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La demande d'asile en France a progressé de 22% en 2018

L'Ofpra (Office français de protection des réfugiés et apatrides) publie un premier bilan de la demande d'asile en 2018. Avec 122.743 demandes (données provisoires) enregistrées l'an dernier, la hausse sur 2017 est de 22%. Le nombre de demandes se décompose en 113.322 premières demandes (dont 21.457 mineurs accompagnants, à ne pas confondre avec les mineurs isolés), 9.129 réexamens et 292 réouvertures. La progression enregistrée l'an dernier va à l'encontre de la tendance européenne, orientée à la baisse, même si l'ensemble des chiffres 2018 ne sont pas encore connus.

Le taux de protection reste inchangé

Cette progression s'explique principalement par la réduction drastique des admissions en Italie et par la réactivation concomitante de la route de l'Espagne. La France devient ainsi un pays de rebond ou un pays secondaire pour des demandeurs entrés par d'autres États européens (y compris par des pays comme l'Allemagne ou la Suède pour les réfugiés afghans). Les principaux pays d'origine des demandeurs d'asile sont l'Afghanistan (10.221), l'Albanie (8.261 demandes), la Géorgie (6.717), la Guinée (6.621) et la Côte d'Ivoire (5.256). En termes d'évolution, sont orientées à la baisse les demandes d'asile en provenance d'Haïti (-59% sur un an) et d'Albanie (-28%). En revanche, sont orientées à la hausse celles en provenance de Côte d'Ivoire (+45%), d'Afghanistan (+55%), de Guinée (+61%) et de Géorgie (+256%).

La nette progression des demandes enregistrées en 2018 ne s'est pas traduite pour autant par une hausse similaire des protections accordées. L'an dernier, un peu plus de 46.700 personnes (y compris les mineurs) ont ainsi été placées sous la protection de l'Ofpra au titre du statut de réfugié ou de la protection subsidiaire, soit une hausse de 9% par rapport à 2017. Pour sa part, le taux des protections accordées (décisions favorables) demeure inchangé : 27% à l'Ofpra et 36% en prenant en compte les décisions en appel de la Cour nationale du droit d'asile (CNDA).

Des délais de traitement ramenés de 142 à 112 jours

Pour parvenir à ce résultat, l'Office a pris l'an dernier près de 122.000 décisions, soit une progression de près de 6% sur un an, "ce qui constitue un nouveau seuil historique depuis que la quasi-totalité des demandeurs d'asile a droit à un entretien à l'Ofpra. S'y ajoutent plus de 2.600 personnes parmi celles entendues par l'Ofpra lors de ses missions à l'étranger et qui recevront une décision de protection de l'Office dès leur arrivée sur le territoire français".

Autre information fournie par l'Ofpra : la nette réduction des délais de traitement, passés d'une moyenne de 142 jours en 2017 à 112 jours l'an dernier. Grâce notamment à des moyens supplémentaires, l'Office a en effet engagé "une nouvelle et profonde réorganisation structurelle pour réduire les délais de convocation à l'entretien personnel entre le demandeur d'asile et l'officier de protection. Mise en œuvre depuis la fin 2018 pour 90% de la demande, cette réorganisation, qui s'appuie sur une programmation anticipée des prestations d'interprétariat au regard du niveau et de la nature de la demande d'asile enregistrée en guichet unique, réduira le délai de convocation après passage en guichet unique et préservera le temps absolument nécessaire à un examen de qualité de la demande d'asile, ainsi que les droits des demandeurs d'asile". L'objectif fixé par le chef de l'État est de parvenir à un délai moyen de 60 jours.

Des prévisions à revoir pour 2019 ?

S'ils ne sont pas véritablement une surprise, les chiffres publiés par l'Ofpra risquent néanmoins de relancer le débat sur la fiabilité des dotations budgétaires affectées à la gestion de la demande d'asile. Les chiffres du gouvernement ont en effet été contestés lors de l'examen, dans le cadre du projet de loi de finances pour 2019, des crédits de la mission "Immigration, asile et intégration". La commission des lois du Sénat a même rejeté ces crédits, en arguant d'hypothèses du gouvernement jugées peu fiables (voir nos articles ci-dessous des 7 et 29 novembre 2018).

Les rapporteurs au Sénat comme à l'Assemblée se montraient notamment sceptiques sur l'hypothèse du gouvernement d'une stabilisation de la demande d'asile en 2019. Celle-ci reposait alors sur le ralentissement de la croissance du nombre de demandeurs d'asile en 2017 (+17,5%) et sur une hausse plus ou moins similaire attendue en 2018 (sur la base d'une progression de 18,8% entre janvier et août 2018). Pour justifier la perspective d'une stabilisation en 2019, le gouvernement évoquait alors une baisse de la demande dans seize États membres de l'UE au deuxième trimestre 2018 qui "pourrait s'étendre à la France", l'engagement de la France dans une "politique volontariste de transfert des demandeurs d'asile sous procédure Dublin vers les pays les ayant accueillis en premier", ou encore le maintien à un niveau élevé des non-admissions aux frontières. Les 22% de hausse finalement constatés sur 2018 et le contexte international rendent aujourd'hui très incertaine l'hypothèse d'une stabilisation en 2019.

 

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