Archives

Habitat - Droit au logement opposable : un projet de loi en préparation

Le jour même où lui était remis le rapport de Xavier Emmanuelli relatif à "l'expérimentation locale du droit au logement opposable", le gouvernement a annoncé qu'un projet de loi sur ce droit opposable sera présenté le 17 janvier.

Dominique de Villepin a annoncé ce 3 janvier que le gouvernement présenterait le 17 janvier en Conseil des ministres un projet de loi sur le droit au logement opposable. Le texte, qui pourrait par ailleurs intégrer diverses mesures d'ordre social, devrait être présenté au Parlement dans la foulée de son passage en Conseil des ministres, la session parlementaire s'achevant le 22 février. Si le respect de ce droit sera garanti par l'Etat, ce dernier "pourra naturellement déléguer la mise en oeuvre de ce droit aux collectivités territoriales qui le souhaitent dès le vote du texte", a indiqué à la presse le Premier ministre à l'issue de la remise du rapport sur le sujet de Xavier Emmanuelli, le président du Haut Comité pour le logement des personnes défavorisées (HCLPD).
La mise en oeuvre de ce texte se fera en deux étapes. "Dès la fin de l'année 2008", il concernera "les personnes qui sont dans les situations les plus difficiles, notamment les sans-domicile-fixe, mais aussi les travailleurs pauvres et les femmes isolées avec enfants". Cette échéance doit permettre "d'assurer que toutes les personnes concernées bénéficieront bien d'un logement digne, qu'il s'agisse d'une place en maison de relais ou d'un logement autonome". Ensuite, à partir du 1er janvier 2012, "toutes les personnes ou toutes les familles logées dans des habitations insalubres ou indignes" pourront faire valoir leur droit opposable, afin "de garantir à chacun dans notre pays un logement décent", a déclaré le chef du gouvernement.

Une commission de conciliation

"C'est un principe qui placera le droit au logement au même rang que le droit aux soins ou à l'éducation et fera de la France l'un des pays les plus avancés en matière de droits sociaux", a-t-il insisté, en dénonçant "la réalité inacceptable" que vivent "quotidiennement les sans-abri comme les mal-logés". La politique en faveur du logement, a-t-il poursuivi, ne portera ses fruits "qu'à deux conditions", à savoir "un principe de bonne gestion" des moyens engagés et la lutte contre les abus en matière d'accès au logement social, sur lesquels le Premier ministre a réclamé une mission d'étude.
Affirmant que cette "accélération" du calendrier n'était pas motivée par des raisons électorales, il a reconnu que l'action des associations, notamment Les Enfants de Don Quichotte qui ont installé des campements de tentes pour SDF dans plusieurs villes, avait été "un élément accélérateur". A ses côtés, le ministre de la Cohésion sociale a pour sa part souligné que l'objectif n'était "pas de créer à terme des contentieux" mais de "faire bouger toute la République". Jean-Louis Borloo a précisé que les recours se feraient devant une commission de conciliation chargée de constater "un délai anormalement long pour avoir un logement décent" et que, dans ce cas, "c'est le juge administratif qui statue en référé de façon à ce que la procédure soit courte".

Questions de calendrier

Tandis que le Premier ministre a demandé mercredi au Haut Comité de rendre un avis sur le projet de loi "dans les huit jours", il est pour l'heure difficile d'établir dans quelle mesure le texte sera calé sur les préconisations du rapport remis le même jour par Xavier Emmanuelli, "L'expérimentation locale du droit au logement opposable". Il peut même sembler étonnant qu'un projet de loi à vocation générale soit élaboré avant même que cette expérimentation, qui avait été souhaitée par le gouvernement en mai dernier, n'ait été mise en oeuvre. A moins que le futur texte ne se contente de donner un cadre à ces expérimentations ?
En tout cas, le rapport du HCLPD, qui évalue à trois millions le nombre de personnes concernées, préconise un calendrier s'étalant jusqu'en mars 2014. En commençant, d'ici fin 2007, par la mise en place d'"outils de gouvernance", par une identification des besoins et, précisément, par l'élaboration d'une loi fixant le calendrier de l'opposabilité et autorisant l'expérimentation locale. Avant fin 2008, le HCLPD souhaite l'adoption d'une loi de programmation fixant les engagements financiers de l'Etat et la mise en oeuvre d'une "obligation d'hébergement digne en faveur de toute personne en situation d'urgence". Le service chargé de recevoir et d'instruire les demandes serait créé d'ici fin 2009. Enfin, le droit au logement serait véritablement opposable à partir de mai 2012 pour les familles avec enfants et le serait "pour tous" en mars 2014.

EPCI ou département

"La voie de l'expérimentation locale (...) présente l'avantage de permettre la prise en compte de la diversité territoriale en laissant ouvertes plusieurs options", souligne le Haut Comité, qui propose que la responsabilité de première ligne soit assumée, hors Ile-de-France, soit par les EPCI lorsque ceux-ci exercent la compétence habitat, soit par les départements. Une fois désignée, "l'autorité responsable de première ligne" serait chargée d'"associer l'ensemble des collectivités publiques, ainsi que les différents acteurs concernés". Les documents de programmation (programmes locaux de l'habitat, plans départementaux de l'habitat, plan départemental d'action pour le logement des personnes défavorisées, schéma de l'accueil, de l'hébergement et de l'insertion) constitueraient alors "le cadre de référence fixant les obligations des autorités de seconde ligne". En cas d'échec du partenariat, "l'autorité responsable de première ligne pourra faire appel à l'intervention de l'Etat, charge à celui-ci d'utiliser les prérogatives d'autorité qu'il détient", indique le rapport.
Parmi les premiers acteurs à réagir aux annonces du Premier ministre, le maire de Toulouse, Jean-Luc Moudenc, a souhaité mercredi que l'Etat "donne des moyens" pour mettre en place le droit au logement opposable. "Veillons à ce que les responsabilités soient établies et que l'effort soit l'effort de tous. Voila ce que je demande à l'Etat", a déclaré l'élu avant de s'interroger :  "Le droit opposable, oui, mais opposable à qui ? Opposable à l'Etat, aux communes, aux départements, aux sociétés HLM ? Qu'on définisse tout ça, et qu'on ne se contente pas de cette formule magique, qu'on mette en place un contenu réaliste."

 

C.M., avec AFP

 

Pour aller plus loin

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis