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Territoires - La Commission européenne consent plus de souplesse dans l'emploi des fonds régionaux

Le numérique ainsi que certains projets ferroviaires et portuaires pourront finalement bénéficier du concours de l'UE dans le cadre de la nouvelle programmation de la politique régionale pour 2014-2020. Le commissaire Hahn n'a pas été sourd aux demandes des élus locaux. Le détail sur ces modalités de financement.

Les régions et l'Etat se rapprochent un peu plus du but : investir 26 milliards d'euros de subventions régionales européennes entre 2014 et 2020, en matière d'emploi, infrastructures, innovation, ruralité et zones littorales. Le 8 août, une nouvelle étape a été franchie avec l'adoption, par la Commission européenne, du plan d'investissement des fonds européens préparé par les autorités françaises (voir ci-contre notre article du 26 août 2014).
Baptisé "accord de partenariat", ce travail, entamé en 2012, a été amendé à maintes reprises pour mettre l'accent sur la compétitivité et surtout convaincre la Commission du bien-fondé de certains projets initialement accueillis froidement par Bruxelles.

Compromis diplomatique

L'accord scellé a tous les attributs d'un compromis diplomatique cousu dans de la dentelle. Après d'intenses tractations, les régions pourront financer le déploiement du très haut débit grâce au Feder (Fonds européen de développement régional) afin de combler le manque d'investissements privés, dans un domaine où l'Hexagone fait figure de lanterne rouge.
"En l'absence d'intervention publique, la couverture de la France en très haut débit n'atteindra que 57% de la population, loin de l'objectif européen de 100% inscrit à l'agenda numérique 2020", indique le document.
Mais, pour prouver qu'elles mettent le cap sur l'innovation, les collectivités devront concentrer leurs investissements sur l'accès au très haut débit des PME, hôpitaux, centres de recherche, universités, assimilés à des "sites prioritaires d'intérêt économique et public".
Dans une circulaire, publiée le 31 juillet, sur les contrats de plan Etat-région, le Premier ministre, Manuel Valls, rappelle en outre la volonté française de concentrer l'effort sur le très haut débit, soutenu à la fois par le Feder et le programme des investissements d'avenir.
Les fonds Feader, que la France alloue traditionnellement au secteur agricole, sont également appelés à soutenir le secteur du numérique à la marge, à hauteur de 78 millions d'euros. Une possibilité que les régions concernées ont dû spécifier dans les programmes de développement rural adressés à la Commission au printemps.
Celle-ci espère aussi que les collectivités oseront se lancer dans un usage plus innovant des aides à la ruralité, désormais calibrées pour s'étendre au domaine des "instruments financiers". Plutôt que d'être versé sous forme de subvention, l'argent public est placé comme garantie adossée à des prêts avantageux dans le domaine agro-industriel.
Un accord avec la Commission, signé en juillet, prévoit que la Banque européenne d'investissement apporte son soutien technique aux régions, confrontées à la complexité des montages financiers.

Dérogations sur-mesure dans le ferroviaire

Le secteur des transports n'échappe pas à la logique de compromis trouvé avec la Commission européenne, qui cherche à diversifier l'emploi des fonds européens au profit de l'innovation, quitte à reléguer le développement du rail, auquel les élus tiennent pourtant. Le commissaire à la cohésion, Johannes Hahn, a toutefois accepté d'ouvrir une brèche dans sa doctrine, en tolérant le soutien européen aux investissements ferroviaires qui améliorent la liaison entre "les ports de dimension régionale" et l'arrière-pays dans les régions en transition.
Cette disposition permet à la région Languedoc-Roussillon de programmer un financement de 15 millions d'euros de Feder au profit des ports de Sète et de Port-la-Nouvelle, afin d'y développer des plateformes ferroviaires. La participation européenne représentera ainsi 25% à 30% du coût total du projet, justifié par les retombées économiques immédiates qu'il offrira.
Ce qui n'est pas le cas des études de faisabilité de la LGV Poitiers-Limoges. Cette étape, encore liminaire dans la construction incertaine de ce barreau ferroviaire, ne devrait pas être retenue par la Commission au rang des actions soutenues par le Feder.
La liaison TER entre Saintes et la Rochelle est en revanche mieux placée, car les autorités françaises ont défendu le besoin de modernisation et d'électrification de la ligne au nom de la "mobilité urbaine", pour répondre aux besoins des usagers picto-charentais qui l'empruntent au quotidien.

De nouveaux accords dès le mois d'octobre ?

Les prochains rendez-vous auront lieu cet automne, avec l'adoption, par la Commission européenne, des "programmes opérationnels", qui détaillent plus précisément les projets d'investissement région par région. Certains pourraient être endossés dès le mois d'octobre, la Commission européenne ayant déjà fait remonter ses remarques et demandes de corrections aux régions.
Celles-ci ont toutes adressé leurs programmes en temps et en heure, à l'exception des collectivités d'Outre-mer.