Équipements sportifs structurants : un grand chantier pour la fin 2023

À l'heure où les regards se portent sur les Jeux de Paris 2024, l'avenir de la pratique sportive en France se joue sur un autre terrain. Les équipements structurants, vieillissants et en manque de rénovation thermique, ont besoin d'investissements massifs. La discussion du prochain projet de loi de finances sera décisive.

Y aura-t-il des équipements sportifs structurants à Noël ? C'est la question que se posent les élus responsables des sports en collectivité territoriale. Car entre les rares grands équipements réalisés pour les Jeux de Paris 2024 et le plan 5.000 équipements de proximité – qui fait depuis bientôt deux ans l'objet d'un investissement important et qui sera prolongé en 2024 avec une déclinaison spécifique pour les quartiers prioritaires –, les équipements structurants indispensables au développement du sport encadré en club font figure de parents pauvres des politiques de l'État.

Il est pourtant plus que jamais indispensable d'investir dans ces équipements. Pourquoi ? D'abord, pour atteindre l'objectif fixé dès 2017 par le gouvernement de faire de la France une grande nation sportive en augmentant de trois millions le nombre de pratiquants. Ensuite, pour réaliser des travaux de rénovation thermique sur un parc vieillissant. Travaux sans lesquels certains équipements – à l'image des piscines, patinoires ou gymnases – seront amenés à fermer à plus ou moins long terme faute de moyens pour les faire fonctionner dans de bonnes conditions. L'Agence nationale du sport (ANS) chiffre à 80.000 le nombre d'équipements nécessitant de tels travaux sur les 300.000 existants…

Trajectoire budgétaire défavorable

Sur quels moyens de l'État les élus locaux pourront-ils compter dans les années à venir ? Si l'on en croit les travaux du projet de loi de programmation des finances publiques (LPFP) pour les années 2023 à 2027 et le rapport sur le plafond de dépenses pour le futur projet de loi de finances (PLF) pour 2024, paru à la mi-juillet, le financement les équipements sportifs structurants ne figure pas parmi les priorités.

La LPFP 2023-2027 a révélé que le gouvernement prévoyait de baisser les crédits consacrés au sport à l’issue des Jeux olympiques. Selon le document de programmation du budget du sport, les dépenses d'intervention devraient passer de 562 millions d'euros en 2022 à 348 millions en 2025.

De son côté, le PLF pour 2024 devrait envisager de reconduire à hauteur de cent millions d'euros les crédits pour le soutien aux équipements sportifs de proximité – avec une déclinaison spécifique pour les quartiers prioritaires, comme vient de le préciser le conseil des ministres du 26 juillet –, tandis que les priorités politiques en cette année olympique porteront sur l'insertion par le sport, le sport-santé et l'activité sportive des publics prioritaires. Aucune allusion, donc, à une hausse des moyens en faveur des équipements structurants.

À l'occasion de la discussion du PLF 2023, la ministre des Sports, Amélie Oudéa-Castéra, avait d'ailleurs reconnu : "Aujourd’hui, j’ai le sentiment que nous faisons le travail aux deux bouts du spectre, c’est-à-dire sur les grandes enceintes sportives […] et sur les équipements de proximité. […] il sera nécessaire de porter un regard très attentif sur cette dimension [les équipements structurants] lors de la sortie des Jeux, afin, le cas échéant, de calibrer un plan de soutien."

Les taxes affectées dans le viseur

Du côté des élus locaux, on fait la grimace. Le plan Marshall en faveur des équipements structurants réclamé depuis plus d'une dizaine d'années ne semble pas devoir sortir des cartons. Pire, les subventions de l'État, versées par l'ANS, ont fondu comme neige au soleil ces dernières années. L'enveloppe dédiée aux équipements structurants, qui s'élevait encore à 74 millions d'euros en 2011, du temps du CNDS (Centre national pour le développement du sport), ne représentait plus que 22 millions en 2022. On est loin des 500 millions d'euros par an évoqués par l'Andes (Association nationale des élus en charge du sport).

Comment trouver de nouveaux moyens financiers pour les équipements structurants ? Les élus ont sur ce point une idée fixe : déplafonner les trois taxes affectées à l'ANS (taxe "Buffet" sur les droits audiovisuels des compétitions ; prélèvements sur les jeux hors paris sportifs de la Française des jeux ; prélèvements sur les paris sportifs en ligne) afin de faire en sorte que "le sport finance le sport". Or, en 2023, sur un produit de 487 millions d'euros, seuls 166 millions sont allés au sport. Le plafond de la taxe sur les paris sportifs est ainsi maintenu à 34,6 millions d'euros en 2023 quand le reversement au budget général passe de 76,7 millions à 147,1 millions. Quant au plafond de la taxe sur les jeux de la FDJ, il reste stable en 2023 à 71,8 millions tandis que le reversement au budget général passe de 162,6 millions à 174,2 millions.

À défaut de déplafonner complètement les taxes affectées à l'ANS, un simple retour à l'époque où le CNDS bénéficiait des deux tiers du produit de ces taxes, contre seulement un tiers aujourd'hui pour l'ANS, constituerait déjà une bouffée d'oxygène salutaire.

Le temps presse

Lors du récent congrès de l'Andes, Patrick Appéré, son président, et Vincent Saulnier, son secrétaire général, nous avaient confié qu'ils espéraient que la ministre des Sports plaide pour le déplafonnement des taxes affectées à l'occasion de la discussion sur le PLF 2024, même si, selon eux, le ministère des Finances y était opposé (lire notre article 9 juin 2023).

Un geste de Bercy en faveur des équipements sportifs serait le bienvenu, a fortiori quand on sait que l'automatisation du versement du FCTVA (fonds de compensation pour la taxe sur la valeur ajoutée) a coûté, en 2022, 40 millions d'euros aux collectivités au titre des travaux sur leurs équipements sportifs.

Or, le temps presse. Le renouvellement du dispositif Pass'sport, la Coupe du monde de rugby 2023 organisée en France ou les Jeux de Paris 2024 seront pour les Français autant d'incitations à se mettre au sport. Les clubs vont devoir faire face à des demandes d'adhésions accrues. Il faudra pouvoir y répondre par une augmentation de la quantité et de la qualité des éducateurs sportifs et, de manière tout aussi indispensable, par une hausse du nombre d'équipements adaptés aux pratiques en club et aux impératifs de sobriété énergétique.