Archives

Offre de soins - La mission d'information de l'Assemblée pointe l'accroissement des inégalités d'accès aux soins

La mission d'information sur l'offre de soins sur l'ensemble du territoire a remis son rapport le 30 septembre. Adopté à l'unanimité des participants, ce document dresse un tableau plutôt sombre de la situation. La mission considère en effet que "malgré un niveau d'offre de soins encore globalement élevé, les inégalités d'accès aux soins s'accroissent". Cette situation pourrait même se détériorer dans les prochaines années, car "si aucune mesure n'est prise à court terme, ces difficultés s'aggraveront, du fait de la pénurie de professionnels de santé qui résulte d'une gestion très restrictive des numerus clausus dans les années 1980 et 1990".
Le rapport rappelle notamment l'ampleur des écarts entre départements dans la densité des professionnels de santé : de 1 à 2,5 pour les omnipraticiens, de 1 à 7,4 pour les spécialistes, de 1 à 4 pour les dentistes, de 1 à 7 pour les infirmiers libéraux... Il en résulte "des zones de véritable désertification médicale". Les différentes études réalisées par l'assurance maladie ou par l'Observatoire national de la démographie des professions de santé (ONDPS) convergent pour évaluer à environ 4 millions le nombre de personnes vivant dans des zones "en difficulté" ou "fragiles" au regard de l'offre de soins. Les départements affichant la plus forte densité de médecins libéraux ne sont pas pour autant à l'abri : certains d'entre eux sont en effet confrontés au nombre croissant de généralistes exerçant en secteur 2 (Paris constituant un cas particulier en la matière avec 43% d'omnipraticiens en secteur 2). Ces difficultés d'accès aux soins valent aussi pour le secteur hospitalier : selon un récent rapport sur les hôpitaux de proximité, 6% de la population française habiterait dans une commune située à plus de 40 minutes (soit 20 kilomètres) du service de chirurgie public ou privé le plus proche, et 450.000 personnes à plus de 50 minutes (soit 30 kilomètres).
La mission d'information se montre sévère sur l'action des pouvoirs publics, qui "ne disposent pas d'outils efficaces de régulation de l'offre de soins primaires". Parmi les faiblesses pointées par le rapport figurent notamment le cloisonnement du pilotage de l'offre de soins, le statut peu valorisé de la médecine générale de premier recours, un numerus clausus insuffisamment modulé, le manque de structuration de la filière universitaire de médecine générale ou encore le manque d'encadrement de l'accès au secteur 2. Les mesures incitatives qui se multiplient depuis plusieurs années ne trouvent pas davantage grâce aux yeux de la commission. Elles sont en effet jugées "complexes", fondées sur "des zonages instables et parfois peu pertinents" et constituent par ailleurs "des mesures peu connues, utilisées par peu de professionnels et avec de forts soupçons d'effet d'aubaine".
Face à ce constat, la mission d'information préconise un ensemble de mesures, marquées par un esprit très volontariste. Le premier axe consiste à renforcer les outils de pilotage de l'offre de soins, à travers des mesures comme l'édiction de normes quantifiées d'accès aux soins, l'amélioration de l'articulation des différents échelons territoriaux dans les politiques d'organisation de l'offre de soins et la mobilisation des "collectivités territoriales en veillant à garantir la cohérence et l'équité des interventions publiques en faveur de l'offre de soins de premier recours". Un second groupe de mesures vise à structurer l'offre de soins de premier recours, grâce à diverses mesures : mise en place d'une rémunération au forfait des actions de santé publique, organisation plus structurée de la permanence des soins, développement des statuts d'exercice de la médecine alternatifs à l'installation, renforcement de la coopération entre les professionnels de santé, mise en place de "pôles de santé"... La mission se prononce, à cette occasion, en faveur des futures "communautés hospitalières de territoire". Enfin, le dernier axe consiste à adapter les formations médicales et paramédicales aux besoins de santé des territoires. Parmi les préconisations formulées à ce titre figurent en particulier l'idée d'"associer les conseils régionaux et les ARS [agences régionales de santé] à l'organisation des formations aux professions de santé", la généralisation des bourses d'études assorties d'engagements d'exercice et la formation des étudiants à la coopération interdisciplinaire.

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

Référence :  Assemblée nationale, rapport de la mission d'information sur l'offre de soins sur l'ensemble du territoire (déposé le 30 septembre 2008).

 

Pour aller plus loin

Voir aussi

Abonnez-vous à Localtis !

Recevez le détail de notre édition quotidienne ou notre synthèse hebdomadaire sur l’actualité des politiques publiques. Merci de confirmer votre abonnement dans le mail que vous recevrez suite à votre inscription.

Découvrir Localtis