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Attractivité - La CCI de Paris met en garde contre la fuite des centres de décision

Le nouveau groupe Lafarge-Holcim qui aura la Suisse pour siège social illustre le phénomène de fuite des centres de décision français vers des horizons plus avantageux. Une "érosion" constatée par la chambre de commerce et d'industrie de Paris Ile-de-France (CCIP) qui appelle à un "traitement de choc". Elle pointe le poids de la fiscalité mais aussi l'instabilité réglementaire.

Au cours de l’été 2013, l’ancien ministre du Redressement productif Arnaud Montebourg lançait le logiciel Colbert 2.0. L’objectif était de permettre aux chefs d’entreprises expatriées de calculer les gains qu’ils auraient à tirer d’un retour en France. Depuis, l’arme de la relocalisation n’a toujours pas fait l’objet d’évaluation. Las, la fuite des centres de décision des grands groupes (sièges sociaux et autres services stratégiques comme les services financiers ou les ressources humaines) vers d’autres horizons se poursuit. D'EADS parti aux Pays-Bas (où le taux général d'imposition des sociétés est de 25,5% contre près de 65% en France), au nouveau groupe Lafarge-Holcim qui a choisi la Suisse, en passant par Solvay-Rhodia installé en Belgique : "On assiste à une érosion, non spectaculaire, souvent non visible mais bien réelle, de la substance de nos groupes - à travers la fuite pernicieuse – parfois partielle – de centres de décision", alerte la chambre de commerce et d’industrie Paris-Ile-de-France, dans une étude intitulée "Fuite des centres de décision, quelles réalités ?". "Il est urgent d’agir pour rétablir l’attractivité de nos territoires, insistent les auteurs, qui prescrivent "un traitement de choc". Le phénomène est suffisamment inquiétant pour que l'Assemblée ait décidé de s'en saisir à travers le thème plus général de "l'exil des forces vives de France", titre d'un rapport d'enquête publié le 8 octobre.
Certes, la France n’est pas le seul pays concerné, mais elle semble "particulièrement touchée". Les fusions y sont souvent le prélude à une future délocalisation, d'où l'émotion suscitée au printemps par l'affaire Alstom amenant le gouvernement à prendre un décret du 15 mai 2014 visant à protéger les secteurs stratégiques français.
Les auteurs analysent trois facteurs mondiaux à ces départs : la nouvelle vague de mondialisation renforcée par l’émergence des nouvelles technologies de l’information ("l’ère de l’internet a conduit au démantèlement de la chaîne de valeurs dans l’entreprise") ; la généralisation d’outils permettant à chaque groupe d’évaluer les avantages comparatifs de chaque Etat ; le durcissement des règles pour les hauts revenus depuis la crise de 2008. Mais la France a son propre talon d’Achille. L’étude comptabilise pas moins de sept facteurs défavorables : une instabilité réglementaire, une fiscalité confiscatoire sur les sociétés et les personnes physiques, un droit social "contraignant", une "diabolisation" des patrons, le phénomène d’internationalisation des sociétés et la rétrogradation de Paris en place financière de "seconde division".

Cercle vertueux de l’attractivité

En revanche, l’Hexagone a quelques atouts à faire valoir : un climat très favorable à la création de start-ups et une "marque France" toujours séduisante pour ce qui est des télécommunications, de l’aéronautique, du luxe ou des biotechnologies, une "formation des élites" reconnue, des infrastructures de transport plébiscitées.
Pour la CCIP, rapatrier les sièges des grands groupes participe d’un "cercle vertueux de l’attractivité". Au-delà des effets directs (poids économique, emploi, retombées fiscales), "la présence de centres de décision dans une métropole induit (…) un large spectre d’activités, le plus souvent à haute valeur ajoutée, allant des services aux entreprises (comptabilité, informatique, professions du chiffre et du droit…) jusqu’à la finance ou le tertiaire immobilier, en passant par l’hôtellerie-restauration ou le transport aérien". Dans ce cadre, l’Ile-de-France revêt un caractère "hautement stratégique" par l’effet d’entraînement sur les autres régions. Les 207.000 sociétés ayant leur siège en Ile-de-France emploient plus de 5 millions de salariés, dont la moitié en province.
Mais il ne suffit pas de se dire "pro-business". La CCIP demande des preuves : "une véritable rupture culturelle". S'inspirant du modèle hollandais, elle propose d’abaisser le taux de l’impôt sur les sociétés à 25%, de confirmer la suppression de la "taxe à 75%", de s’engager sur une stabilité réglementaire, ou encore de "définir des objectifs de place financière de niches faisant de Paris une place reconnue".
 

 

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