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Emploi / Formation - Fonction publique : 12 propositions pour sortir l'apprentissage de la marginalité

Le gouvernement veut développer l'apprentissage, y compris dans la fonction publique. Un rapport très attendu, remis le 20 mai au Premier ministre, fournit 12 pistes pour y parvenir. Il recommande notamment d'ouvrir aux apprentis les recrutements sans concours au bas de la catégorie C.

Dans un rapport qu'il a remis le 20 mai au Premier ministre, Jacky Richard, vice-président de la section du rapport et des études du Conseil d'Etat, fait 12 propositions pour "développer et pérenniser l'apprentissage dans la fonction publique". L'ancien directeur général de l'administration et de la fonction publique avait pour mission de faciliter le recrutement par l'Etat de 4.000 apprentis en septembre prochain et de 6.000 autres à la rentrée 2016, pour parvenir à terme à un total, donc, de 10.000 apprentis dans la fonction publique d'Etat (contre seulement 700 en 2014). Le président de la République avait fixé cet objectif lors de la grande conférence sociale de juillet 2014.
Le conseiller d'Etat n'en oublie pas pour autant les deux autres fonctions publiques (hospitalière et territoriale), qui sont dotées d'un potentiel important de recrutement d'apprentis. Selon les représentants des employeurs territoriaux, les collectivités pourraient par exemple doubler le nombre des places qu'elles réservent aux apprentis, qui s'élève aujourd'hui à 10.000. Hôpitaux et collectivités sont donc concernés, comme l'Etat, par le plan de Jacky Richard en faveur de l'apprentissage dans le secteur public.

Aménager les concours externes

Acteur clé de la réussite de la formation en alternance, les maîtres d'apprentissage doivent faire l'objet d'une réelle reconnaissance, prévoit ce plan. Ils devraient bénéficier de l'aménagement de leur temps de travail et pouvoir suivre une formation spécifique. En outre, une attestation de compétences pourrait être délivrée aux plus expérimentés. Elle serait prise en compte dans le déroulement de carrière et dans le cadre de la validation des acquis de l’expérience (VAE). Les maîtres d'apprentissage devraient aussi être récompensés financièrement en bénéficiant par exemple de la nouvelle indemnité mise en place par décret en mai 2014, qui va progressivement remplacer, d'abord à l'Etat, la prime de fonctions et de résultats. Pour le haut fonctionnaire, cette option serait plus adaptée que l'attribution de la nouvelle bonification indiciaire (NBI) actuellement utilisée par les collectivités. Il est aussi recommandé aux DRH de mobiliser les différentes formes d'avancement de carrière.
Par ailleurs, il convient d'ouvrir en faveur des jeunes de réelles perspectives au terme de leur contrat d'apprentissage dans la fonction publique. Il y aurait en ce domaine beaucoup à faire. Car le jeune en fin de contrat n'a aucune certitude d'être embauché par la structure qui l'a accueilli. Et s'il passe un concours de la fonction publique, il ne tire guère d'avantages de son expérience d'apprenti lorsque les épreuves demeurent de type académique. La mission formule donc plusieurs recommandations. D'abord, les jeunes apprentis auraient intérêt à pouvoir préparer les concours de la fonction publique, par exemple dans les instituts de préparation à l'administration générale (IPAG). Ensuite, le conseiller d'Etat préconise un aménagement des concours externes pour créer, dans ce cadre, des modalités spécifiques de concours (quotas ou épreuves spéciales) destinées aux personnes ayant suivi une formation en alternance.

Refonte du Pacte

Enfin, la mission recommande d'"orienter une partie des apprentis vers les recrutements sans concours dans certains corps de catégorie C de la fonction publique". Cela nécessite selon elle de revoir les objectifs et les modalités du parcours d’accès aux carrières de la fonction publique territoriale, hospitalière et de l’Etat (Pacte), créé il y a dix ans pour favoriser le recrutement sans concours de jeunes sans qualification. Sinon, le dispositif serait concurrent de l'apprentissage. Le Pacte serait ainsi réformé pour faciliter l'accès à la catégorie B pour des jeunes titulaires d'un BEP ou CAP, voire l'accès à la catégorie A pour les détenteurs du seul baccalauréat.
Le gouvernement "étudie avec intérêt" ces propositions "dans la perspective de créer dans les prochains mois une nouvelle voie d’accès à la fonction publique, ouverte aux jeunes sur critères sociaux ou de qualification", a indiqué Matignon dans un communiqué. Le principe de cette nouvelle voie d'accès a été décidée lors du comité interministériel de lutte contre les discriminations, qui s'est tenu le 6 mars dernier (voir notre article du 11 mai 2015).
Accessible aux jeunes jusqu'à 25 ans, l'apprentissage est une formation initiale qui alterne cours théoriques et périodes en entreprise ou administrations. Dans la fonction publique territoriale, la moitié des apprentis préparent le CAP ou le BEP, alors qu'un quart prépare un diplôme d’études supérieures. On trouve les apprentis territoriaux principalement dans les spécialités de l'aménagement paysager et du travail social.