Estelle Grelier rêve d'une nouvelle étape de décentralisation
Pour la secrétaire d'Etat aux Collectivités territoriales, la prochaine majorité devra poursuivre la réforme territoriale. Elle a récemment livré plusieurs propositions, dont l'extinction progressive du conseil départemental.
Une année de présence au gouvernement n'a pas entamé son élan réformateur. A trois mois du premier tour de l'élection présidentielle, Estelle Grelier, secrétaire d'Etat aux Collectivités territoriales, détaille un ensemble de propositions audacieuses en matière d'organisation des collectivités territoriales dans une note publiée par la fondation Jean-Jaurès, think tank proche du parti socialiste. Elle y plaide pour une "nouvelle étape de la décentralisation" accordant plus de pouvoirs à l'intercommunalité et à la région.
L'ancienne vice-présidente de l'Assemblée des communautés de France (ADCF) demeure partisane d'une élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires, distincte de l'élection des conseillers municipaux. Dans l'organisation qu'elle imagine, les actuels EPCI à fiscalité propre, érigés en collectivités territoriales, seraient bénéficiaires de la dotation globale de fonctionnement que l'Etat verse aujourd'hui aux communes. En outre, ils seraient rassemblés dans "une fédération des intercommunalités" rattachée d'abord au conseil départemental, mais qui, après évaluation, "pourrait" se substituer à ce dernier. On savait qu'Estelle Grelier était en phase avec ce scénario envisagé par Manuel Valls peu après son accession au poste de Premier ministre. Quant aux métropoles, elles seraient amenées à imiter le Grand Lyon : transformées en collectivités à statut particulier, elles hériteraient des compétences du conseil départemental sur leur territoire.
La "COP des territoires"
Le conseil départemental serait aussi démembré au profit du conseil régional, ce dernier devenant responsable des routes départementales et des collèges (comme prévu dans les premières versions de l'avant-projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République). Par ailleurs, la région serait renforcée par plusieurs transferts provenant de l'Etat en matière d'emploi et de formation professionnelle. Elle disposerait, enfin, d'un pouvoir réglementaire lui permettant d'adapter les lois et règlements la concernant. Quant à l'Etat, il serait recentré sur ses missions régaliennes, mais exercerait les compétences sociales dévolues aujourd'hui au département.
Ayant en commun de très nombreuses politiques, les collectivités territoriales et l'Etat dialogueraient régulièrement au moyen d'une "COP des territoires", nouveau nom donné au Haut Conseil des territoires rejeté par le Sénat. L'instance serait le lieu du débat et de la signature d'un contrat triennal entre l'Etat et les collectivités territoriales.
La taxe d'habitation remplacée par l'impôt sur le revenu
De profondes modifications financières et fiscales accompagneraient la nouvelle étape de la décentralisation. La secrétaire d'Etat appelle, en effet, à engager la révision des valeurs locatives des locaux d'habitation. Elle prône aussi une spécialisation des impôts locaux par catégories de collectivités. "La question du transfert de la part de la taxe départementale sur le foncier bâti au bloc communal, en substitution de ressources figées, devra être posée", écrit-elle. Elle avance aussi l'idée, encore plus ambitieuse, d'une suppression de la taxe d'habitation. A la place, une fraction locale de l'impôt sur le revenu serait dévolue aux communes et intercommunalités.
Pour Estelle Grelier, "les réformes territoriales, quelles qu'elles soient, ne peuvent ni ne doivent se résumer à des lois d'élus pour les élus". Plusieurs de ses propositions visent donc à associer davantage les citoyens aux décisions publiques. Ces dernières pourraient séduire Benoît Hamon, désormais candidat officiel du parti socialiste. Mais, alors que son programme est encore en chantier, en particulier sur les collectivités territoriales, on peut douter qu'il ne retienne les propositions les plus clivantes, telles que l'élection au suffrage universel direct des conseillers communautaires.