Entre prévention des risques et patrimoine, le rôle du service municipal "Recherche des carrières" de Laon

Le service municipal original "recherche des carrières" de Laon s'inscrit aujourd'hui dans un plan de prévention des risques. Son rôle consiste à surveiller, cartographier, conseiller sur l'entretien des réseaux souterrains, établir des recommandations pour des travaux de soutien, de construction et de rénovation, définir les niveaux de périls, prévenir les risques.

Comptant plus de quatre-vingts monuments historiques inscrits ou classés, Laon (Aisne) possède le secteur sauvegardé le plus étendu de l'Hexagone. Mais cet important patrimoine est en péril car, comme l'explique Emile Vitrant, maire adjoint chargé de l'urbanisme, de la voirie et de l'habitat, son sous-sol est totalement alvéolé. "Notre rôle aujourd'hui est de préserver les carrières pour mieux protéger notre ville." La montagne de Laon, comme Montmartre à Paris, est une butte de sable et de roches posée sur de la craie, dont le sommet culmine à plus de 80 mètres au-dessus de la plaine de Picardie. La pierre, le sable et l'eau, présents et facilement accessibles en haut du plateau, ont été propices à l'installation des hommes.
Au croisement de l'Ile-de-France, de la Champagne et de la Picardie, village prospère à l'époque gauloise et capitale du royaume à l'ère carolingienne, Laon atteint son apogée au XIIIe siècle. Ville religieuse incontestable, puis place forte militaire, elle bénéficie d'un patrimoine architectural exceptionnel : cathédrale, anciennes abbayes, Hôtel-Dieu, huit kilomètres de remparts médiévaux et un réseau souterrain de plus de 140 hectares... Dès le Ve siècle, "tout ce qui est construit au-dessus est extrait d'en dessous". Mais l'exiguïté de la butte, l'accroissement de la ville, la nécessité d'avoir un rempart ont contraint les carriers à s'enfoncer plus profond pour tailler la pierre. L'extraction du sable, elle, se fait autour des puits d'eau, chemin direct pour le remonter à la surface. Au fil des siècles, ces exploitations multiples sur la totalité du plateau posent des problèmes de stabilité et fragilisent la butte.

Visite guidée, des fossiles aux canons

Pourtant, c'est l'occupation des souterrains et leurs multiples usages, nécessitant un entretien régulier et une consolidation par des centaines de piliers de murs et de voûtes, qui lui ont permis de subsister jusqu'à aujourd'hui. Ces sous-sols regorgent de vestiges qui, depuis l'origine de la butte, traversent 180 millions d'années. Depuis 2004, une visite guidée des souterrains, limitée à des groupes de 25 personnes, est proposée au départ de l'office de tourisme. Pour un tarif unique de trois euros, le voyage va des souterrains (et leurs fossiles marins) aux silos à grain, en passant par les carrières, jusqu'aux canons des fortifications militaires du XIXe siècle.
Consciente de la richesse mais également de la fragilité d'un tel sous-sol, la ville de Laon s'est engagée dans la sauvegarde et la mise en valeur de ce patrimoine exceptionnel au moyen de la création d'un service municipal "Recherche des carrières" en novembre 1993. Depuis, ce service participe au plan de prévention des risques mis en place par la ville pour tenter de gérer et de pérenniser le patrimoine bâti mais aussi d'améliorer sa valeur. "Nous avons créé ce service public gratuit d'urbanisme réglementaire. Il gère l'instruction des permis de construire et le service des carrières. Celui-ci répertorie, cartographie et met en valeur les espaces souterrains. Il s'occupe également du plan de prévention des risques. Nous avons en effet beaucoup d'arrêtés de péril dans la ville haute. Ainsi, chaque dossier de transaction immobilière doit obligatoirement comprendre un état du sous-sol fourni par le service après une visite."

Une carte d'aléas avec six zones

Le plan de prévention des risques prend appui sur l'ensemble des études menées depuis 1995 à Laon. Il a été synthétisé dans un document explicatif et représenté par une carte d'aléas où six zones correspondent à des risques d'effondrement, de glissement, de ravinement, légendée suivant le niveau de risques. Les propriétaires sont tenus à des obligations, notamment celle de consulter le service de recherche des carrières pour tous travaux (dont le raccordement au réseau d'assainissement), recherches, interventions liées aux souterrains et au patrimoine bâti.
"De notre côté, précise Emile Vitrant, nous surveillons régulièrement les sous-sols. Parfois, nous décelons sous une maison une cavité dangereuse qui nécessite d'être comblée. Mais l'opération d'injection de béton et l'intervention d'un bureau d'études géotechniques pour la concevoir et l'organiser sont spécifiques et très coûteuses. Nous conseillons aux propriétaires de demander des aides financières à l'Etat pour réaliser ces études, mais les seuils sont très bas et peu de demandes sont honorées, bien qu'il s'agisse d'un patrimoine national. En revanche, la ville a décidé de les aider pour la rénovation les façades. En secteur sauvegardé ou classé, les consignes pour entretenir ou restaurer les façades dépendent de normes établies par les architectes des Bâtiments de France. Les contraintes concernant l'utilisation de matériaux spécifiques sont importantes, par exemple les pvc sont exclus, ou les enduis spéciaux doivent ressembler à ceux de l'époque. Des coûts automatiquement plus élevés."

La ville s'est engagée avec l'Etat dans une troisième opération programmée d'amélioration de l'habitat (Opah), dite "Opah complexe" en raison des problèmes posés par le sous-sol, dans la ville haute. Pour les opérations de façade que la ville mène depuis plusieurs années, une enveloppe annuelle de 70.000 euros est votée. Après accord sur dossier (la demande doit être déposée à la mairie), un financement, qui couvre jusqu'à 30% du montant des travaux (avec un plafond de 7.622 euros par dossier) peut être accordé aux propriétaires. Ceci dans la limite de l'enveloppe annuelle...
"En sous-sol comme à l'air libre, précise l'élu. Il nous reste encore de nombreux chantiers."

Commune de Laon

Nombre d'habitants :

26000
Hôtel de Ville - Place du Général-Leclerc
02 000 Laon
contact@ville-laon.fr

Bibé Monsieur

Responsable du service Urbanisme réglementaire

Emile Vitrant

Maire adjoint chargé de l'urbanisme, de la voirie et de l'habitat

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