Alpes-Maritimes : Cagnes-sur-Mer redessine son bord de mer

Cagnes-sur-Mer entame la requalification de son bord de mer. Sur trois ans, ce chantier de 23 millions d'euros transformera la route du bord de mer défigurée par l'automobile en un aménagement exemplaire de front de mer, type Croisette de Cannes. Une opération urbaine pilote sur la Côte d'Azur.

Plantation de palmiers, réduction sensible du trafic automobile, aménagement d'un cheminement piétonnier et pour vélos transformeront sur un peu plus de 3 kilomètres l'ex-RN 98, route du bord de mer de Cagnes-sur-Mer (45.000 habitants), en véritable site urbain de promenade. Cette valorisation urbaine de grande ampleur a nécessité huit ans d'études et de transaction ainsi que la mobilisation de financements croisés (commune, département, région, Etat) pour aboutir à l'inscription de ce projet de requalification du littoral à l'actuel contrat de plan Etat-région (2000-2006). Aujourd'hui ce bord de mer, affiche la banalité de son aménagement et se sent asphyxié par une circulation à 95% interurbaine comparable par son trafic à celui d'une autoroute avec 50.000 véhicules jour (7.000 supplémentaires l'été). Une situation qui n'incite pas à la flânerie et donne à cette façade maritime une image caricaturale de station balnéaire.
L'étude de requalification a été réalisée par une équipe composée de l'architecte Alfred Peter, du cabinet Ribi et d'Ingerop Méditerranée qui est également maître d'oeuvre.

La fin du règne du tout automobile...

Elément fort du projet, l'automobile ne régnera plus sans partage sur le bord de mer. La route sera réduite à 3 voies (2 fois 3 voies actuellement). La surface de la voirie affectée à l'automobile passera de 78 à 45%. A l'ouest, à la hauteur de l'hippodrome, la route effectuera un crochet vers le champ de course afin de dégager 3 hectares en bord de mer où sera aménagé un mini parc planté de palmiers, une esplanade piétonne large de 4 mètres longée par une piste cyclable. Un avenant au bail emphytéotique, dont est titulaire la société des courses, permet à la commune de récupérer 29.000 m2 pour un coût de 540.000 euros. La nouvelle entrée de ville tranchera avec la situation actuelle où la double chaussé donne au site l'apparence d'une autoroute le long de la plage. L'aménagement d'une véritable palmeraie à l'entrée de la ville avait provoqué l'inquiétude de l'Aviation civile. Celle-ci craignait qu'elle perturbe le fonctionnement de la balise Riviera qui, sur l'hippodrome, guide les avions en approche à l'aéroport Nice-Côte-d'Azur. Des tests effectués cet été ont dissipé les craintes.
La première tranche du chantier débutera en octobre (22 mois pour un coût de 8,2 millions d'euros). Suivront ensuite la réhabilitation de la section est (Cros-de-Cagnes) par la fermeture d'un souterrain routier et l'élargissement des trottoirs et du terre-plein central. La troisième phase verra le traitement de la partie centrale pour un achèvement prévu en 2006-2007.

... pour une arrivée en force des deux-roues

Le réaménagement de la voirie s'accompagnera également d'un traitement végétal. Près de 1.000 pins et palmiers doivent être plantés pour donner une touche très Croisette à la voie. Les plantations respecteront le "grand paysage" de Cagnes-sur-Mer constitué en arrière plan par le vieux village du haut de Cagnes et les premiers massifs alpins. L'opération s'accompagnera de l'accroissement du nombre de places de parking qui passera de 1.270 à 1.414 places. La piste cyclable sécurisée aménagée le long du boulevard sur 3 kilomètres pourra, à terme, rejoindre celle en service sur la promenade des Anglais à Nice via la commune de Saint-Laurent-du-Var qui les sépare. Ainsi à l'horizon 2008-2010 du port de Nice à l'hippodrome à Cagnes-sur-Mer, soit sur 15 kilomètre, les deux-roues seront les grands vainqueurs de la reconquête du bord de mer. Toutefois cette prolongation de la piste cyclable fera l'objet d'une nouvelle étude. Elle doit en effet tenir compte de la mise en service du tramway niçois qui à l'horizon 2008 devrait atteindre Cagnes-sur-Mer. 23 millions d'euros au total, vélos, tramway, et piétons devraient redonner un visage plus humain à ce bord de mer défiguré au cours des dernières décennies par l'automobile.

Michel Bovas / Innovapresse Nice pour Localtis

"Un projet long et épuisant"

Louis Nègre est maire de Cagnes-sur-Mer et vice-président de la communauté d'agglomération Nice-Côte-d'Azur (Canca).

De quand date le projet d'une requalification du bord de mer ?

J'ai engagé ce projet dès mon arrivée à la mairie en 1995. Il m'a fallu près de deux mandats, trois enquêtes publiques, d'innombrables consultations avant de pouvoir donner le premier coup de pioche pour une réalisation qui ne sera peut-être pas achevée avant le prochain mandat. Plus de dix ans donc entre son engagement et sa livraison. C'est très long et épuisant.

Quelles ont été les difficultés pour monter ce projet ?

Plus que le montage financier, c'est un véritable parcours du combattant qu'il faut assumer dans les méandres d'une administration déjà lourde qui ne cesse d'accumuler les contraintes sans parler de la multiplication des consultations avec la DDE, le département, la région, l'Etat, avant de convaincre tout le monde et de pouvoir faire figurer ce projet au contrat de plan Etat-région (2000-2006). Tout cela sans donner un premier coup de pioche et sans ignorer que des surprises peuvent apparaître aux appels d'offres infructueux. Il faut une belle dose de persévérance.

Quelles leçons en tirez-vous ?

Pour un projet de cette ampleur, un mandat électoral est insuffisant. Et ce décalage entre un processus administratif de plus en plus complexe et des citoyens et des entreprises qui s'impatientent ne fait que s'accentuer. Il faut absolument une continuité dans la politique d'aménagement au risque de ne rien réaliser si la nouvelle municipalité annule ce qu'a engagé la précédente. Nous avons actuellement le même problème avec le projet de reconstruction de la station d'épuration qui, entre recours en tribunal administratif, enquêtes publiques et appel d'offres infructueux, a pris du retard. Les citoyens me reprochent justement de ne pas agir assez vite sans se douter que cette lenteur trouve d'abord son explication dans la complexité de plus en plus lourde des procédures administratives. Il devient nécessaire d'alléger ces contraintes. Et le projet de décentralisation arrive au bon moment.

Une plus grande fluidité du trafic pour un débit supérieur

S'agissant du problème posé par la réduction des voies routières sur le trafic important qui les emprunte actuellement (5.700 véhicules par heure aux pics du matin et du soir), le cabinet d'études Ribi souligne qu'un flux plus régulier combinée à une vitesse limitée à 50 km/h permet une plus grande fluidité avec un débit supérieur. Ainsi en 1998, la commune de Cagnes-sur-Mer avait, dans le cadre d'un chantier de conduites souterraines, réduit le nombre de voies sans que les embouteillages aient été plus nombreux. Pour les carrefours, les concepteurs privilégient le principe des feux tricolores par rapport aux giratoires. Le réaménagement devrait ainsi se traduire par une baisse d'un tiers du trafic routier qui basculera vers les axes routiers intérieurs constitués par la RN 7 (au gabarit limité) et à l'A8 (déjà en voie de saturation sur la section Cagnes-sur-Mer / Nice-Ouest). Ce dernier axe, qui absorbe 128.000 véhicules jour, devra absorber 4.500 véhicules supplémentaires.

Menton sur les traces de Cagnes-sur-Mer

Même problème, même solution pour Menton qui a fait également inscrire au contrat de plan la transformation de son bord de mer. La requalification concerne le bord de mer depuis Roquebrune-Cap-Martin, à l'ouest, à l'Italie, à l'est, soit également 3 kilomètres. Le chantier débutera en 2004 pour un montant de 15 millions d'euros financés comme celui de Cagnes-sur-Mer par l'Etat, la région, le département et la ville. Le projet a été conçu par l'architecte Bruno Fortier, via un marché de définition, associé au paysagiste Michel Desvigne et au designer Sylvain Dubuisson. L'idée centrale est de relier le nouveau le bord de mer à la ville par de vastes espaces piétonniers. Car piétons et vélos seront aussi les grands gagnants de la requalification du bord de mer mentonnais même si les contraintes de trafic automobile ne sont pas au même niveau qu'à Cagnes-sur-Mer. La circulation automobile sera reléguée sur une voie à 5,60 mètres de large, dotée de mini ronds-points et un stationnement autorisé seulement côté ville.

L'aménagement permet d'inscrire côté mer la réalisation d'un vaste parvis piétonnier de 8 à 9 mètres de large doté d'un mobilier urbain spécialement conçu pour cette opération. Des terrasses et deux jardins panoramiques seront implantés au long de la promenade enrichie de nombreux palmiers. Le sol sera aménagé avec un matériau en béton "terre cuite". Enfin des travaux maritimes sont également programmés afin d'agrandir la surface des plages et protéger le rivage de l'érosion de la houle.


Aller plus loin sur le web :
 
Le site de Cagnes-sur-Mer
http://www.cagnes.com
 
Le site de Menton
http://www.villedementon.com

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