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Jacques Mézard veut étendre le réseau de Maisons de services au public

Le ministre de la Cohésion des territoires a indiqué, mardi 10 octobre, vouloir étendre de façon "très notable" le réseau des quelque 1.150 Maisons de services au public. Et ce, afin de permettre à chaque usager d’être à moins d’un quart d’heure de l’une d’elles. L’Etat maintiendra dans les années à venir sa participation au budget de fonctionnement des maisons mais le ministre souhaite introduire une variable en fonction de la qualité des services rendus. Le CGET s’est vu confier l’élaboration d’un nouveau cahier des charges.

Permettre à chaque Français de se trouver à moins "d’un quart d’heure d’un point de contact mutualisé" de services publics d’ici à 2020 : c’est l’objectif fixé par Jacques Mézard, ministre de la Cohésion des territoires, le 10 octobre, à l’occasion des premières Rencontres des Maisons de services au public (MSAP), organisées dans la Cité de la mode et du design, à Paris. Ce qui implique une augmentation "notable, très notable" du nombre de Maisons de services au public.
Déployées au pas de charge l’an dernier, elles sont au nombre de 1.150 sur le territoire, regroupant en un lieu unique de nombreux opérateurs de services publics nationaux (Pôle emploi, CAF, Cnam, la Poste, GRDF…) ou locaux. 500 sont accueillies dans des bureaux de poste. Alors que les premières enquêtes montrent un très fort taux de satisfaction (98% chez celles qui sont accueillies dans les bureaux de poste), "nous devons aller plus loin", a dit le ministre. Les besoins et les objectifs chiffrés de ce nouveau déploiement seront connus au moment de la finalisation des schémas départementaux d’amélioration de l’accessibilité des services au public (SDAASAP) attendue "d’ici l’été 2018". Même si d’ores et déjà, des "tendances majeures" s’affirment dans les quartiers de la politique de la ville, les villes moyennes ou les territoires ruraux qui "souffrent de ce sentiment d’abandon". Les MSAP sont un des objectifs de la Conférence nationale des territoires (CNT) dont le prochain rendez-vous est fixé au 14 décembre 2017, a également précisé le ministre.

Un nouveau cahier des charges en 2018

Dans le même temps, l’Etat "continuera à apporter son soutien financier au budget de fonctionnement des Maisons de services au public". "Il le fera au moins jusqu’en 2020, en toute logique au-delà", a assuré le ministre. Aujourd’hui, l’Etat prend en charge un quart du budget de fonctionnement des maisons, avec un plafond de 15.000 euros. Les grands opérateurs, qui alimentent un fonds de financement, doublent la mise, le reste étant à la charge des collectivités. "Dans notre pays, les fractures territoriales ne sont pas seulement un sentiment, mais aussi une réalité. Souvent, la perte ou l’absence de services au public est une manifestations terrible de cette fracture", a souligné Jacques Mézard. Or selon lui, les MSAP sont "une des réponse à ces fractures". "Le réseau des MSAP a vocation à devenir l’un des points d’accès unique aux services en France."
Mais au-delà du maillage, le ministre - insistant sur le "service augmenté" qu’offrent les maisons -, veut s’assurer de la qualité des prestations. Il a ainsi demandé au Commissariat général à l’égalité des territoires (CGET), chargé de piloter le dispositif, de proposer un nouveau cahier des charges en 2018, "axé sur la qualité du service rendu". Le ministre souhaite aussi conditionner le financement des maisons aux résultats. Le cahier des charges permettra une "reconnaissance progressive" en fonction du niveau de service rendu. Et "les différents niveaux de services rendus auront ainsi des conséquences en matière de financement, qui deviendront également progressifs", a précisé le ministre.
Pour Jacques Mézard, les MSAP sont aussi un moyen d’adapter les services à la transition numérique. Face aux "transformations puissantes" que traverse le pays, personne ne doit être laissé "au bord du chemin". "Nous avons un devoir d’inclusion numérique", a-t-il développé. La dématérialisation des services implique le "bon débit pour tous en 2020", mais aussi un accompagnement de ceux "qui rencontrent des difficultés face aux documents et aux procédures administratives dématérialisées". A cet égard, il s’est dit "frappé par les qualités humaines et professionnelles des agents d’accueil" des maisons.
En un an, plus de deux millions de personnes ont franchi les portes d’une MSAP et 3 millions de démarches y ont été effectuées, a indiqué Gabrielle Gauthey, directrice des investissements et du développement local à la Caisse des Dépôts, chargée de l’animation du réseau. Huit demandes sur dix sont résolues par le premier niveau d’accompagnement. Et neuf usagers sur dix sont satisfaits.

Réfléchir à l'équilibre financier

Le commissaire général à l’égalité des territoires, Jean-Benoît Albertini, s’est réjoui de ce "second souffle" donné au réseau et a lui aussi insisté sur le besoin de "standards de qualité". "Nous ne sommes pas dans un dispositif bouche-trou de carence des services publics, une sorte de soin palliatif au risque de déprise, de relégation", a-t-il fait valoir.
La Poste a répondu à l’appel du ministre. "Nous sommes prêts à une extension ‘très notable’ du réseau", a rebondi son PDG, Philippe Wahl. "La Poste est prête à passer à la vitesse supérieure, à la fois en nombre de lieux et d’offres de services", a-t-il ajouté. "Les Maisons de services au public peuvent être un grand mouvement territorial." Mais il faut aussi "travailler sur l’appartenance".
Constatant chaque jour des fermetures de services publics, le défenseur des droits, Jacques Toubon, a alerté sur la nécessité pour les administrations de pérenniser des missions d’"accueil et d’information". Or, selon lui, les MSAP prouvent qu’il n’y a pas de fatalité à ce que les services publics soient moins présents, moins actifs, moins efficaces pour l’accès au droit". Il a cependant jugé qu’elles étaient encore "un peu trop diverses" et qu’il fallait tendre vers un "modèle unique". Le défenseur des droits se place dans un esprit "de coopération et de vigilance". Car si la dématérialisation des services publics constitue "un progrès", elle suppose "une condition" : "que ces progrès soient pour tous et qu’ils n'engendrent pas des laissés-pour-compte." Or, selon lui, un cinquième des usagers rencontrent des difficultés pour effectuer des opérations en ligne. "C’est la partie de la population - pas forcément la plus âgée - la plus démunie, en situation de précarité." Même si "l’illettrisme numérique n’est pas réservé à une toute petite minorité", a-t-il dit, prenant à témoin l’assistance sur la dématérialisation totale des renouvellements de cartes grises et de permis de conduire à partir du 1er novembre… Pour passer au mieux cette échéance, le ministère de l’Intérieur s’est engagé à installer un ensemble de points numériques afin d’aider les usagers : "C’est un exemple de la politique qu’il faut systématiquement mener." L’ancien ministre a proposé la création d’un "grand fonds national d’accompagnement" afin de financer de telles opérations.
Jacques Toubon a aussi rappelé l’existence de ses 480 délégués territoriaux dans tous les départements (ils seront environ 500 début 2018). Ces délégués sont déjà présents dans une soixantaine de MSAP. Seulement ils se heurtent à un "tout petit problème" : les maisons accueillies par la Poste leur réclament une participation financière. "Il faut régler cette affaire", a-t-il lancé. "J’ai compris le message", lui a répondu le PDG de la Poste.
Premier département à avoir signé son schéma départemental d’amélioration de l’accessibilité des services au public, l’Aude est l’un des pionniers dans le domaine des points mutualisés de services. Il possède désormais 14 MSAP, avec en moyenne une quinzaine d’opérateurs dans chacune d’elles. Dans le schéma départemental, "on a veillé à ce qu’on ait au moins une maison par intercommunalité", a indiqué le président du département, André Viola. "Je pense qu’on doit être dans les clous", a-t-il ajouté, eu égard à l’objectif d’accessibilité à moins d’un quart d’heure assigné par Jacques Mézard. Mais il a lui aussi souligné l’importance de l’accessibilité au numérique. Selon André Viola, si tout le monde avait accès à un ordinateur, le département enregistrerait 30% de demandes de RSA en plus ! "Les MSAP doivent être un lieu d’acculturation au numérique", a confirmé Gabrielle Gauthey. Mais elles doivent aussi s’ouvrir à d’autres services comme les "mobilités durables". "Les MSAP doivent être un centre névralgique pour un certain nombre de services auxquels nous pensons, devenir des lieux de vie, de sociabilité." Selon elle, il faut aussi "réfléchir à une petite évolution de leur modèle économique" pour trouver un équilibre…

 

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