La Bourgogne forme un vivier de secrétaires de mairie remplaçants

La délégation CNFPT et deux centres de gestion de Bourgogne, en partenariat avec la région, viennent de former trente demandeurs d'emploi aux fonctions de secrétaire de mairie. Objectif : faire face aux difficultés de remplacement dans les communes rurales. Premier bilan de cette expérience pilote.

Communes rurales cherchent désespérément secrétaires de mairie expérimentés et opérationnels de suite... Selon une enquête de l'Observatoire de la fonction publique territoriale, d'ici à 2012, plus de la moitié des secrétaires de mairie partiront en retraite. Les difficultés de remplacement sont déjà réelles, tant pour des emplois permanents que ponctuellement. S'inspirant d'une expérience menée depuis plusieurs années en Bretagne, la région Bourgogne a signé, le 9 octobre dernier, une convention de partenariat avec la délégation CNFPT de Bourgogne et les centres de gestion (CDG) de Côte-d'Or, de la Nièvre, de l'Yonne et de Saône-et-Loire, en vue de former des demandeurs d'emploi aux fonctions de secrétaire de mairie.
"Nous disposons déjà d'un service de mise à disposition pour assurer le remplacement d'agents territoriaux en vacances, en congés maladie ou maternité, explique Vivianne Pugnet, directrice du CDG de Côte-d'Or. Mais remplacer au pied levé des secrétaires de mairie, employés souvent à temps non complet dans des petites communes situées hors de l'agglomération dijonnaise, devient une mission particulièrement délicate." D'autant qu'il faut trouver des personnes aguerries, rompues à la diversité des tâches et à la complexité de la réglementation des collectivités locales. Dans cette fonction polyvalente, on est tout à la fois comptable, juriste, assistante sociale, écrivain public, collaborateur d'élu...

Mobilité et motivation des candidats

Le travail de sélection des candidats, réalisé avec l'ANPE, a donc constitué une étape décisive : réunions d'information, entretiens, stage d'immersion de 15 jours en mairie pour confronter réalité du métier et attentes des candidats. Au final, le CDG de Saône-et-Loire a retenu quinze stagiaires parmi les quatre-vingt demandeurs d'emploi susceptibles d'avoir le profil et un groupe équivalent a été constitué en Côte-d'Or. Des femmes uniquement, de tous âges. Conditions requises : avoir un niveau bac+2 minimum, ne pas être allergique aux chiffres et posséder permis de conduire et véhicule. "L'important, c'est aussi la motivation des candidats pour aller travailler dans des mairies de campagne ; il faut savoir faire preuve d'autonomie, de diplomatie et de facilité d'adaptation", souligne Marc Zimmermann, directeur du CDG de Saône-et-Loire.
De septembre à décembre 2003, les 30 stagiaires ont suivi une formation de 400 heures, alternant cours théoriques dispensés par le CNFPT (finances locales, urbanisme, archives, état civil, aide sociale, marchés publics...) et stages dans des communes, encadrés par des secrétaires de mairie tuteurs. "Aucun abandon n'a été enregistré", note Evelyne Charpentier, du CNFPT Bourgogne.
Le conseil régional de Bourgogne a pris en charge le financement de la formation (31.382 euros) ainsi que le remboursement des coûts de déplacement et de restauration des stagiaires. Celles-ci percevaient une rémunération, via les Assedic ou le Cnasea.

Comme une agence d'intérim

Un mois après la fin de cette formation express, quid des trente stagiaires ? En Saône-et-Loire, sept effectuent des remplacements et huit sont encore en attente. Le directeur du CDG compte néanmoins sur le bouche-à-oreille entre collectivités pour leur trouver rapidement des vacations. Le CDG de Côte-d'Or a, lui, profité du salon Cité 21 réunissant plus de 400 maires du département pour expliquer le dispositif. Parmi les quinze nouvelles formées, neuf sont en poste sur des remplacements et trois le seront prochainement (l'une d'elle a même été recrutée à mi-temps comme agent administratif), deux autres préparent le concours d'attaché et une personne est à la recherche d'un premier contrat. "Ce sont les stagiaires domiciliées dans le Grand Dijon qui ont du mal à trouver un poste alors qu'on n'arrive pas à satisfaire toutes les demandes en zone rurale", remarque Vivianne Pugnet.
Pour celles qui ont investi dans cette formation du temps, de l'énergie et l'espoir d'un emploi, n'est-ce pas un peu frustrant de pointer toujours au chômage dans l'attente de propositions ? "On a toujours joué carte sur table", répondent d'une même voix les partenaires de l'opération. "Nous ne nous sommes pas engagé à leur garantir un emploi, seulement à les intégrer dans notre vivier de remplaçants vacataires et à leur faciliter l'accès vers la fonction publique territoriale", explique Marc Zimmermann. "Le centre de gestion se positionne comme une agence d'intérim", résume Vivianne Pugnet.

Emmanuelle Yohana / EVS Conseil pour Localtis

"L'objectif est que les remplaçants puissent se débrouiller seuls une fois en poste"

Evelyne Charpentier est responsable de la formation des secrétaires de mairie à la délégation CNFPT Bourgogne.

Deux cents heures de sessions théoriques et deux cents heures de stages pratiques, est-ce suffisant pour former des demandeurs d'emploi amenés à remplacer au pied levé des secrétaires de mairie ?

L'objectif n'était pas d'en faire des spécialistes mais de les initier, à travers une dizaine de modules, à toutes les activités d'un secrétaire de mairie pour pouvoir se débrouiller seul une fois en poste. Cette culture territoriale est déjà un atout précieux par rapport à l'absence totale de formation de la majorité des vacataires qui effectuaient les remplacements jusqu'à présent.
De plus, les stagiaires peuvent s'appuyer sur les contacts pris lors de leur stage en collectivité et solliciter en cas de besoin les formateurs qui ont laissé leurs coordonnées.

Au-delà de cette formation, le CNFPT a-t-il facilité la préparation aux concours de la fonction publique territoriale pour ces trente stagiaires ?

Le CNFPT leur a juste fourni des manuels de préparation au concours de rédacteur territorial. Mais la formation reçue constitue également une première base de connaissances en vue de passer les concours de la fonction publique territoriale.

Quel bilan tirez-vous de cette opération ?

Clairement, le bilan est très positif, pour les centres de gestion, les communes rurales comme les stagiaires. La plupart des personnes qui ont suivi la formation de secrétaire de mairie effectuent aujourd'hui des remplacements. Le dispositif est encore en rodage, mais va sans doute monter en puissance dès que les maires auront un retour sur ces premières vacations.

Est-il envisagé de renouveler cette formation pour de nouveaux demandeurs d'emploi ?

Nous allons d'abord attendre d'avoir un peu de recul sur la situation des 30 stagiaires formées, et analyser avec les centres de gestion les besoins non satisfaits quant aux remplacements de secrétaire de mairie dans les communes rurales de la région. D'ores et déjà, la Côte-d'Or souhaite former de nouveaux secrétaires de mairie remplaçants mais en ciblant davantage sur des stagiaires prêts à travailler en zone rurale. Les centres de gestion de l'Yonne et de la Nièvre ont signé la convention de partenariat en octobre dernier, mais n'avaient pas encore ressenti le besoin de former un bataillon de secrétaires de mairie remplaçants. Ils pourraient s'associer à cette deuxième opération interdépartementale.

Pénurie de secrétaires de mairie : "La balle est dans le camp des élus !"

Christine Bressin, coprésidente du Syndicat national des secrétaires de mairie (SNSM), salue l'initiative prise en Bourgogne. Elle note néanmoins avec regret que de moins en moins de centres de gestion proposent un service de remplacement pour cette fonction.

"Face à la pénurie de secrétaires de mairie, nous ne pouvons qu'encourager ce genre d'initiative qui permet de former des secrétaires de mairie remplaçantes et les prépare à présenter les concours de la fonction publique territoriale. Car le métier de secrétaire de mairie couvre un champ d'actions très large et réclame de multiples compétences.
"Les difficultés de remplacement de secrétaires de mairie dans les communes rurales ne sont pas nouvelles. En revanche, nous constatons que de moins en moins de centres de gestion mettent en place un service de remplacement pour les secrétaires de mairie. Par exemple, en Maine-et-Loire, ce service n'existe plus depuis deux ans. Les secrétaires de mairie n'ont plus qu'à éviter de tomber malade ou d'avoir un accident de travail !
"Quant au recrutement de secrétaires de mairie titulaires, les petites communes ont réellement du mal à pourvoir légalement les postes depuis deux à trois ans. La balle est dans le camp des élus : ce n'est pas sérieux de se plaindre de ne pas trouver de personnel compétent quand on recrute au grade et au salaire le plus bas. Notre syndicat demande d'ailleurs régulièrement aux préfectures d'exercer leur contrôle de légalité sur les collectivités qui recrutent un agent administratif pour assurer les fonctions de secrétaires de mairie. Ce qui est illégal, rappelons-le."
Propos recueillis par E. Y.
Contact : SNSM, 05 57 42 96 99 ou snsma@free.fr

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