La charte de gouvernance bâtit une intercommunalité "douce" à Mulhouse

Une charte de gouvernance préserve les intérêts de la communauté de communes du Bassin potassique, au sein de la communauté d'agglomération de Mulhouse deux fois plus peuplée, qu'elle a rejoint. Un modus vivendi qui pourrait inciter d'autres EPCI, plus réticents, à s'agréger.

La signature d'une charte de gouvernance était, pour la communauté de communes du Bassin potassique (CCBP), une étape indispensable à franchir avant d'intégrer la Communauté d'agglomération de Mulhouse Sud Alsace (Camsa). Cette démarche originale d'autodissolution impliquait, selon elle, un minimum de garanties quant à une répartition "équitable" des sièges dans la Camsa élargie, la poursuite de ses actions territoriales, l'implantation d'équipements structurants, ou encore la gestion de l'après-mines, cas particulier à ce bassin en reconversion marqué par un siècle d'exploitation de la potasse.
Pour Jo Spiegel, président de la CCBP, le processus d'intégration a toujours respecté les "principes de liberté, de subsidiarité et de solidarité ". L'intercommunalité a validé mi-2003 le choix d'association avec la Camsa que lui recommandait - notamment pour des raisons financières - le cabinet KPMG, mandaté par la CCBP pour comparer ce scénario à ceux du statu quo, du maintien de la communauté de communes avec passage à la TPU, ou de la création d'une communauté d'agglomération spécifique. Chaque commune s'est prononcée sur la dissolution et dix sur onze ont dit oui. "Entre les délibérations de principe d'avant l'été et les décisions fermes de l'automne, le nombre de voix "pour" a augmenté au sein des conseils municipaux", observait fin octobre Jean-Marie Bockel, maire de Mulhouse et président de la Camsa, dont l'élargissement est devenu effectif le 1er janvier 2004.

Une "charte de bonne conduite" qui offre des garanties

Le contenu de la charte de gouvernance est précis. Selon son titre I "Respect des principes généraux", la Camsa reprend le personnel (21 salariés) de la communauté de communes du Bassin potassique et ses engagements juridiques, dont la mission d'insertion et de retour à l'emploi qui oeuvre dans la reconversion. Il cadre la gestion de l'après-mines, dont la convention des fonds européens pour l'Objectif 2. Le second chapitre "Projets nouveaux et extension des services" prévoit la poursuite ou l'extension au Bassin potassique des compétences de la Camsa : développement économique, aménagement du territoire, transport, voirie, etc. Illustration de son esprit, la charte stipule que le "service propreté urbaine de la Camsa veillera à ce que le niveau de service existant dans chaque commune actuellement soit rigoureusement préservé", ou qu'en assainissement, le "programme prévisionnel d'investissement des communes" soit respecté. La Camsa reprendra le versement d'une dotation de solidarité à chaque commune du Bassin potassique. La défunte CCBP y tenait particulièrement, la charte impose de réaliser à court terme deux équipements "structurants" : un centre nautique et une médiathèque.
Enfin, et c'est le point le plus souligné, objet du titre III "Représentation démocratique", Mulhouse accepte un nombre d'élus inférieur à son poids démographique. La ville-centre n'occupe que 35 des 93 sièges, alors qu'elle représente plus de 60% de la population de la communauté élargie.

Fédérer un vaste ensemble

A la fois "engagement programmatique et méthode de gouvernance" selon Jo Spiegel, cette "charte de bonne conduite" pourrait inciter d'autres groupements à rejoindre la CA de Mulhouse, de manière à lui donner la cohérence qui lui fait défaut pour l'heure. Héritage de l'histoire et des rivalités politiques, l'intercommunalité a longtemps marché de manière désordonnée à Mulhouse. Ce qui se ressent encore aujourd'hui : sur le périmètre du pays de la région mulhousienne se chevauchent pas moins d'une cinquantaine d'EPCI et syndicats, certains parmi ces derniers exerçant des fonctions-clés (transports en commun, incinération des déchets ménagers). Fédérer ce vaste ensemble dans la seule communauté d'agglomération, Jean-Marie Bockel y songe, sans vouloir "aller plus vite que la musique". Des mouvements souterrains commencent à s'observer. Au sein de la riche communauté de communes de l'Ile-Napoléon, qui abrite l'usine PSA et l'une des grosses zones commerciales de périphérie, le président Bernard Notter persiste dans le "non" et perçoit une "politique expansionniste" de la Camsa mulhousienne, mais son vice-président Bernard Hanser l'a désavoué fin 2003 et souhaite ouvrir le débat du rapprochement. Il n'est pas impossible que la charte de gouvernance du Bassin potassique ait été interprétée par des réticents comme la preuve d'une volonté de non-hégémonisme de Mulhouse. Un texte de même esprit a d'ailleurs été signé avec Reiningue, commune qui vient d'adhérer individuellement à la CA.

 

Christian Robischon / Innovapresse Strasbourg pour Localtis
 
 

"Un engagement de programme pour le Bassin potassique"


 

Jo Spiegel, président de la communauté de communes du Bassin potassique, dissoute, et désormais premier vice-président de la communauté d'agglomération de Mulhouse-Sud-Alsace, justifie le recours à la charte de gouvernance.

Pourquoi fallait-il une charte avant de se fondre dans la communauté d'agglomération de Mulhouse (Camsa) ?

Ce texte constitue un engagement de programme pour le Bassin potassique dans les prochaines années. Il contribuera à apporter plusieurs millions d'euros sur plusieurs années. Dans son esprit, il introduit pour notre territoire une autre manière d'être aidés, dans la proximité, sans attendre que le département ou la région se bougent à notre place. La charte est d'ailleurs reprise dans son intégralité dans le projet d'agglomération présenté fin 2003.

Le texte aura-t-il besoin d'être ajusté avec le temps ?

Il convient maintenant d'oeuvrer à sa traduction dans les faits, par la production d'un plan de référence pour toute la Camsa, sur une période de cinq ans environ. 2004 sera le temps de la réflexion et de la mise en place d'un mode de gouvernance : la Camsa passe de 40 à 93 élus, dont 24 vice-présidents. Pour le personnel de notre communauté de communes, il offre des évolutions de carrières. Ainsi, notre directeur général devient directeur général adjoint de la Camsa pour l'économie.

A vos yeux, attendre pour rejoindre la Camsa, c'était agir trop tard. Pourquoi ?

Il n'est pas acceptable que notre communauté d'agglomération ne se dote pas de l'organisation qui correspond à sa réalité, qu'elle ne puisse pas fonctionner comme ses homologues. Le moment est venu d'y oeuvrer. Il faut donner des arguments immédiats aux habitants et je continue à penser que dans dix ans, il sera trop tard pour construire l'agglomération, compte tenu de la vitesse des mutations.


 


 Un territoire, plusieurs périmètres


Dans la région mulhousienne, la communauté d'agglomération, le schéma de cohérence territoriale et le pays convergent lentement, mais pas encore complètement.

Communauté d'agglomération : seize communes

Avec l'adhésion de dix communes du Bassin potassique et celle individuelle de Reiningue, elle est passée le cinq à seize membres et de 123.000 à 172.000 habitants. Exemple de compétences : économie/emploi, environnement, propreté-collecte des déchets, déplacements, politique de la ville, services à la population (petite enfance, périscolaire, personnes âgées)

Scot et pays : trente-neuf communes

Le périmètre du schéma de cohérence territoriale (Scot) et celui du pays de la région mulhousienne ont fini par se confondre en 2003, au terme de plusieurs années d'efforts. Le diagnostic a été commun et les calendriers se rejoignent. Le plan d'aménagement et de développement durable (PADD) du Scot devrait être prêt cette année, à peu près en même temps que la charte de développement du pays.

Contrat d'agglomération : un trait d'union

Signé le 24 janvier 2004 pour un montant de 175 millions d'euros, le contrat d'agglomération de Mulhouse fixe les orientations d'avenir (attractivité économique, rayonnement européen, maîtrise de l'environnement...). Formellement, il touche seize communes, mais son élaboration s'est opérée sur la base du projet d'agglomération qui inclut les vingt-trois autres communes composant le pays. Il joue un rôle de trait d'union et prépare le terrain à des élargissements de la communauté d'agglomération.

Mulhouse Alsace agglomération

Nombre d'habitants :

280000

Nombre de communes :

39
2 avenue Pierre et Marie Curie
68 100 Mulhouse

Jo Spiegel

Mairie de Kingersheim

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