Foncier industriel : renforcer le dialogue entre investisseurs, industriels et collectivités

Les intérêts parfois contradictoires entre les acteurs de l'immobilier, les collectivités et les industriels ne facilitent pas la bonne compréhension des besoins de ces derniers, au moment où le foncier se fait rare, constate un rapport de La Fabrique de l'industrie. Celui-ci appelle à mettre en place un "dispositif éprouvé de gouvernance du foncier" mais aussi, au sein des collectivités, à "systématiser" les collaborations entre les services économiques et d’urbanisme.

Alors que, dans son rapport sur le foncier industriel, le préfet Rollon Mouchel-Blaisot le 25 juillet 2023 estimait que l’impératif de réindustrialisation imposait de trouver 22.000 hectares à horizon 2030 (voir notre article du 26 juillet 2023), les besoins fonciers des entreprises "ne sont pas réductibles à des mètres carrés". C'est ce que souligne la Fabrique de l'industrie dans un rapport intitulé "Foncier industriel et stratégies publiques locales : une articulation imparfaite".

Entre octobre 2021 et juillet 2022, les auteurs ont mené une série d'entretiens individuels auprès de dirigeants d’entreprises de toutes tailles, de collectivités territoriales, d’aménageurs, de promoteurs et d’investisseurs, au sein de trois territoires urbains : deux situés dans la métropole de Paris (Est Ensemble et Boucle Nord de Seine) et un dans la région Auvergne-Rhône-Alpes (Valence Romans Agglo). "Loin de se préoccuper uniquement de la charge foncière à payer, les entreprises productives choisissent majoritairement un lieu d’implantation en fonction de sa proximité avec leurs clients et avec leurs sources d’approvisionnement, et en fonction de son accessibilité, notamment pour les collaborateurs", relèvent-ils. Or l'offre foncière doit répondre à des contraintes spécifiques, comme la nécessité de "dalles solides" pour pouvoir accueillir des machines lourdes, mentionnent-ils. Seulement, collectivités et acteurs de l'immobilier ne sont pas forcément au fait de ces besoins. Et les investisseurs sont parfois dans une quête de rentabilité déconnectée des besoins de l'entreprise. D'où la nécessité d'un bon dialogue dans les négociations préalables.

"Urbanisme transitoire permanent"

Le rapport constate à cet égard plusieurs freins. "Au sein des collectivités locales, les acteurs des services économiques ne collaborent pas suffisamment avec les acteurs des services d’urbanisme et d’aménagement, ce qui explique la méconnaissance par ces derniers des besoins fonciers et immobiliers des entreprises et leur manque d’anticipation pour les accueillir." Les auteurs déplorent par ailleurs la multiplication des acteurs intermédiaires qui "distend les relations entre collectivités locales et entreprises et participe aux malentendus et aux incompréhensions".

Ils constatent que dans les trois territoires étudiés, aucun ne dispose "d’un dispositif éprouvé de gouvernance du foncier et de l’immobilier qui intègre toutes les différentes 'parties prenantes', leurs préoccupations et leurs stratégies". Ils suggèrent de mettre en place un "urbanisme transitoire permanent" à même de tester l'implantation de nouvelles activités, "avec un portage économique par la collectivité ou un acteur intermédiaire, sur un temps long". "Cela reviendrait à sanctuariser un foncier en disponibilité permanente", précisent-ils. Les auteurs suggèrent aussi de "systématiser", au sein des collectivités locales, "les collaborations entre les acteurs des services économiques et d’urbanisme".