La présence de "polluants éternels" dans les eaux de surface "probablement sous-estimée" en France, selon Générations Futures

L'association Générations Futures a publié une étude ce 12 janvier montrant que la pollution des eaux de surface par les PFAS, une famille chimique complexe de près 4.500 composés distincts très persistants dans l'environnement, est généralisée sur le territoire français. Mais selon elle, la présence de ces substances, qui peuvent avoir de graves effets sur la santé, est probablement très sous-estimée, du fait des méthodes d'analyse employées. Sans attendre l'entrée en vigueur de la directive cadre sur l'eau révisée, Générations Futures appelle le gouvernement à rechercher partout en France, et en particulier dans les zones de captage pour l'eau potable, les 24 PFAS jugés prioritaires par la Commission européenne.

On les appelle communément perfluorés ou PFAS, selon l'acronyme anglais : les per- et poly-fluoroalkylés constituent une famille chimique complexe de près de 4.500 composés distincts très persistants dans l'environnement, d'où leur surnom de "polluants" éternels. Dotées de propriétés anti-adhésives, imperméables et résistantes à la chaleur, ces substances sont présentes dans plusieurs domaines industriels et des objets de la vie courante : produits en téflon, emballages alimentaires, certains textiles... Mais plusieurs études scientifiques ont montré que l'exposition à un certain nombre de ces substances pouvait avoir de graves effets sur la santé (cancers, dysfonctionnements des systèmes reproductif et hormonal et même immunitaire, avec une diminution de la réponse vaccinale).

Générations Futures a analysé la présence de 18 de ces PFAS dans les eaux de surface (rivières, lacs, étangs...) en exploitant la base de données publiques Naïades pour 2020. Alors que le gouvernement doit publier ce mois-ci un plan d'actions pour mieux encadrer l'usage des PFAS, l'association environnementale a présenté les résultats de son étude à la presse ce 12 janvier.

Présence importante...et probablement sous-estimée  

Ils montrent une présence importante de ces substances. "Près de 4 échantillons sur 10, exactement 36% des échantillons, contiennent au moins un PFAS quantifié", a indiqué Pauline Cervan, de Générations Futures. Un chiffre "largement supérieur" - de 11 points - à l'état des lieux que l'Agence française de sécurité sanitaire (Anses) avait réalisé en 2011 et qui sert toujours de référence. Dans deux départements (Paris et les Hauts-de-Seine), 100% des échantillons prélevés contiennent au moins un PFAS pouvant être quantifié. Dans 57 départements au moins, un PFAS a été quantifié dans plus de 50% des analyses effectuées. Le nombre de PFAS retrouvé diffère également de 0 à 11 selon les départements.

Ce nouveau tableau n'est en effet pas exhaustif et se heurte à des limites méthodologiques importantes, souligne l'ONG. La fréquence des recherches est ainsi très variable selon les départements (de 6 à 440 échantillons analysés en 2020), avec un nombre de PFAS recherchés qui varie de 1 à 16, des méthodes d'analyse et surtout des seuils de détection très différents – pour un même PFAS, les limites de quantification (LOQ) peuvent varier jusqu'à un facteur de 500 d'un département à l'autre. "Il y a une grande hétérogénéité dans les recherches qui vient compliquer l'interprétation de nos résultats", a reconnu Pauline Cervan. "Nous pouvons toutefois montrer que la pollution des eaux de surface par les PFAS est généralisée sur le territoire français, seulement 5 départements n'ayant pas retrouvé de PFAS dans leurs eaux en 2020", conclut l'ONG dans son rapport.

Une surveillance à améliorer

Compte-tenu des problèmes méthodologiques rencontrés, elle souhaite surtout "alerter sur les faiblesses des stratégies de recherche et les faiblesses des méthodes d'analyse employées", estimant "probable que cette pollution aux PFAS des eaux de surface soit largement sous-estimée dans certains départements".

Générations Futures demande donc une amélioration de la surveillance. Alors que l'arrêté du 26 avril 2022 sur le programme de surveillance des eaux prévoit le suivi de 5 PFAS, elle réclame que soient recherchés partout sur le territoire, et en particulier dans les zones de captage pour l'eau potable, les 24 PFAS jugés prioritaires par la Commission européenne, sans attendre l'entrée en vigueur de la directive-cadre sur l'eau révisée. Elle préconise aussi d'utiliser les seuils de quantifications les plus bas possibles techniquement pour tous les PFAS (au moins 1ng/l, voire 0,2 ng/l).

L'association demande par ailleurs au gouvernement français de soutenir une "interdiction de l'ensemble des PFAS dans l'Union européenne", certains pays (Danemark, Allemagne, Norvège, Suède) préparant déjà une demande pour des mesures de restriction de leur fabrication et leur usage.

 

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