L'assainissement des eaux de baignade et la gestion de l'eau
Au départ...
Au début des années 1990, la Ddass classe les eaux de baignade des plages de la communauté d'agglomération Bayonne-Anglet-Biarritz en qualité C (plutôt mauvaise) et la Surf-Rider Foundation (une association internationale de surfers qui milite pour la préservation de l'océan) leur attribue le pavillon noir. Or, le choix des destinations touristiques se fait de plus en plus sur des critères de qualité de l'environnement et la fermeture des plages serait une catastrophe pour le tourisme local (70% de l'activité économique de Biarritz).
Le problème de qualité bactériologique des eaux de baignade de la communauté a plusieurs origines :
- Biarritz dispose d'un réseau centenaire d'évacuation des eaux qui est commun aux eaux pluviales et aux eaux usées. Les eaux usées laissent des dépôts sur les parois des conduites et lorsqu'il y a de fortes pluies, celles-ci entraînent les dépôts et provoquent un déversement brutal d'eaux polluées dans la mer. De plus, en cas de fortes pluies, la capacité de la station d'épuration est insuffisante (800m3/h d'effluents) ;
- le système d'assainissement de Bayonne est très insuffisant. En 1998, seulement 40% des eaux usées étaient traitées en station d'épuration ;
- Anglet connaît un développement important de nouveaux logements qui demandent un nombre de raccordements dépassant largement la capacité de sa station d'épuration.
La ville de Biarritz se mobilise la première à l'occasion du changement de municipalité en 1991. Elle ouvre un programme d'actions dans le cadre d'une charte de l'environnement (1993-1999) dont la première pierre est posée en 1994 avec la création d'un bassin de stockage (rétention des efluents pendant 48 h en cas de fortes pluies). Cette initiative est reprise ensuite par le district BAB (qui existe depuis 1972) puis par la communauté d'agglomération (créée en 2000), qui va rapidement mettre en place une politique d'assainissement intercommunale. A noter que l'équipe municipale actuelle de Biarritz a été élue sur "sa volonté de préserver l'environnement et le patrimoine et sur une autre conception du développement du tourisme littoral".
En cours de route...
En 1998, sur incitation de la Diren (direction régionale de l'environnement), le district s'engage dans l'élaboration d'une charte d'environnement et de développement durable, une procédure qui exige de mettre en place un comité de pilotage et de réaliser un diagnostic et un travail de concertation et d'évaluation. L'un des axes de la charte consiste à améliorer la qualité des eaux littorales et fluviales et insiste sur la nécessité de prendre en compte les "effets d'orage". Le diagnostic est réalisé par un cabinet de consultants puis enrichi par le comité de pilotage et par un questionnaire auprès de 55.000 foyers de l'agglomération (11.000 réponses). Des groupes de travail font des préconisations sur plusieurs thèmes, dont celui de l'assainissement.
Des investissements importants sont réalisés. Une partie est financée par des contrats entre l'agglomération et l'agence de l'eau, qui ont démarré avant la charte et permis de commencer les plus gros travaux :
- fin 1999, création d'une nouvelle station d'épuration à Saint-Frédéric (Bayonne) à partir d'une nouvelle technologie : doublement du taux de traitement des eaux (aujourd'hui 70% des eaux de Bayonne sont traitées, avec un objectif 100% d'ici 5 ans) ;
- réorganisation de la station d'épuration d'Anglet, avec augmentation de sa capacité de traitement ;
- reconstruction de la station d'épuration de Biarritz, conçue pour être sans nuisances (système confiné par bio-filtration avec traitement des odeurs, inscription paysagère, capacité multipliée par trois : 2.500m 3/h d'effluents).Elle est inaugurée en juin 2003 ;
- raccordement au réseau de collecte du quartier Petit Bayonne (centre-ville) ;
- développement du système de réseaux de raccordements à Anglet ;
- rénovation des circuits de collecte à Biarritz ;
- construction de douze bassins de stockage sur tout le territoire intercommunal pour limiter les décharges lors des orages, condition sine qua non de la stabilité de la qualité des eaux ;
- construction en cours d'un émissaire souterrain de 800 mètres à Biarritz permettant d'éloigner le panache d'effluents de la plage.
Les moyens mobilisés et les partenaires...
Les élus ont créé au sein de la communauté une direction de l'environnement (qui fait travailler cinq cadres) et un centre technique d'environnement (qui comprend une douzaine de personnes). La mise en place de la charte d'environnement et de développement durable de la communauté s'est faite dans le cadre d'une mission éponyme avec le concours de deux personnes. Le responsable politique de l'ensemble de l'opération est Michel Veunac, chargé des questions environnementales à Biarritz depuis 1992. Il préside la commission statutaire Environnement de la communauté d'agglomération.
Pour élaborer et suivre la charte, un comité de pilotage de soixante personnes a été mis en place. Il comprend quatre collèges (administrations, institutions et personnes qualifiées, collectivités, associations). Au sein du collège associatif, on compte notamment l'association des riverains de la station d'épuration de Biarritz, Surf-Rider Foundation et le collectif des associations d'environnement. Les élus considèrent que leur participation s'est avérée stimulante : "Par exemple, ils ont fait avancer le débat quant à la nécessité d'évaluer en temps réel la qualité de l'eau pour obtenir le label des communes touristiques classées (un nouveau système devait être expérimenté pendant l'été 2003). Ou encore, la concertation engagée autour de la mise en place de la station d'épuration de Biarritz a conduit à la mise en place d'une procédure de certification de qualité environnementale des zones autour de la station (ISO 1402 : risque zéro nuisance)." Le comité de pilotage s'est maintenant transformé en conseil permanent consultatif du développement durable afin d'assurer le suivi et l'évaluation des actions.
Les élus ont décidé de mener une politique de communication active (objectif bleu) pour présenter et expliquer aux citoyens les actions menées :
- des personnes ont été recrutées pour expliquer la raison d'être et le déroulement des travaux dans le centre de Bayonne ;
- les journaux municipaux ont relayé ces informations ;
- des plaquettes thématiques (dont une sur l'eau) ont été distribuées dans tous les foyers.
Les moyens financiers nécessaires aux investissements ont mobilisé plusieurs partenaires, européens et nationaux, dans le cadre de la contractualisation autour de la charte. La grande partie des investissements pour optimiser la collecte et le traitement des eaux est entrée dans le contrat d'agglomération avec l'agence de l'eau (à titre indicatif, le programme d'assainissement 1998-2001 était doté de 392 millions de francs, dont 145 millions en provenance de l'agence de l'eau). Au total, la politique d'assainissement entre 1997 et 2003 s'est chiffrée à 500 millions de francs (un peu plus de 76.000 euros). Le coût de fonctionnement a été financé par la taxe d'assainissement commune aux trois communes, qui est passée de 4,55 francs/m3 (soit 0,69 euros) en 1998 à 7,02 francs/m3 (soit 1,07 euro) fin 2003. La gestion des équipements relève à présent de chaque commune selon son propre mode de gestion : à Bayonne les services de la ville ; à Biarritz une concession à la Lyonnaise des eaux ; à Anglet l'affermage.
Les autres contributeurs financiers sont l'Etat, l'Europe, le conseil régional, le conseil général et l'agence de l'eau Adour Garonne. Cette dernière, ainsi que le conseil général et la Diren, ont également apporté leur expertise technique. Il y a aujourd'hui un début d'échange transfrontalier en matière de politique d'assainissement (BAB- Guipuzcoa). "L'Espagne a un énorme retard qu'elle est en train de combler de façon spectaculaire."
Pour quels résultats...
Les principaux atouts de la communauté pour mener à bien cette vaste opération de remise à plat de sa politique d'assainissement ont été :
- une conscience aiguë du problème qui a favorisé l'adhésion de tous les acteurs et une forte volonté politique à préserver l'environnement et le patrimoine local ;
- une politique d'information et de communication avec le public très soutenue, qui s'est traduite par un fort impact de la charte d'environnement et de développement durable ;
- un dialogue permanent avec les associations ;
- un suivi régulier des appels d'offre et un service technique compétent ;
- la capacité à mobiliser les financements ;
- une coopération efficace entre élus et services techniques.
Pourtant, on observe encore de mauvais résultats sur les plages du nord d'Anglet, qui sont proches de l'estuaire de l'Adour. Cela pose la question du traitement des effluents en amont de l'Adour et donc de la nécessité de se saisir de ce problème avec les territoires voisins. Une harmonisation de la politique d'assainissement avec les autres communes du littoral et de l'arrière-pays est en effet indispensable : "Un début de démarche dans ce sens est en cours avec le syndicat de communes des eaux de la Nive, mais à ce jour rien n'a démarré avec Saint-Jean-de-Luz." Par ailleurs, il existe encore des limites techniques au traitement des boues d'épuration et à l'analyse en temps réel de la qualité de l'eau et il serait nécessaire de développer une synergie entre les services techniques des différentes communes.
Même si les élus ont constaté un niveau d'exigence accru de la part des habitants, ce programme a amélioré leur connaissance du public et des associations. L'intercommunalité a permis aussi d'élaborer une vision commune du traitement des problèmes, de rendre l'action plus efficace et cohérente et même d'envisager une coopération avec le voisin espagnol, lui aussi concerné par ces questions. Cette opération pourrait être suivie par un projet d'assainissement, en amont, avec les petites communes qui bordent la Nive. Un syndicat de rivière a été créé, suivi par la mise en place d'un contrat de rivière.
Et aujourd'hui ?
"Il faut mettre davantage l'accent sur les déchets flottants et les hydrocarbures (dégazage) et travailler en liaison avec les autres territoires pour mieux valoriser les efforts : l'Adour, la Nive, Saint-Jean-de-Luz, l'Espagne".
Christine Wolf, consultante.
Le conseil des élus
"Il est important d'obtenir un diagnostic territorial de qualité, de travailler en concertation avec l'ensemble des acteurs concernés, en l'occurrence ceux de l'environnement, de se doter d'une assistance à maîtrise d'ouvrage qui permette d'assurer un suivi financier rigoureux et un suivi précis du calendrier de réalisations. Il faut enfin évaluer les actions."
Communauté d'agglomération de Bayonne Anglet Biarritz
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Michel Veunac
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