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La transition agricole et alimentaire en quête de financements

Prometteuse en termes d'emplois et répondant à de nombreux enjeux sociétaux, la "transition agricole et alimentaire" a besoin de financements mieux structurés, souligne un rapport de Resolis et Terralim publié peu avant que le Salon international de l'agriculture ne batte son plein à la Porte de Versailles. Ses auteurs préconisent une labellisation. Et la création d'un fonds spécifique.

Les ambitions fortes de la plateforme de financement participatif Miimosa dans les projets de transition agricole et alimentaire (TAA) viennent bousculer les investisseurs traditionnels. Et pourraient remettre en cause la notion même de TAA. Miimosa, qui a su susciter beaucoup d'échos ces jours-ci au Salon international de l'agriculture, était jusque-là spécialisée dans le financement de projets locaux de taille modeste. Comme elle l’indiquait fin janvier, elle entend à présent récolter 100 millions d’euros d’ici trois ou quatre ans et s’attaquer à des projets de plus grande envergure, à même de fournir la grande distribution et l’industrie agroalimentaire, avec des financements compris entre 50.000 euros et un million d’euros. Elle mise ainsi sur un partenariat avec des grands groupes, Carrefour, Danone, D'aucy, Herta et Les Paysans de Rougeline.

Labellisation

Voilà qui interroge au moment où la TAA qui est en plein essor se cherche encore un modèle, comme le montre un rapport de Resolis et Terralim sur "l’impact de la transition agricole et alimentaire sur l’emploi", réalisé avec le soutien de la Caisse des Dépôts, de la fondation Carasso et du ministère de la Transition écologique et solidaire. Ce rapport pose la question de la définition même de la TAA, ce qui pourrait passer par une "labellisation". "A l’image de la finance solidaire, il semble qu’une labellisation des acteurs et/ou des actions de TAA, associée à la création d’outils financiers spécifiques, permettrait d’orienter une épargne vers des investissements utiles à la TAA", soulignent les auteurs.
Ils observent deux cas de figure : des exploitations d’une dizaine d’emplois "qui ne cherchent pas à grossir afin de conserver une taille humainement gouvernable" mais qui ont une "forte propension à essaimer", et d’autres en mode "startup" cherchant une taille critique d’une centaine d’emplois "pour exister". Mais les uns comme les autres souhaitent avant tout "lier engagement personnel et dynamique collective et territoriale".
Ils constatent que la logique productiviste qui a connu son apogée dans les années 1970 atteint aujourd'hui ses limites sociales, environnementales, sanitaires, culturelles et économiques. "Pour sortir de sa crise, notre système alimentaire va devoir changer de boussole et pointer deux nouvelles destinations : d’une part, une reterritorialisation du système alimentaire, d’autre part, une révolution agro-écologique."
Le rapport constate une corrélation très forte entre TAA et création d’emplois, à rebours de la logique agro-industrielle. En France, le pourcentage de la population agricole est ainsi passé de 60 à 3% entre 1860 et 2000. La décrue se poursuit à vive allure aujourd’hui, avec le phénomène de concentration des exploitations qui rend d’autant plus difficiles les pratiques de transition. En dix ans, le pays a perdu 83.000 chefs d’exploitation. Et chaque nouvelle étape de mondialisation "provoque des faillites d’exploitations". C’est le cas de la fin de quota laitiers en 2015. "Si, dans les décennies à venir, disons d’ici 2050, le contexte de mondialisation s’affirme et la transition agro-industrielle se confirme, ce sont 1,7 milliard de paysans qui seront chassés de leurs terres", prévient le rapport.

Transition agro-écologique "forte"

A l’opposé, l’agriculture biologique a créé 32.500 emplois en cinq ans en France. Une progression tirée par la demande qui a augmenté de 16% en 2017. L’un des meilleurs exemples de ce dynamisme est celui des microbrasseries artisanales. En une quinzaine d’années, elles en sont venues à occuper presque la moitié de l’emploi du secteur, avec souvent de véritables dynamiques territoriales : fourniture en houblon local, réouverture d’un café de village…
"Si les fermes bio emploient plus à l’hectare, ce n’est pas seulement parce qu’elles réclament plus de main d’œuvre pour le même produit", mais aussi "parce qu’elles choisissent des types de production réclamant plus d’emploi", comme le maraîchage.
Les auteurs promeuvent une "transition agro-écologique forte", qui va au-delà d’une moindre consommation en intrants phytosanitaires et repose sur une reterritorialisation. "La transition repose sur un impact suffisamment fort des niches pour dévier le cours du régime", soulignent-ils. Seulement, l’accompagnement de ces initiatives est "essentiel" pour assurer leur viabilité. Les auteurs préconisent "la création d’un circuit de financement spécifique dédié aux seules actions de TAA", avec un plancher d'investissement de 15.000 euros, insistant notamment sur l'importance de l'accès au foncier et des mécanismes de garantie. Une fonction aujourd'hui défaillante. Ils rappellent que les états généraux de l’alimentation ont débouché sur des objectifs ambitieux (faire passer la surface agricole utile en bio de 7 à 15%, lancer 500 projets alimentaires territoriaux, assurer 50% d’approvisionnement des cantines en produits de qualité et de proximité…). Mais "il est vrai qu’entre le déclaratif et le réalisé la route est souvent longue et sinueuse". 
 

 

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