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Aménagement numérique - Du super wifi en Seine-Maritime, pour tester le haut débit dans les zones difficiles d'accès

Le département de la Seine-Maritime accueillera la première expérience d'utilisation du "super wifi" sur plusieurs zones rurales difficiles d'accès, situés en zones blanches. L'Autorité des télécoms (Arcep) vient d'autoriser la société Infosat à réaliser des tests techniques de desserte en haut débit sans fil, principalement sur la couverture et les débits, pendant une période de douze mois.
La technologie sans fil du super wifi utilise les fréquences laissées vacantes entre les couches de radiodiffusion dénommées "espaces blancs" (à ne pas confondre "avec zones blanches"). Ces fréquences disponibles diffèrent d'une zone géographique à l'autre en fonction du plan de fréquence utilisé par les services de radiodiffusion (1). "Elles sont utilisées par les microphones sans fil qui bénéficient d'une autorisation générale" - autrement dit, d'une liberté d'usage sous réserve de respecter certaines conditions techniques -, indique l'Arcep dans un communiqué. Dans le cas présent, Infosat devra éviter toute interférence avec les services des autres utilisateurs des fréquences.
Infosat prévoit d'utiliser la technologie mise au point par l'américain Carlson Wireless sur des plaques d'une quinzaine de kilomètres et pour des débits de 30 Mbps (2). L'intérêt de cette technologie est triple :
- la bande de fréquence utilisée est nettement moins sensible à la végétation et traverse les murs, ce qui lui donne aujourd'hui un avantage sur toutes les autres technologies (Wimax, AirMax, etc.) dans les zones enclavées et à fort relief (montagne) ;
- son rayon d'action la rend également attractive pour connecter les entreprises qui, à l'extérieur des villes, ne bénéficient pas d'une qualité de service suffisante en ADSL ; 
- en dépassant le seuil de performance des 10Mbps qui handicapait le Wimax (3 à 5 Mbps), cette technologie permet d'envisager des modèles économiques plus solides autorisant le triple play pour les particuliers et l'accès à l'informatique dans les nuages pour les entreprises.

Une solution économique qui pourrait, potentiellement, remplacer le satellite

"Nous considérons le super wifi comme une solution de remplacement du satellite. Elle est beaucoup plus économique tout en présentant de faibles temps de latence", précise François Hédin, le PDG d'Infosat. Titulaire de plusieurs DSP rachetées notamment en Seine-Maritime et dans les Ardennes, cette société, qui développait des réseaux wifi dans les zones blanches ADSL, bascule désormais ses réseaux vers l'infrastructure Airmax avec des offres se situant entre 10 et 20 Mbps symétriques. Seule limitation de cette nouvelle technologie Airmax : la propagation des transmissions est sujette aux obstacles du relief et de la végétation, ce qui la rend plutôt utilisable en plaine ou à proximité des utilisateurs (3).
Avec le super wifi, François Hédin veut s'assurer d'un "mix technologique" permettant de compléter ses capacités de couverture, afin d'équiper toutes les configurations de zones blanches, que celles-ci soient situées à la périphérie des villes, en zone rurale classique ou en zone plus difficile d'accès (montagne, zones en mer, le long des côtes). Les deux solutions proposées offrent en outre des conditions de déploiement intéressantes nettement plus économiques que le Wimax puisque la station de base super wifi reviendrait à 10.000 euros, contre 40 à 50.000 pour le Wimax. L'Airmax offre lui des conditions financières de déploiement encore plus attractives, avec un coût moyen de 2.500 euros par station.
Rien n'est encore réglé. Les tests en vraie grandeur doivent en effet valider les performances de la technologie (4). Contrairement à ce que peut laisser penser son nom, super wifi n'est absolument pas compatible avec le wifi classique, ce qui suppose la mise en place chez l'utilisateur d'installations de réception spécifiques (situation identique pour l'Airmax). L'expérimentation va permettre aussi de vérifier que la technologie ne crée pas d'interférences avec les autres fréquences.
Au même titre qu'Airmax, la technologie du super wifi intéresse les réseaux d'initiative publique (RIP) qui souhaitent sortir de l'impasse du Wimax. Sans oublier les zones les plus fortement pénalisées en termes de débit, qui peuvent aussi espérer de nouvelles solutions rapides à mettre en oeuvre, du moins si la série de tests se révèle concluante et après la mise en place d'une réglementation adéquate, ce qui est une autre affaire...

Philippe Parmantier / EVS

(1) Il s'agit pour l'instant d'une bande de 8 MHz sur la bande UHF (470-790 MHz). Certaines régions "favorisées" pourraient bénéficier de deux ou trois bandes résiduelles du même type, ce qui permettrait par multiplexage d'obtenir 30 à 45 Mbps symétriques au lieu des 15 prévus dans l'expérimentation.

(2) Le super wifi est une technologie développée par quelques sociétés américaines, dont la société Carlson Wireless Technologies, qui semble aujourd'hui être la plus avancée. Quelques pays dans le monde expérimentent cette technologie. Les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, Singapour, le Kenya, le Brésil, le Japon l'Uruguay et la Corée du Sud.

(3) Infosat va lancer avec Somme Numérique une expérience d'utilisation d'Airmax dans cinq villages situés à proximité du réseau de collecte fibre optique de l'opérateur. Le mât pour la diffusion sera directement connecté à la fibre et pourra délivrer du triple play aux abonnés de ces villages (50 mbps symétriques).

(4) En Seine-Maritime, le site pilote est celui de TDF Croixdalle (Neufchâtel-en-Bray). L'objectif est d'installer une station de base super wifi pour desservir 10 sites clients pilotes situés dans un rayon de 10 km. Par ailleurs, des tests de programmation seront effectués sur d'autres pylônes sur des distances de 20 à 30 km cette fois, pour vérifier la propagation du signal et les interférences possibles avec d'autres sites de la télévision numérique terrestre.

 

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