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Environnement - L'AMF et Amorce opposées au projet de hausse de la TVA sur la collecte des déchets ménagers

Déjà relevé de 5,5 à 7% en 2012, le taux de TVA applicable aux prestations de services effectuées pour le compte du service public des déchets doit passer à 10% au 1er janvier 2014, augmentant les montants à la charge des collectivités de 200 millions d'euros. Chacune de leur côté, l'Association des maires de France (AMF) et Amorce ont dénoncé le 11 juin cette hausse programmée de la TVA. Pour l'AMF, le service public de valorisation des déchets ménagers est fondé sur la salubrité publique et constitue un service de première nécessité "indispensable pour garantir la santé publique". Il permet également de recycler un part importante de ces déchets : plus de 10 millions de tonnes de matières premières secondaires sont ainsi mises à la disposition de l'industrie, principalement française, contribuant à la création d'une économie circulaire et occupant plus de 130.000 emplois, fait encore valoir l'AMF. En outre, "l'augmentation du taux de TVA envisagée ne permettra pas de financer la rénovation et le développement des outils indispensables pour atteindre les ambitieux objectifs que nous ont fixés les instances européennes et les dernières lois environnementales", pointe l'association d'élus.
Comme les collectivités ont partiellement accès aux mécanismes de récupération de la TVA, l'augmentation de la charge fiscale sera en grande partie répercutée sur les contribuables, souligne-t-elle. "Nous ne pouvons pas demander en même temps à nos concitoyens de faire des efforts de tri et de payer plus ; le message en faveur du recyclage ne sera plus audible, redoute Jacques Pélissard, président de l'AMF. Faute de moyens, nos performances de recyclage risquent de décrocher par rapport aux autres pays européens, privant ainsi une partie de l'industrie française du recyclage d'un accès aux matières premières dont elle a besoin." L'AMF demande donc que ce service continue à bénéficier d'un taux de TVA réduit et que cela soit inscrit dans la prochaine loi de finances.

"Hold up fiscal"

Amorce, de son côté, voit dans le projet de hausse de TVA sur les services liés aux déchets un "hold up fiscal". "Si elle est confirmée, cette mesure ne manquerait pas d'affecter sensiblement les impôts locaux dès 2014", estime l'association, qui regroupe des collectivités et des professionnels de la gestion des déchets et de l'énergie. Elle évalue l'impact de cette hausse à une fourchette allant de 70 à 140 millions d'euros annuels. A titre d'exemple, elle a calculé que le passage de 7 à 10% du taux de TVA correspondrait à 1,5 million d'euros par an pour la communauté urbaine du Grand Lyon, à 640.000 euros pour l'agglomération de Saint-Etienne, à 300.000 euros pour celle de Brest et à 2,4 millions d'euros pour Paris.
En mars, interrogé à l'Assemblée nationale, Benoît Hamon, ministre délégué à la Consommation, avait expliqué que les hausses prévues de la TVA visaient à financer le crédit impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE). Ce crédit d'impôts bénéficiera notamment, avait-il fait valoir, aux entreprises du secteur de la collecte et du traitement des déchets qui le répercuteront sur leur prix. "Cet argument nous parait bien optimiste" et relevant "au mieux de la naïveté, au pire de la mauvaise foi", relève Amorce dans un communiqué. Pour l'association, si l'on ajoute à la TVA la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP), qui représente "une ponction de 322 millions d'euros par an" et le prélèvement pour frais de gestion sur la taxe d'enlèvement des ordures ménagères (Teom) - 480 millions d'euros -, "cela fait donc plus d'1,1 milliard d'euros de prélèvements supportés chaque année par les collectivités territoriales et donc par les contribuables locaux au titre de la gestion des déchets ménagers."
Amorce juge en outre la responsabilité des industriels "notoirement insuffisante" en matière de déchets et demande par conséquent la création d'"une TGAP amont pour tous les produits non recyclables, dont le produit permettrait de financer les politiques locales de gestion des déchets." En outre, l'association fait remarquer que le financement d'Eco-Emballages ne représente en 2013 que 55% des coûts réels assumés par les collectivités, et donc par les contribuables locaux, soit un manque à gagner de 100 à 300 millions d'euros par rapport à l'objectif de financement de 80% des coûts nets optimisés de la gestion des déchets d'emballages en 2012 fixé par la loi Grenelle.
L'association fait aussi part de son inquiétude quant à la TVA réduite (5%) appliquée aux réseaux de production de chaleur lorsqu'ils sont alimentés à au moins 50% par des énergies renouvelables comme la biomasse, la géothermie ou les déchets. "Dans le cadre du Comité pour la fiscalité écologique et du Conseil national des déchets, des propositions visent à relever le taux d'énergie renouvelable nécessaire à 75%", indique Amorce qui "s'y opposera avec force" car elles "rendraient les réseaux de chaleur urbains beaucoup moins compétitifs face à d'autres énergies moins vertueuses".