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Social - Explorer plus avant les territoires de la pauvreté

Alors que le Premier ministre promet "des propositions d'expérimentation" pour "apporter des solutions locales" aux personnes en situation de précarité, l'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale rappelle l'ampleur de cette pauvreté et insiste sur sa dimension territoriale.

La pauvreté touchait entre 3,7 millions et 7 millions de personnes en 2003, selon le quatrième rapport de l'Observatoire national de la pauvreté et de l'exclusion sociale remis mercredi 22 février au gouvernement, au moment où le Premier ministre promet de nouvelles "propositions" contre l'exclusion.
Plus précisément, 3,69 millions de personnes vivaient sous le seuil de pauvreté fixé à 50% du revenu médian (soit 645 euros par mois pour une personne seule), contre 3,55 millions en 2001. En relevant ce seuil à 60% du revenu médian, niveau utilisé pour les comparaisons européennes (soit 774 euros par mois), le nombre de "pauvres" double, s'établissant à 7,015 millions en 2003. Les personnes seules, les femmes seules avec enfant(s) et les moins de 25 ans sont "surreprésentés" parmi les pauvres, constate le rapport qui pressent également "une possible remontée de la pauvreté des personnes âgées, notamment lorsqu'elles sont seules".
Même si l'Observatoire n'a pas pu prendre en compte l'impact de la récente baisse du chômage sur l'évolution de la pauvreté, il met l'accent sur les "relations complexes entre emploi et pauvreté" : chômage ne signifie pas forcément pauvreté et, inversement, "l'emploi ne protège pas à lui seul de la pauvreté". Il rejoint ainsi les diverses analyses récentes relatives aux "travailleurs pauvres" et à la perte de droits connexes lors du retour à l'emploi.

 

"Apporter des solutions locales"

"Au-delà de la seule problématique des gains financiers du retour à l'emploi, c'est sur la mise en place de dispositifs permettant un accompagnement personnalisé global que repose l'insertion professionnelle des personnes en difficulté", ajoute le rapport qui inclut des facteurs très concrets tels que les problèmes de transports ou de garde d'enfant.
S'intéressant aux droits fondamentaux des personnes en situation de pauvreté, l'Observatoire met l'accent sur les "privations et contraintes multiples" pesant sur ces populations, tant en termes de logement que de santé ou d'alimentation. En matière de santé, il relève "le rôle très important de la CMU complémentaire" pour l'accès aux soins des personnes pauvres et regrette qu'un nombre encore élevé de personnes en soient encore dépourvues.
Ce rapport a été remis à la ministre déléguée à la Cohésion sociale, Catherine Vautrin, qui a rappelé à cette occasion l'adoption du plan de retour à l'emploi des bénéficiaires de minima sociaux avec notamment, à la clef, une "prime de retour à l'emploi" de 1.000 euros. "Dans quelques jours, je ferai des propositions d'expérimentation qui permettront d'apporter des solutions locales, concrètes et rapides à tous ceux qui souffrent de la pauvreté", a pour sa part déclaré Dominique de Villepin le 21 février à l'Assemblée nationale. On n'en sait pas plus pour le moment sur le contenu de ces expérimentations ou de cette approche "locale".

 

D'un territoire à l'autre?

L'Observatoire a en tout cas choisi de consacrer l'un des trois volets de son rapport à la dimension locale des phénomènes de pauvreté. "Non seulement les taux de pauvreté varient fortement sur l'ensemble du territoire mais, surtout, les formes territoriales de pauvreté ne sont pas identiques", insistent les auteurs, qui analysent les différences significatives existant entre "la pauvreté des zones industrielles en déclin, celle des zones rurales enclavées, celle des centres-ville des villes moyennes, de la périphérie des grandes métropoles ou celle des départements d'outre-mer".
De même, dans un contexte de décentralisation des politiques sociales et de leurs instruments, les réponses de proximité apportées pour lutter contre la pauvreté varient elles aussi considérablement d?un territoire à l?autre.
Le rapport met toutefois l'accent sur la faiblesse des données disponibles au niveau local et ce, malgré tous les efforts accomplis dans ce domaine et les obligations de "diagnostic territorial". L'Observatoire y voit au moins trois raisons : les données infradépartementales ne sont pas toujours disponibles, les territoires de l?action publique diffèrent d'une politique publique à l'autre et "certaines données considérées comme sensibles sont quasiment impossibles à mobiliser localement" (à l'image des données administratives relatives au surendettement ou à l'état du logement). Mieux maîtriser et traiter les mécanismes d'entrée et de sortie de la pauvreté devra par conséquent passer en premier lieu par une meilleure connaissance et compréhension des contextes territoriaux, insiste l'Observatoire.

 

C. Mallet

 

 

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