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La révision de la programmation pluriannuelle de l'énergie en débat

Associations, collectivités, entreprises, artisans, agriculteurs, experts ou simples citoyens… : la révision de la programmation pluriannuelle de l'énergie, qui doit être menée d'ici la fin 2018, va être soumise pour la première fois à un large débat public, au niveau national et régional, à partir de la mi-mars. Des rencontres auront notamment lieu dans les territoires où les enjeux énergétiques sont particulièrement importants.

C'est un exercice inédit pour la Commission nationale du débat public (CNDP). Jusqu'à présent cantonnée à l'organisation de débats publics pour des projets d'équipement, elle va pour la première fois transposer son savoir-faire à la révision de la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), qui devra être menée d'ici fin 2018 pour porter sur les deux périodes 2018-2023 et 2024-2028. Cette compétence nouvelle résulte de l'ordonnance du 3 août 2016 portant réforme des procédures destinées à assurer l'information et la participation du public à l'élaboration de certaines décisions susceptibles d'avoir une incidence sur l'environnement qui prévoit la saisine obligatoire de la commission pour les plans et programmes nationaux.

Un premier travail de classement des enjeux

Saisie par la directrice de l'énergie du ministère de la Transition écologique le 10 août dernier, la CNDP a décidé d'organiser le débat public sur la PPE le 6 septembre et mis sur pied une commission particulière du débat public (CPDP) pour le préparer et l'animer sur le terrain. Présidée par Jacques Archimbaud, vice-président de la CNDP, la CPDP compte au total sept membres. Ses travaux ont commencé à l'automne dernier pour préparer les termes du débat qui se tiendra de la mi-mars à juin 2018.
"Nous avons eu une cinquantaine d'entretiens préalables avec des élus nationaux et locaux, institution, chambres consulaires et associations et réuni les 17 janvier un atelier préparatoire afin d'établir un classement des enjeux", a expliqué Jacques Archimbaud lors d'une conférence de presse ce 13 février. "Il s'agit d'abord de comprendre, en établissant un état des lieux des objectifs prévus dans la loi de transition énergétique et la PPE, de voir comment la France se situe par rapport à ses voisins, a-t-il détaillé. Un autre point est de savoir comment agir, en s'interrogeant sur les conditions à réunir pour poursuivre et accélérer les efforts entrepris dans le sens de la transition énergétique, du triple point de vue social, territorial et environnemental. Il faudra aussi choisir les chemins à emprunter dès à présent et à l'horizon de la PPE en termes de bouquet énergétique et de mix électrique. La gouvernance constitue le quatrième enjeu : cela pose notamment la question de la relation de l'Etat avec les grands acteurs de l'énergie, les territoires et de la place du consommateur."

"Débat sans tabou"

"La commission est neutre et indépendante, notre travail est de vérifier que toutes les questions sont mises au débat", a souligné Jacques Archimbaud. Rappelant qu'"il y avait quelques angles morts comme la question du nucléaire" dans la dernière PPE, le président de la CPDP appelle à un débat "sans tabou". La commission attend de l’État, maître d’ouvrage du débat public, un document avec des "éléments de cadrage" sur lequel les échanges pourront s’appuyer. "Le parti qui a été pris et dont la CNDP hérite est de ne pas mettre à disposition une PPE déjà rédigée", a insisté Jacques Archimbaud.
En pratique, les échanges s’organiseront à l’échelle nationale autour d’une plateforme contributive permettant au public de s’informer, poser des questions et retrouver les documents versés au débat. Afin de toucher le plus de monde possible, la CNDP prévoit également une animation sur les réseaux sociaux. Un panel citoyen, le "G 400" sera en outre mis en place avec le tirage au sort de 400 participants. Régulièrement informés des discussions, ils seront réunis au ministère de la Transition écologique le 9 juin afin de voter sur quatre ou cinq questions apparues comme fondamentales à l’issue des échanges. Cette opération coûtera 100.000 euros sur les 500 000 attribués pour l’ensemble du débat.
Par ailleurs, pour nourrir les réflexions, des auditions filmées seront diffusées. Des "ateliers d’information" réunissant des experts viendront compléter ce dispositif, de même que des "ateliers de controverse" portant sur des sujets tels que les nouveaux usages de l’électricité, l’avenir du nucléaire ou encore l’acceptabilité des renouvelables.

Un débat décliné dans les territoires

Le débat se déclinera aussi dans les territoires où les enjeux énergétiques sont importants, afin de leur permettre de transmettre les messages correspondant à leur spécificité. Des rencontres sont ainsi prévues dans des territoires à énergie positive tels que Loos-en-Gohelle (62), dans d'autres "intenses en énergie" - Gravelines (59), vallée de l'Arve (74), Fos-sur-Mer (13) -, des métropoles et grandes agglomérations ( Nantes, Lyon, Rouen, Besançon, Est-Ensemble, en Seine-Saint-Denis, Marseille), des régions en processus de planification (Occitanie, Centre-Val de Loire, Nouvelle-Aquitaine) ainsi que dans des territoires ruraux (Aisne, Bretagne, Pyrénées…). Le débat associera aussi des "publics cibles". Ces rencontres seront organisées en partenariat avec des organisations de la société civile : l'UFC-Que Choisir pour les consommateurs, la Ligue de l’enseignement pour les jeunes, la CCI Ile-de-France pour les entreprises et salariés, ou encore les chambres des métiers et de l’artisanat pour les artisans et commerçants et les chambres d'agriculture pour les exploitants agricoles.
"Nous souhaitons très vivement que la première version de la PPE sorte après la fin du débat fin juin, donc pour l’été", a indiqué Jacques Archimbaud. Cette première version de la PPE sera ensuite soumise à une série d’évaluations, notamment celle du Conseil national de la transition écologique (CNTE), avant la publication du document définitif qui doit normalement intervenir avant le 31 décembre 2018.

La programmation pluriannuelle de l'énergie et ses objectifs initiaux
Elaborée par le ministère de la Transition écologique, la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) est l'outil de pilotage de la politique énergétique de la France créé par la loi de transition énergétique de 2015. Elle doit être révisée tous les cinq ans afin d'ajouter une période de programmation supplémentaire mais la première révision est réalisée avec un délai plus resserré (2016-2018) pour que les révisions aient lieu plutôt en début de mandat d'un président de la République et d'une légistature. La PPE actuelle qui porte sur les périodes 2016-2018 et 2019-2023 devra donc être révisée d'ici la fin 2018 pour porter sur les deux périodes 2018-2023 et 2024-2028. Les principaux objectifs initiaux de la politique énergétique de la France à l'horizon 2025, 2030 et 2050 sont les les suivants :
- réduire les émissions de gaz à effet de serre de 40% entre 1990 et 2030 et diviser par quatre les émissions de gaz à effet de serre entre 1990 et 2050 ;
- réduire la consommation énergétique finale de 50% en 2050 par rapport à  2012, en visant un objectif intermédiaire de 20% en 2030 ;
- réduire la consommation énergétique primaire des énergies fossiles de 30% en 2030 par rapport à 2012 ;
- augmenter la part des énergies renouvelables à 23% de la consommation finale brute d’énergie en 2020 et à 32% de cette consommation en 2030 ; 
- multiplier par cinq la quantité de chaleur et de froid renouvelables et de récupération livrée par les réseaux de chaleur et de froid à l’horizon 2030 ;
- réduire la part du nucléaire dans la production d’électricité à 50% à l’horizon 2025 contre 76,3% en 2015.
A.L.

 

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