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JO 2024 : le remodelage de la carte des sites inquiète la Seine-Saint-Denis

Crise économique oblige, les organisateurs des JO 2024 de Paris vont remodeler la carte des sites des Jeux olympiques et paralympiques, ce qui inquiète fortement les élus de Seine-Saint-Denis à qui un "héritage fort" a été promis.

La Seine-Saint-Denis est au coeur du projet olympique depuis le début, avec certains équipements destinés à rester et à se transformer pour ses résidents, avec des emplois à la clé. Or, en raison de la crise économique, les organisateurs des JO, qui escomptent de moindres recettes de la part des sponsors (1,1 milliard d'euros sont aujourd'hui fixés), ont décidé cet été de sabrer près de 400 millions pour pouvoir rester dans l'enveloppe du budget initial de 3,8 milliards d'euros.
Mais où réaliser les économies ? Quels bâtonnets du mikado retirer sans bousculer tout l'édifice et contenter tout le monde ? Le comité d'organisation (Cojo) a planché sur une nouvelle carte pendant l'été, cherchant des économies sur les sites provisoires dont il a la charge.
Deux piliers doivent rester : les "sites iconiques" comme Versailles, où se dérouleront les épreuves d'équitation, et "un ancrage très fort en Seine-Saint-Denis", explique le comité.

"L'ADN des Jeux"

"Je ne toucherai pas à l'ADN des Jeux", avait promis Tony Estanguet, le président de Paris 2024, pendant le confinement. Mais les premières pistes ont déjà fait pousser un coup de gueule aux élus du département qui craignent in fine d'être lésés.
"La Seine-Saint-Denis ne peut pas être la variable d'ajustement, et cela ne peut pas être un alibi au moment de la candidature", a protesté jeudi 10 septembre Stéphane Troussel, président PS du département, devant le Stade de France, aux côtés des maires de Saint-Denis, du Bourget et de Dugny.
Il en appelé à l'intervention de l'État, en particulier celle du Premier ministre, Jean Castex, fin connaisseur du dossier, puisqu'il était délégué interministériel aux JO avant de rejoindre Matignon.
Le maire de Saint-Denis, l'ex-député PS Mathieu Hanotin, est particulièrement préoccupé à l'idée que les épreuves de natation ne se déroulent plus dans le département. La natation - une des épreuves reines avec l'athlétisme - qui doit être accueillie dans un stade aquatique provisoire à Saint-Denis (équipement qui doit être ré-implanté ailleurs dans le département à l'issue des Jeux), pourrait partir tout à l'ouest : à l'Arena de la Défense (Nanterre, Hauts-de-Seine). Une option qualifiée de "sérieuse" par une source proche du dossier. En revanche, le centre aquatique à Saint-Denis, en dur et pérenne, où se dérouleront le water-polo et le plongeon, n'est pas concerné.

Un enjeu "moral"

"Heureusement qu'on a le Stade de France et qu'on ne peut pas le déplacer. Si on lui mettait des roulettes dessous, qu'est-ce qui pourrait se passer !", a ironisé Mathieu Hanotin.
Autre crainte des élus, le village des médias installé à Dugny, près du Bourget, pour être ensuite transformé en logements, commerces et écoles, et donc destiné à profiter aux habitants, va-t-il être réduit ?
En juillet, les nouveaux maires divers-droite du Bourget et de Dugny, ainsi que celui d'Aulnay-sous-Bois (aussi président de Terres d'envol, intercommunalité du nord-est de la Seine-Saint-Denis), ont écrit à Jean Castex pour l'"alerter". Dans ce courrier, daté du 30 juillet, ils rappellent qu'ils ont déjà accepté en 2018 une révision des sites, perdant au passage le badminton, tout en maintenant leurs financements de leur côté. "L'enjeu n'est pas que sportif ou économique. Il est moral et impacte l'avenir de notre territoire si souvent négligé dans le passé", écrivent-ils.
Un argument qui n'est pas entendu par tout le monde : "L'héritage des Jeux, il est d'abord immatériel, il ne concerne pas qu'un département", a lancé mardi Denis Masseglia, président du Comité national sportif et olympique français (CNOSF), invité à réagir sur les craintes des élus séquano-dionysiens. Stéphane Troussel s'est dit "ouvert à discuter de tout ce qu'il pourrait y avoir de superflu, y compris dans l'événementiel".
D'autres pistes d'économies sont à l'étude, comme une mutualisation des transports pour accéder aux sites.
Rien n'est encore décidé, jure le comité d'organisation, mais cela sera tranché vite, "avant la mi-décembre". Un conseil d'administration du comité se tient fin septembre et un bureau le 15 septembre.