette fois la question du cumul des mandats dans le temps qui retiendra prioritairement l'attention des collectivités. L'exécutif a opté pour "l'interdiction du cumul des mandats dans le temps, au-delà de trois mandats identiques, complets et consécutifs, pour les parlementaires et les présidents d'exécutifs locaux" (conseils régionaux, départementaux, municipaux), "à l'exception des maires des communes de moins de 9.000 habitants". Au début des discussions avec les responsables politiques, l'exécutif avait prévu une exception pour les "petits" maires, ceux des communes de moins de 3.500 habitants, ce qui représentait déjà près de 90% des quelque 36.000 maires de France. Ce seuil a donc été sensiblement relevé, notamment à la demande du Sénat. Reste une question importante : la mesure s'appliquera-t-elle aux mandats en cours ? Une application rétroactive risque d'être anticonstitutionnelle. Mais si elle ne s'applique qu'à partir des prochaines élections, elle n'entrera de fait en vigueur que dans 15 ou 20 ans, ce qui en réduira fortement la portée réelle. Cette question a été renvoyée "au débat parlementaire", a indiqué une source gouvernementale.
S'agissant des parlementaires, le chef du gouvernement a confirmé la volonté de réduire de 30% le nombre de députés et de sénateurs, "dans des conditions qui garantissent la représentation de tous les départements et territoires", ainsi que "l’introduction d’une dose de représentation proportionnelle aux élections législatives pour 15% des sièges de députés à pourvoir".