Emploi public : les discriminations à l'embauche touchent toujours les candidats issus de l'immigration

L'édition 2022 du rapport annuel sur l'état de la fonction publique, qui vient d'être mise en ligne, met en évidence la persistance dans la fonction publique de discriminations à l'embauche liées à l'origine des candidats.

Le ministère de la Transformation et de la Fonction publiques a publié ce 8 novembre l'édition 2022 du rapport annuel sur l'état de la fonction publique. Un document qui, comme l'habitude en est désormais prise, revient sur les politiques menées dans le champ des ressources humaines du secteur public (dans les faits, essentiellement l'État) au cours de l'année qui s'est écoulée. Ce rapport réunit surtout une somme impressionnante de données sur l'ensemble de la fonction publique, et ce tout autant sur les questions de l'emploi, des mobilités, de la rémunération, de la formation ou encore des conditions de travail.

L'édition 2022 inclut également trois dossiers sur les écarts de rémunération entre les femmes et les hommes fonctionnaires dans la fonction publique de l'État en 2021, la réussite au concours externe des instituts régionaux d'administration (IRA) et, enfin, les discriminations dans l'accès à l'entretien à l'embauche dans la fonction publique. Seul ce dernier concerne la fonction publique territoriale.

Issus d'une enquête menée notamment par Yannick L'Horty, professeur des universités, ses résultats révèlent que les discriminations à l'embauche liées à l'origine des candidats persistaient en 2021 dans la fonction publique territoriale – comme dans la fonction publique hospitalière et le secteur privé. Avec son équipe, l'expert des questions d'emploi a réalisé une opération de "testing" sur 2.594 offres d'emplois de cadre administratif et d'aide-soignante publiées en Île-de-France – dont 860 qui l'ont été par des employeurs publics – sur la période 2015-2021. Pour chacune de ces offres d'emplois, trois CV fictifs et quasi-similaires ont été envoyés. Les candidats se distinguaient uniquement par leur origine ou par leur lieu de résidence.

"Emplois francs" : un coup de pouce réservé au secteur privé

Le premier portait un nom dont la consonance du prénom et du nom suggère qu’il n’est pas issu de l’immigration et il résidait dans un quartier de réputation neutre. Le second avait, quant à lui, un prénom et un nom à consonance maghrébine et résidait dans un quartier de réputation neutre. Enfin, le troisième candidat portait un prénom et un nom à consonance française et résidait dans un quartier prioritaire de la politique de la ville (QPV).

Les chercheurs concluent à la persistance, en 2021, de discriminations pour "les candidatures avec un prénom et un nom à consonance maghrébine", et ce "dans le public comme dans le privé." Ces candidats "ont moins de chances d’avoir une réponse positive à leur candidature." L'étude montre par ailleurs que, dans la fonction publique, les discriminations dont sont victimes les habitants des QPV sont "moins importantes que celles mesurées selon l’origine."

Une autre conclusion présente un intérêt certain : les candidatures provenant d’un QPV sont désormais mieux accueillies par les employeurs privés que les autres candidatures. Cette évolution favorable est liée à la montée en puissance des emplois francs. Le dispositif octroie une subvention aux employeurs qui recrutent un demandeur d’emploi habitant dans un quartier prioritaire. Or, le même effet n'est pas observé dans le secteur public pour les tests menés en 2019 et 2020. Des discriminations liées à l'adresse continuent à être observées dans le public au titre de ces deux années. Selon les chercheurs, l'explication est évidente : "Les recruteurs publics ne bénéficient pas du dispositif des emplois francs."

 

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