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Isolement social et résidentiel des aînés : quelques repères

Quatre personnes âgées de plus de 75 ans sur dix vivent seules, une part plus élevée chez les femmes de cet âge – près d'une femme sur deux – et dans les villes de plus de 200.000 habitants. À cet isolement résidentiel, s'ajoutent des facteurs d'isolement social tels que la forte mobilité résidentielle, l'évolution des relations de voisinage ou encore la fracture numérique. À l'heure du confinement qui s'impose à tous, le Compas fait le point.

Si le "repli sur soi, sur notre cellule familiale" est actuellement de mise, induit par le confinement visant à freiner la propagation du Covid-19, le bureau d'études le Compas rappelle qui sont, d'un point de vue statistique, les personnes isolées. Premier critère : l'isolement dans les logements. Plus de 10,5 millions de personnes vivent seules en France aujourd'hui, contre 5,8 millions en 1990. Cela représentait 36% des ménages en 2016, alors que cette part était de 27% en 1990. 

43% des plus de 75 ans vivent seuls, davantage dans les grandes villes  

Près d'un quart de ces personnes vivant seules, soit 2,4 millions de personnes, ont plus de 75 ans. "C’est au sein des métropoles que l’isolement résidentiel des aînés est le plus fort", observe le Compas. Le taux de personnes âgées de plus de 75 ans vivant seules est ainsi de "47% à Marseille (taux le plus bas des villes de plus de 200.000 habitants) et jusqu’à 53% à Lille (taux le plus élevé)", contre 43% en moyenne nationale. Les personnes âgées isolées sont plus souvent des femmes : chez les personnes de plus de 75 ans, "près d’une femme âgée sur deux vit seule, contre un homme sur quatre". Une différence expliquée par "l’espérance de vie plus forte chez les femmes et la différence d’âge au sein des couples".  

"Isolement résidentiel et isolement social sont corrélés et augmentent avec l’âge", poursuit le bureau d'études. Du fait d'une forte mobilité résidentielle – "un tiers des logements sont occupés par des ménages emménagés depuis moins de 5 ans" -, "le rôle de 'veilleurs', endossé par le passé par le voisinage pour repérer des signes de fragilité chez les aînés, est aujourd’hui à reconsidérer". Accompagnant en particulier les centres communaux d'action sociale dans la réalisation de leur analyse des besoins sociaux, le Compas attire l'attention sur le fait que beaucoup d'aînés isolés ne sont pas inscrits sur le répertoire du plan Canicule ni repérés au titre d'une quelconque aide, "du fait d'une apparente autonomie". 

Un isolement renforcé par l'absence de voiture ou d'accès à internet  

Cette autonomie peut être réduite par le fait de ne pas être motorisé. La part de ménages n'ayant pas de voiture est de 23% pour les 75-79 ans et 44% pour les 80 ans et plus, contre 19% pour l'ensemble des ménages. "Les hommes âgés seuls possèdent plus souvent une voiture et feront donc plus facilement face à la situation de confinement actuelle que les femmes seules", ajoute le Compas. Alors que l'accès à internet apparaît ces dernières semaines comme encore plus indispensable qu'en temps normal, "la fracture numérique touche prioritairement les plus de 70 ans", rappelle enfin le bureau d'études, sur la base du baromètre du numérique 2019 du Crédoc. "Aujourd’hui plus que jamais, la notion de veille sociale prend tout son sens", conclut le directeur du Compas.  

À noter que, dans une étude publiée en septembre 2019, l'association Les Petits Frères des pauvres s'est intéressée à la "solitude ressentie" qui toucherait 4,6 millions de Français de 60 ans et plus, alors que 3,3 millions de personnes âgées seraient "en risque d'isolement relationnel". Parmi les conclusions de cette étude : "Les régions Centre-Val de Loire, Bourgogne-Franche-Comté et Nouvelle-Aquitaine, cumulent un fort ressenti de solitude et un risque d'isolement plus grand" ; et ce "ressenti de solitude" serait plus fort dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville et les petites agglomérations de 2.000 à 20.000 habitants.