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Environnement - Et si la fiscalité passait au vert ?

De l'avis de nombreux acteurs, la taxe départementale des espaces naturels sensibles devrait être réformée. Elle n'en est pas moins l'expression dans la fiscalité de la nécessité d'affecter des ressources à ces espaces. D'autres indices montrent que la fiscalité passe au vert.

La fiscalité accorde-t-elle une place suffisance aux préoccupations environnementales et, plus précisément, à la préservation des espaces naturels ? Aujourd'hui, des signes laissent présager une prise de conscience. La dotation globale de fonctionnement, pierre angulaire des dotations de l'Etat aux collectivités locales, vient d'être réformée : l'enveloppe dotation forfaitaire des communes se décompose désormais en quatre parts, dont une dotation proportionnelle à la superficie (172 millions d'euros sur les 2 milliards de dotation forfaitaire). Toutes les communes reçoivent donc 2 euros par hectare, les communes de montagne, 5 euros par hectare. Au-delà de cette modeste enveloppe, cette réforme repose sur une novation conceptuelle de taille en reconnaissant que le territoire est générateur de dépenses.
Le projet de loi relatif aux parcs nationaux prévoit par ailleurs dans son article 12 la création d'une part de dotation globale de fonctionnement réservés aux communes situées dans ces parcs (2,45 millions d'euros pour 140 communes). Le 21 octobre dernier, Brice Hortefeux, ministre délégué aux Collectivités territoriales, déclarait, lors du congrès de l'Anem (Association nationale des élus de montagne) : "Je suis ouvert à ce que nous réfléchissions ensemble à la définition d'un critère environnemental qui viendrait compenser les efforts déployés par vos communes pour préserver des espaces naturels."


Réformer le mode de recouvrement de la TDENS

Le 25 octobre dernier, la coordination Nature, qui réunit associations environnementales, associations d'élus et partenaires sous l'égide de France Nature Environnement (1), animait un séminaire "Nature et fiscalité". Ce fut l'occasion de mettre un zoom sur les dispositifs fiscaux existants et sur leur nécessaire adaptation. Au premier chef, la taxe départementale des espaces naturels sensibles (TDENS), votée par 71 départements et dont le produit annuel est évalué à près de 100 millions d'euros. Une enveloppe comparable à celle que le ministère de l'Ecologie affecte aux espaces naturels. Cette taxe a l'avantage d'avoir une forte légitimité : toute personne qui fait construire une maison s'installe sur un territoire et s'approprie de l'espace, profite de l'environnement de sa nouvelle habitation et doit, avec le permis de construire, payer la TDENS. Mais cette taxe est loin d'être satisfaisante : son recouvrement est souvent défectueux. Il s'effectue en deux étapes : pour 50% de la taxe, 18 mois après la date du dépôt du permis et, pour la somme restante, 36 mois après la date du dépôt du permis.


Mieux connaître l'affectation des ressources

Comme l'avait proposé dans un rapport, en 2003, l'Inspection générale de l'environnement, le collectif Nature demande que la taxe soit recouvrée en une seule fois, au moment de la déclaration d'achèvement des travaux. La question de la généralisation de la TDENS est plus difficile à régler : la taxe étant facultative, il appartient aux départements de la voter et elle peut varier entre les territoires. Faut-il envisager de la rendre obligatoire et de créer avec les sommes versées un fonds national de péréquation ? Le rapport de l'Inspection générale de l'environnement précisait qu'en 2003, 14 départements représentaient 51% des recettes tandis que les  32 derniers ne pesaient que 10% du total.  Si tous les départements votaient la TDENS au taux moyen de 1%, le produit de cette taxe serait doublé.
Autre sujet de débat, la stratégie foncière des départements qui récoltent cette taxe est-elle à la hauteur ? Les départements dépensent-ils les sommes récoltées pour les espaces naturels ? Il semblerait qu'il ne soit pas toujours facile de connaître la nature des dépenses. En 2003,  près de 8% des dépenses n'étaient ainsi pas justifiées, toujours selon le même rapport.  Le collectif Nature estime qu'il serait souhaitable de prévoir des outils comme un budget spécifique et un bilan des résultats pour la gestion des espaces naturels. Certains départements, comme l'Isère ou les Bouches-du-Rhône, ont pris de l'avance dans ce domaine. "Il serait en effet nécessaire que tous les départements définissent des stratégies par des zonages, établissent des comptes rendus d?activités... mais nous sentons encore des blocage de la part de l'Assemblée des départements de France, autonomie financière oblige", reconnaît Christian Bartot, de la direction des natures et paysages du ministère de l'Ecologie.
Autre point de friction,  la loi rurale a créé des espaces naturels régionaux. Comment vont-ils être financés ? Les régions et les départements vont-ils se partager les ressources de la TDENS ? Les régions se positionnant sur la planification vont-elles tout simplement contrôler cette ressources ? Autant de questions encore en suspens.
 
(1) Rivages de France, France Nature Environnement, Fédération des parcs naturels régionaux de France, Association nationale des élus de la montagne, Association nationale des élus du littoral, Fédération française de la randonnée pédestre, Fédération française des clubs alpins et de montagne, Mairie-conseils (Caisse des Dépôts), Union touristique des amis de la nature, Région verte...


Clémence Villedieu

 

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