Exécution d'office : l'organe délibérant peut-il fixer un barème pour le remboursement de frais engagés à la suite d'une mise en demeure restée infructueuse ?

Constat : Dans l’exercice de ses pouvoirs de police administrative, au sein du bloc communal, le maire, et dans certains cas le président de l’EPCI lorsqu’il est investi de pouvoirs de police spéciale, peuvent parfois mobiliser une mesure dite d’exécution d’office. Elle a pour objet de mettre cette autorité administrative en mesure d'agir en lieu et place du débiteur défaillant, de se substituer à lui dans l'exécution de son obligation. Dan ce cas, l’organe délibérant de la collectivité ou de l’EPCI est-il compétent pour déterminer une grille tarifaire de référence, applicable au remboursement des frais qui auraient été avancés ? 

Réponse : L'exécution d'office de l'administration ne peut être autorisée que dans deux hypothèses :

  • Soit parce qu’un texte spécial l’y autorise expressément (par exemple, dans l'hypothèse où, après mise en demeure sans résultat, le maire procéderait à l'exécution forcée des travaux d'élagage destinés à mettre fin à l'avance des plantations privées sur l'emprise des voies sur lesquelles il exerce la police de la circulation afin de garantir la sûreté et la commodité du passage, les frais afférents aux opérations sont mis à la charge des propriétaires négligents (1)) ;

  • Soit en cas d’urgence (sous le strict contrôle du juge administratif en cas de recours).

Dans un jugement du 29 mars 2024, le tribunal administratif de Grenoble a examiné la légalité de la fixation par le conseil municipal d'un barème pour les opérations d'élimination des déchets abandonnés dans le cadre de l'exercice des pouvoirs de police que le maire tient de l'article L 541-3 du code de l'environnement, texte qui permet, à l'instar de l'article L 2212-2-2 du CGCT, d'exécuter d'office la mesure prescrite par l'arrêté, aux frais de son destinataire, après mise en demeure restée sans suite. Dans cette affaire, l’assemblée délibérante avait approuvé la mise en place d'une tarification des prestations exécutées d'office pour l'enlèvement des déchets abandonnés sur la voie publique et sur les autres lieux en cas de méconnaissance de la réglementation. Elle avait fixé un tarif de " 150 euros TTC pour les déchets et encombrants de moins d'un mètre cube, transportables par un agent avec un véhicule classique ", un tarif de 300 euros TTC pour les " déchets de plus d'un mètre cube, ou à chaque fois que l'intervention nécessitera la présence de 2 agents et/ou l'utilisation d'un véhicule spécifique " et prévu un " montant à calculer en coût réel (moyens humains et matériels mobilisés) pour les déchets particulièrement conséquents ne pouvant être enlevés par les moyens courants de la Ville. Il s’agissait donc d’une grille tarifaire forfaitaire, opposable aux contrevenants a priori. 

Il est à noter que cette délibération n’institue pas une sanction pécuniaire de nature administrative ni même pénale, comme l’a relevé le rapporteur public. 

Le juge a considéré que les dispositions légales précitées « ne font pas obstacle à ce que le conseil municipal d’une commune fixe un barème de tarifs pour les prestations, qu’elle exécute par ses propres moyens sur la base des coûts humains et matériels, que représentent les opérations d’élimination des déchets abandonnés ».

Il reste à déterminer si cette décision a vocation à faire florès et à s’appliquer de la même manière en cas de mobilisation d’une mesure de police générale ou si elle n’est cantonnée qu’à la stricte application d’un pouvoir de police spéciale bien bordé, tel que l’encadre l’article L 541-3 du code de l’environnement, et qui porte un arsenal complet de mesures (consignation de sommes, astreinte journalière, amende administrative, …). 

Dans l’attente d’éclaircissements jurisprudentiels ultérieurs éventuels, l’émission d’un mandat de paiement ad hoc à l’encontre du contrevenant, sur le fondement de justificatifs des dépenses avancées, présentera toutes les garanties procédurales. 

Références :

(1) Article L 2212-2-2 du code général des collectivités territoriales ; (2) TA Grenoble, 29 mars 2024, n° 2104692

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