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Logement intermédiaire - La SNI croit en l'effet d'entraînement du logement intermédiaire

André Yché, président du directoire du groupe SNI, est satisfait. Le Fonds de logement intermédiaire affiche des résultats en avance sur ses objectifs, que ce soit en termes d'attrait des localisations par les promoteurs, de volumes investis, ou de rentabilité financière. Avec le lancement de la deuxième levée de fonds, prévu à la fin du premier semestre 2015, la SNI vise un montant d'au moins 700 millions d'euros et une capacité d'investissement de 1,2 milliard d'euros, effet levier compris. De quoi produire 7 à 8.000 logements intermédiaires en 5 ans. Dans des programmes neufs comprenant 25.000 logements. Pour commencer.

Le groupe SNI, filière immobilière d'intérêt général de la Caisse des Dépôts, a présenté à la presse, le 10 décembre, un aperçu des premiers projets signés avec des promoteurs dans le cadre du Fonds de logement intermédiaire (FLI, ex-"Argos"). A sa création cet été (voir notre article ci-contre du 25 juillet), le FLI disposait d'engagements pour un montant de 515 millions d'euros en capitaux propres, correspondant à une capacité d'investissement de 860 millions après effet levier, soit environ 5.000 logements locatifs intermédiaires.
A ce moment-là, la SNI annonçait que 35 opérations (soit plus de 1.200 logements) avaient déjà été pré-validées par les comités d'investissement du Groupe SNI, suite à l'appel à projets lancé début 2014. On en sait aujourd'hui un peu plus.

Des programmes mixtes

Ce sont finalement 32 opérations qui ont été retenues parmi les 395 projets reçus. Soit 1.165 logements intermédiaires (sur 15.132 proposés) qui ont fait l'objet d'un acte d'acquisition ou d'un contrat de pré-réservation. Ils sont concentrés sur les marchés français les plus tendus (donc "les plus porteurs" pour les investisseurs) : première couronne parisienne ; pôle Nice-Cannes-Sophia Antipolis et Côte d'Azur ; grandes métropoles régionales de Lyon, Marseille et Toulouse ; Pays de Gex et agglomération de Genève, notamment. Mais il y a aussi un programme à Bordeaux, deux à Lille, un à Hendaye…
Tous les logements intermédiaires retenus seront réalisés en Vefa (vente en l'état futur d'achèvement). Conformément au cahier des charges, ils comporteront trois tranches : des logements intermédiaires donc, mais aussi des logements sociaux (25% du programme) et des logements en accession libre. De fait, les programmes validés comportent, en moyenne, une centaine de logements au total, dont un tiers de logements intermédiaires. Le prix Vefa TTC moyen s'élève à 6,2 millions d'euros par opération.

Kaufman & Broad, Vinci, Nexity…

Tous les grands promoteurs nationaux ont répondu présents : Kaufman & Broad, Vinci, Nexity, Akerys, Les nouveaux constructeurs, Cogedim, Bouygues immobilier et Sagec. Mais de gros promoteurs régionaux (ou de moins gros proposant une ou deux opérations) ont aussi fait des propositions (41% des logements intermédiaires proposés l'étaient par des promoteurs locaux). La SNI, qui ne souhaite pas pour l'heure donner les noms des promoteurs retenus dans le cadre de ce premier closing, assure que les promoteurs nationaux n'ont pas été particulièrement favorisés à cette étape.
Les 1.165 logements intermédiaires sont plutôt des T2 ou T3 (avec 1 place de stationnement). Ils sont regroupés dans un immeuble ou une cage d'escalier pour en faciliter la gestion. La surface moyenne est de 55 m2, le prix moyen HT/m2 habitable est de 2.800 euros et le loyer projeté est de 12,6 euros/m2 habitable.

Une rentabilité financière meilleure que celle espérée

En termes de rentabilité financière, le rendement locatif brut s'établit à 4,9% (contre un objectif initial de 4,8%), le prix moyen HT au mètre carré est de 2.800 euros et les acquisitions se situent en moyenne à 28% en dessous des expertises de marché "du fait de la décote de bloc négociée et du taux de TVA à 10%", souligne la SNI.
1.300 logements intermédiaires sont toujours en négociation. La majorité des dossiers reçus a en effet été rejetée par le comité d'investissement, soit parce que la localisation ne semblait pas opportune (36% des cas), soit parce que les programmes étaient situés hors du zonage établi par le FLI (16%), ou parce que le promoteur a changé d'orientation entre-temps (14%), ou encore parce que la concurrence locative était trop forte (8%), ou que les prix exigés ne pouvaient pas être tenus (10%).

Deuxième closing en vue

Avec les 1.200 logements intermédiaires déjà validés et les 1.300 en cours de négociation, "ce sont près de 2.500 logements qui ont été sécurisés, soit la moitié de la capacité d'investissement du fonds à l'issue du premier closing", calcule la SNI. "Cette première campagne est très encourageante" pour Vincent Mahé, président d'Ampère Gestion, le gestionnaire du fonds. "Cela confirme l'intérêt d'opérer dès cette année une deuxième levée de fonds avec un closing que nous anticipons à la fin du premier semestre 2015", ajoute-t-il. André Yché table sur 200 millions d'euros "et peut-être plus", espère-t-il.
Avec le lancement de cette deuxième levée de fonds, la SNI vise ainsi un montant d'au moins 700 millions d'euros et une capacité d'investissement de 1,2 milliard d'euros, effet de levier compris. De quoi produire 7.000 logements intermédiaires.
Une dizaine d'investisseurs aurait déjà manifesté leur intérêt. On n'en saura pas plus, sinon qu'il y aurait davantage de sociétés mutualistes que dans le premier closing qui avait surtout attiré des acteurs de l'assurance-vie et de l'épargne retraite (*).

La fin de la période "Far West" ?

"On sort du Far West pour entrer dans une société policée", a déclaré André Yché, à l'issue de la conférence de presse. "Far West", pour résumer avec humour un marché du logement intermédiaire boudé des investisseurs institutionnels, avec une politique publique réduite à multiplier les mesures de défiscalisation en direction des particuliers, avec tous les travers que cela a engendré, engendre et engendrera durablement sur les finances publiques et sur le parc de logements souvent déconnecté de la demande locale.
Ainsi le FLI entend faire revenir sur le marché du logement les investisseurs institutionnels (les "zinzins") et les moyens pour les attirer sont mis (voir notre encadré ci-dessous). De plus, l'appel à projets spécifiait bien que les logements intermédiaires soutenus par le fonds devaient s'intégrer dans un programme de logements plus vaste comprenant au moins 25% de logements sociaux et des logements en accession libre. Donc ce n'est pas seulement 7.000 logements intermédiaires qui seraient produits via le FLI, mais 25.000 logements diversifiés.
Pour cela, la SNI se charge de négocier avec les collectivités des terrains bien localisés et des charges foncières favorables. C'est ainsi que le groupe SNI et l'Agence foncière et technique de la région parisienne (AFTRP) ont signé, sur le congrès HLM 2014, un protocole de partenariat les engageant à collaborer pour produire un minimum de 2.000 logements intermédiaires d'ici 2016 sur les emprises foncières maîtrisées par l'AFTRP (voir notre article du 29 septembre 2014). D'autres protocoles sont prévus avec de grandes agglomérations.

Comment construire 75.000 logements en 5 ans ?

Mais le FLI n'est qu'un des trois étages que la SNI a identifiés pour parvenir à l'objectif fixé par le président de la République le 15 septembre dernier, lors des Assises du financement et de l'investissement : 25.000 logements intermédiaires, en zones tendues, en 5 ans (voir notre article du 15 septembre 2014). Un investissement estimé à 1,9 milliard d'euros, dont 900 millions d'euros pris en charge par les fonds d'épargne de la Caisse des Dépôts (le milliard d'euros restant étant pris sur "le produit des cessions d'entreprises dont l'Etat est actionnaire", avait indiqué François Hollande). Avec ces 900 millions d'euros, la SNI calcule un potentiel d'investissement de 2,2 milliards d'euros, soit 12.000 logements sur 5 ans. François Hollande avait alors annoncé que le dispositif serait opérationnel à partir du 1er janvier 2015.
Enfin, troisième étage de la fusée : la constitution à venir d'un fonds d'Etat doté d'1 milliard d'euros en fonds propres, avec un potentiel d'investissement de 2,3 milliards d'euros. Un fonds qui serait "certainement" géré par la SNI, confie André Yché. De quoi produire 13.000 logements intermédiaires en 5 ans selon ses estimations.
Il fait le calcul : 8.000 (FLI) + 12.000 (fonds d'épargne) + 13.000 (fonds d'Etat). Soit un total d'environ 33.000 logements intermédiaires en 5 ans. Avec l'effet d'entraînement sur les autres modes de logements (sociaux, accession libre), il anticipe une production de 75.000 logements, soit 15.000 logements par an.

Valérie Liquet

(*) En plus de la SNI : CNP Assurances, BNP Paribas Cardif, Aviva France, le Groupe Malakoff Médéric, EDF Invest, l'Etablissement de retraite additionnelle de la fonction publique (Erafp) représenté par AEW et la Société mutuelle d'assurance du bâtiment et des travaux publics (SMABTP).
 

Le FLI : un fonds pour faire revenir les "zinzins" sur le marché du logement

Le Fonds de logement intermédiaire (FLI) a été créé, le 24 juillet 2014, pour offrir un cadre suffisamment attractif aux investisseurs institutionnels (les "zinzins") afin de leur redonner envie d'investir dans le logement intermédiaire. Car malgré la sécurité qu'il offre à long terme, le logement pêchait auprès des investisseurs par des valorisations trop élevées par rapport à ce qu'offre le bureau par exemple, une réglementation jugée contraignante, ou encore des risques d'image et de complexité de gestion.
Or le zinzin est, selon la terminologie financière, un "investisseur avisé" : il est a priori sélectif dans le bien immobilier dans lequel il investit (y compris dans sa localisation), il est censé entretenir son patrimoine dans la durée et il a une indéniable capacité de négociation avec les promoteurs. Autant d'éléments que n'ont pas les investisseurs particuliers (voir entre autres notre article ci-contre du 5 novembre 2013).
Le moment est propice dans la mesure où "le tassement des rendements obligataires invite à rechercher des placements sécurisés", souligne la SNI.
Dans ce contexte, le FLI propose un investissement dans le résidentiel spécifiquement tourné vers les institutionnels. Il assure une régularité des flux locatifs, grâce à un positionnement des loyers en dessous du marché, garantissant une faible vacance. Il promet un coupon de 3,5% indexé sur l'inflation dès la première année, ce qui assure une rentabilité minimale. La gestion de la relation avec les locataires et avec les collectivités locales est assurée par la SNI, dont le fait qu'elle soit "opérateur de la Caisse des Dépôts et premier bailleur de France (270.000 logements)" est rassurant pour les investisseurs institutionnels.
Ils sont aussi en confiance quant à la valeur à long terme de leur investissement, la SNI effectuant un ciblage "exigeant" des localisations, les projets retenus étant situés dans le 1% du territoire national le plus tendu, qui représente déjà 26% de la population, avec une croissance démographique anticipée de 42% dans les quinze prochaines années. Ils bénéficient de deux avantages fiscaux considérables, permettant d'améliorer sensiblement le rendement du produit immobilier : une TVA à 10% et une exonération de la taxe foncière sur les propriétés bâties. Enfin, le FLI est éligible aux nouveaux contrats d'assurance "vie-génération".
Le pari de faire revenir les zinzins dans le logement serait "un pari pas encore gagné, mais en bonne voie", selon André Yché, président du directoire du groupe SNI.

V. L.