Archives

Culture - Le bel été des festivals

Qu'il s'agisse de manifestations élitistes ou plus populaires, connues ou plus confidentielles, la saison 2009 des festivals affiche de bons résultats en termes de fréquentation. Retour sur quelques exemples emblématiques de ce succès en partie lié au repli des touristes français sur l'Hexagone.

Alors que la saison touristique s'annonçait plutôt maussade du fait de la défection des visiteurs étrangers (voir notre article ci-contre du 6 août 2009), les festivals et autres manifestations culturelles ont, au contraire, connu un net regain de fréquentation. Cette bonne tenue vaut pour tous les types de manifestations, même si l'on observe quelques rares contre-exemples dus à des erreurs de programmation ou à des défections d'artistes.
En dépit de la crise économique, les festivals "élitistes" ont ainsi fort bien tiré leur épingle du jeu. Le festival d'Aix-en-Provence affiche ainsi un taux de fréquentation de 97% pour l'ensemble de la programmation et frise les 100% pour le lyrique. Avec 3,97 millions d'euros de recettes de billetterie, les organisateurs ont même dépassé leurs objectifs (même si ces recettes ne couvrent qu'environ 20% du budget). Avec 125.000 entrées, le festival "in" d'Avignon a réalisé pratiquement autant d'entrées qu'en 2008 et atteint un taux de 94% de fréquentation. Le "off" affiche pour sa part des résultats records, avec 35.240 cartes vendues (contre 30.000 l'année précédente) pour 980 spectacles dans 100 lieux différents. Plus de 50.000 festivaliers ont fréquenté les concerts de Jazz in Marciac (qui sera bientôt érigé en "pôle de diffusion et de création jazz"), tandis que le Nice Jazz Festival, pourtant privé de la scène des Arènes de Cimiez (en réfection), n'a finalement perdu que 2.000 entrées par rapport à l'an passé (39.000 au lieu de 41.000).
Les festivals plus populaires présentent un bilan tout aussi positif, en égalant ou en battant leurs records. C'est le cas notamment des Francofolies de La Rochelle ou des Vieilles Charrues à Carhaix (Finistère). Ce dernier a enregistré 230.000 spectateurs, contre 210.000 l'an dernier, tout en limitant la fréquentation pour éviter la saturation du site. L'édition 2009 du festival Les Suds à Arles (musiques du monde) est également qualifiée de "grand cru" par ses organisateurs, avec plus de 60.000 spectateurs (20.000 aux concerts payants et environ 42.000 sur les scènes gratuites).

Estuaire 2009, record toutes catégories

Même des festivals moins connus profitent de ce tropisme culturel. Dans le Var, par exemple, les Voix du Gaou à Six-Fours-les-Plages (musiques actuelles) a atteint son objectif de 35.000 spectateurs, malgré une subvention municipale divisée par deux, tandis que, sur le même registre, Le Mas en Concert à Puget-sur-Argens augmentait sa fréquentation de 25%. Le record toutes catégories de l'année va toutefois à Estuaire 2009. Cette biennale d'art contemporain - avec ses oeuvres d'art, souvent spectaculaires, disséminées sur les berges de l'estuaire de la Loire entre Nantes et Saint-Nazaire - a attiré en effet plus de 890.000 visiteurs, soit 15% de plus que lors de la précédente édition en 2007.
Plusieurs raisons expliquent ces bons résultats. Le recentrage des Français sur le territoire national a largement compensé la défection des touristes étrangers. L'appétence accrue pour la culture et les "vacances intelligentes" - qui explique aussi les hausses de fréquentation des musées - joue en faveur des festivals. Enfin, même si l'effet est difficile à quantifier, les loisirs et la culture semblent bien apparaître comme un dérivatif à la crise, d'autant plus que le pouvoir d'achat se maintient pour la très grande majorité des Français. Ces bons résultats ne font pas pour autant la bonne santé financière des festivals. Plusieurs facteurs poussent en effet à la hausse des coûts, comme le nouveau statut des intermittents, mais aussi et surtout la nécessité de faire appel à des têtes d'affiche prestigieuses pour attirer le public et renforcer l'image de la manifestation : Sonny Rollins à Marciac, Bruce Springsteen et Lenny Kravitz à Carhaix, Cesaria Evora à Arles... Enfin, une bonne part de la fréquentation des festivals concerne des spectacles gratuits et les organisateurs doivent parfois jongler avec les tarifs des spectacles payants. Nombre des festivals ont ainsi maintenu leurs tarifs, à l'image de Rock en Seine dans les Hauts-de-Seine, ou ont recouru aux techniques du "yield management", très en vogue chez les compagnies aériennes. Pour remplir ses concerts, le Main Square Festival d'Arras (rock) n'a pas hésité à organiser une "vente flash", avec des réductions allant jusqu'à 40%.

 

Jean-Noël Escudié / PCA