Achat public - Implantation territoriale d'un candidat : une spécificité dans le domaine sanitaire
Dans un arrêt du 7 mars 2018, le Conseil d’Etat a tranché une affaire relative à la localisation d’un laboratoire d’analyse biologique candidat à un marché public d’examen de biologie médicale et de transport des prélèvements vers le lieu d’analyse. Il a également statué sur la méthode de notation retenue par l’acheteur public.
En l’espèce, le centre hospitalier de Péronne avait lancé un appel d’offres ouvert en vue de la passation d’un "marché relatif à l’externalisation des examens de biologie médicale et du transport de prélèvements vers le lieu des analyses".
Candidate évincée, la société Biologie Nord Unilabs a saisi le tribunal administratif (TA) d’Amiens d’une demande d’annulation de la procédure. Le juge du référé précontractuel ayant fait droit à sa demande, le centre hospitalier et la société Oxabio, attributaire du marché, ont saisi le Conseil d’Etat d’un pourvoi en cassation.
Comparaison géographique uniquement avec les autres candidats
Le TA d’Amiens avait annulé la procédure de passation, estimant que l’offre de la société Oxabio était irrégulière et aurait dû être éliminée. Il a fondé son raisonnement sur les articles L. 6211-16 et R. 6211-12 du code de la santé publique. Le premier prévoit qu’un établissement de santé doit choisir un laboratoire implanté sur le même territoire que lui. Le second instaure quant à lui une dérogation, l’établissement de santé pouvant choisir un laboratoire d’un territoire limitrophe si ce laboratoire est plus proche que ceux situés dans le même territoire que l’établissement de santé.
Suite à une comparaison des distances entre le centre hospitalier et d’autres laboratoires, le juge du référé précontractuel avait estimé que l’offre de la société retenue était irrégulière car il existait d’autres laboratoires, qui n’avaient pas candidaté au marché, plus près du centre hospitalier de Péronne et sur son territoire. Le Conseil d’Etat a toutefois rejeté cette analyse, considérant que seuls les laboratoires du même territoire ayant candidaté au marché en litige devaient faire l’objet d’une comparaison.
La haute juridiction administrative a donc annulé l’ordonnance du TA d’Amiens.
Une méthode de notation irrégulière
Sur le fond, les juges de cassation ont toutefois annulé la procédure de passation, la méthode de notation retenue par le centre hospitalier n’étant pas régulière. En effet, le critère de sélection "offre financière" était composé de deux sous-critères qui ne permettaient pas une mise en concurrence loyale. Le premier sous-critère reposait sur l’utilisation du "plateau technique du centre hospitalier". Cette utilisation étant facultative, le Conseil d’Etat a considéré qu’un tel sous-critère ne pouvait être régulièrement retenu pour apprécier l’offre financière des candidats. Le second sous-critère, relatif à la "valeur des actes non cotés à la nomenclature des actes de biologie médicales", consistait pour sa part, dans le cas où un candidat proposerait d’effectuer cette prestation gratuitement, à "attribuer une note nulle à tous les candidats qui proposeraient une facturation, quel qu’en soit le montant". Le Conseil d’Etat a donc annulé la procédure de passation de ce marché.
Référence : CE, 7 mars 2018, n° 415675