La loi de finances publiée après quelques réserves des Sages

La loi de finances pour 2019, qui a été publiée le 30 décembre, a été amputée de quelques-unes de ses dispositions, suite à leur censure, deux jours plus tôt, par le Conseil constitutionnel. Ce dernier a notamment retoqué des dispositions liées, d'une part, aux montants de plusieurs allocations en 2020 et, d'autre part, à l'information des collectivités territoriales sur les dotations qui leur sont allouées.

Le Conseil constitutionnel a validé "la quasi-totalité" du projet de loi de finances pour 2019, se sont félicités le 28 décembre, dans un communiqué, le ministre de l'Economie et des Finances, Bruno Le Maire et son collègue en charge de l'Action et des Comptes publics, Gérald Darmanin.
Après l'adoption du deuxième budget du quinquennat par le Parlement, le 20 décembre dernier, plus de soixante députés des groupes socialiste, LFI et GDR avaient déféré l'ensemble de ce texte devant la haute juridiction.
Dans la décision qu'elle a rendue le 28 décembre, elle "confirme la conformité de l'essentiel des principales dispositions du projet de loi" et estime que ce dernier est "sincère" sur le plan budgétaire, ont réagi les ministres de Bercy. Le budget 2019 donne donc au gouvernement "les moyens de mettre en œuvre ses choix clairs", ont-ils déclaré. Il s'agit notamment de "baisser la fiscalité pour tous les Français, avec notamment la suppression de la deuxième tranche de la taxe d’habitation pour 80% des contribuables", ou encore de "faire en sorte que le travail paie, avec notamment le plein effet de la réduction des cotisations chômage et maladie", ont précisé Bruno Le Maire et Gérald Darmanin.

Censure de l'évolution en 2020 de plusieurs allocations

Pour des raisons tenant au fond, le Conseil constitutionnel a toutefois censuré partiellement les dispositions d’évolution de gestion du revenu de solidarité active (RSA) en Guyane et à Mayotte, dont l'objet est de tenir compte des situations spécifiques des outre-mer. Il a seulement annulé la disposition portant la durée minimale de résidence d’un étranger en situation régulière en Guyane de 5 à 15 ans pour accéder au RSA (lire notre autre article de ce jour).
Par ailleurs, considérant qu'"elles ne trouvent pas leur place dans la loi de finances pour 2019", les Sages ont censuré les dispositions fixant des modalités dérogatoires d'évolution des montants de plusieurs allocations qui devaient s'appliquer en 2020. Il en va ainsi de la revalorisation de l’aide personnalisée au logement, de l’allocation de logement familiale et de l’allocation de logement sociale, que le projet de loi fixait par dérogation à 0,3 % au 1er octobre 2020. L'annulation de la revalorisation au 1er avril 2020 du montant forfaitaire de la prime d’activité et du montant maximal de sa bonification principale et la hausse de 0,3 % à la même date de l'allocation aux adultes handicapés subissent le même sort. "Ces dispositions ont vocation à être à nouveau soumises au Parlement dans le cadre des textes financiers pour 2020", a assuré Bercy aussitôt après la décision.

Dotations aux collectivités : l'Etat ne sera pas tenu de fournir des explications en cas de variation

Pour des raisons de procédure également, le Conseil constitutionnel a invalidé neuf mesures qui avaient été introduites lors de la discussion du texte en première lecture. Il s'agit en particulier de la possibilité pour les gestionnaires du domaine public portuaire d'instaurer une majoration de redevance en cas d'occupation irrégulière, de l'exonération au profit de certains agriculteurs du paiement de l'indemnité compensatoire de défrichement et de la modification du régime de l'autorisation de défrichement des terrains boisés, de l'élaboration par le gouvernement d'un rapport au Parlement dressant le bilan de la mise en œuvre du plan "préfectures nouvelle génération" - depuis juin 2015, celui-ci vise à recentrer le réseau préfectoral sur son cœur de métier, à simplifier les formalités et à développer les téléprocédures - ou encore de dispositions modifiant les règles d'établissement du budget du médiateur de l'énergie.
De même, le Conseil constitutionnel a considéré que la disposition prévoyant la publication par l'administration "des éléments d’information permettant d’expliquer les écarts et variations les plus importants, par rapport à l’année précédente, d’attributions individuelles des composantes de la dotation globale de fonctionnement" constitue un cavalier. Sous l'impulsion de la délégation aux collectivités territoriales et la décentralisation du Palais Bourbon, les députés avaient introduit en première lecture le principe de ces éléments d'information. L'objectif était de faciliter la compréhension par les collectivités des variations de leurs dotations. Un sujet hautement sensible depuis que, en avril 2018, près de la moitié des collectivités ont connu une baisse de leurs dotations, alors que la dotation globale de fonctionnement est stable dans son ensemble. Les modalités de mise en œuvre des éléments d'information avaient été modifiées en première lecture au Sénat, puis une nouvelle fois en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale. Dans la version définitive adoptée par le Parlement, l'administration disposait d'un délai de deux semaines pour procéder à leur publication.

Les règles de calcul des dotations sont "intelligibles"

Plusieurs dispositions, introduites en nouvelle lecture, ont aussi été censurées, au motif qu'elles ont été adoptées en méconnaissance de la règle de l'entonnoir. Parmi elles figurait la programmation d'un rapport du gouvernement au Parlement sur la mise en œuvre de la réforme des chambres de commerce et d’industrie.
Au total, les Sages ont balayé d'un revers de manche la plupart des critiques que l'opposition de gauche formulait à l'encontre du projet de loi de finances. Ils ont jugé en particulier que les dispositions de l'article 77 qui "déterminent les règles de calcul, pour 2019, de la dotation globale de fonctionnement et des variables d’ajustement des dotations associées", ne sont pas "inintelligibles". La haute juridiction a ainsi suivi l'avis du gouvernement, qui dans ses observations, estimait que ces modalités de calcul ne comportent "aucune ambiguïté". Les députés à l'origine du recours avaient estimé que "l'excessive complexité" des règles de répartition des dotations a pour effet de les rendre "inintelligibles" en particulier pour les représentants des petites communes, lesquels ne disposent "pas de service et d'expertise juridique". Ils n'ont pas eu plus de succès avec le reproche qu'ils formulaient au sujet de l'absence dans le projet de loi de "mesures correctives de rétablissement et d'augmentation des moyens budgétaires et fiscaux permettant de garantir la libre administration des collectivités territoriales".
Suite à la décision du Conseil constitutionnel, la loi de finances pour 2019 a été publiée au Journal officiel du 30 décembre. Localtis dressera dans une prochaine édition un panorama complet des dispositions de ce texte qui intéressent les collectivités territoriales.

Référence: Décision n° 2018-777 DC du 28 décembre 2018.
 

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