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Lutte contre l'exclusion - La pauvreté s'installe dans la durée, selon le Secours Catholique

Comme chaque année, le Secours Catholique publie ses statistiques, qui constituent une référence dans le secteur de la lutte contre l'exclusion. Cette édition 2012 est toutefois particulière, puisqu'elle s'intitule "Regards sur dix ans de pauvreté". Elle porte sur les statistiques 2011 tirées des différents lieux d'accueil de l'association, mais les met aussi en perspective sur le moyen terme.

Le principal enseignement de ces "Regards sur dix ans de pauvreté" publiés par le Secours Catholique est que la pauvreté n'a pas diminué sur la période, mais s'est au contraire "ancrée davantage dans la société française". En d'autres termes - comme l'explique Bernard Thibaud, le secrétaire général de l'association -, "le nombre de situations de pauvreté rencontrées par les équipes du Secours Catholique n'a que relativement peu augmenté au cours de cette décennie", mais "la pauvreté se fait plus durable".
Le "rapport statistiques" proprement dit livre, sur ce point, une véritable mine de données, même si les chiffres fournis ne concernent que les personnes accueillies et suivies par le Secours Catholique. En 2011, ce dernier a ainsi "rencontré 585.500 situations de pauvreté", concernant environ 1,42 million de personnes, dont 750.000 adultes et 668.000 enfants. Dix ans plus tôt, ces chiffres étaient respectivement de 595.300 situations de pauvreté et 1,38 million de personnes. Aujourd'hui, 94% des personnes accueillies vivent sous le seuil de pauvreté (60% du niveau de vie médian) et 68% sous le seuil de très grande pauvreté (40% du niveau de vie médian), ce qui traduit une intensification de la pauvreté.

De plus en plus de femmes et d'enfants pauvres


La relative stabilité quantitative de la pauvreté recouvre, par ailleurs, des évolutions importantes. La première d'entre elles est le nombre croissant de femmes et d'enfants en situation de pauvreté. Les familles constituaient ainsi 53% des situations suivies en 2011, contre 47% en 2001 et 49% en 2008. Le nombre d'enfants suivis a également progressé, passant de 627.000 en 2001 à 668.000 l'an dernier (même si cette année a marqué un léger recul par rapport au pic de 681.000 en 2010). Cette situation s'explique notamment par le nombre croissant de familles monoparentales, dont la fragilité au regard de la pauvreté a déjà été mise en valeur par de nombreuses études. Même si le nombre de pères seuls augmente (10% en 2001 et 13% en 2008), les parents isolés restent principalement des femmes. L'étude confirme que "le couple est un rempart le plus souvent efficace contre la pauvreté et, sauf pour les familles nombreuses, les taux de pauvreté sont plus faibles au sein des couples que dans la population générale". Au sein de la population féminine, le Secours Catholique relève également une progression du nombre de femmes isolées de plus de 45 ans, sans doute liée à leur éloignement du marché du travail.

Le poids des dépenses et du loyer

Si le nombre de personnes reçues dans les différents points d'accueil a peu varié depuis 2001, c'est aussi le cas de leurs ressources. Le rapport constate en effet que les ressources de personnes rencontrées "ont peu varié en dix ans" et "permettent de moins en moins de faire face aux dépenses". Un constat qui explique le phénomène d'installation dans la pauvreté. En 2011, les ménages en situation de pauvreté suivis par l'association avaient ainsi un niveau de vie moyen de 500 euros par mois, soit 67 euros de plus qu'il y a dix ans, en tenant compte de l'inflation. Or, dans le même temps, les charges incompressibles (loyers, alimentation, énergie, transports…) ont fortement augmenté. Cette situation se traduit par une nette croissance des impayés et du "travail informel".
Le rapport observe en particulier que "le logement représente une charge de plus en plus lourde" et "un problème central pour les personnes vivant en situation de pauvreté". Par exemple, pour les ménages pauvres locataires (soit les deux tiers des ménages), les loyers acquittés ont augmenté entre 2001 et 2011 - en euros constants - de 21% dans le parc HLM et de 26% dans le parc privé. Conséquence, selon Bernard Schricke, directeur "Actions et plaidoyer France Europe" du Secours Catholique : "il n'est pas rare que les personnes fréquentent nos structures pendant 3, 4 ou 5 ans".
Le rapport confirme également la réalité du phénomène des travailleurs pauvres puisque, dans plus d'un tiers des cas, les ménages en situation de pauvreté perçoivent des revenus du travail ou dérivés du travail. Un chapitre consacré aux étrangers en situation de pauvreté montre aussi que les conditions de vie de ces derniers, qui vivent déjà dans des conditions "particulièrement précaires", se sont dégradées depuis dix ans.
 

 

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