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Lois de finances / Social - Le Conseil constitutionnel sauve la prime d'activité

Comme on pouvait s'y attendre, le Conseil constitutionnel a censuré, dans une décision du 29 décembre 2015, l'article 77 du projet de loi de finances (PLF) pour 2016. Cet article prévoyait le versement d'une fraction de la prime d'activité sous la forme d'une réduction dégressive de la contribution sociale généralisée (CSG). Alors que la prime d'activité - qui remplace le RSA activité et la prime pour l'emploi (PPE) - vient d'entrer en vigueur le 1er janvier 2016 et doit être versée à partir de février, le nouveau dispositif devait s'appliquer à compter du 1er janvier 2017 (voir notre article ci-contre du 13 novembre 2015).

Une différence de traitement sans rapport avec l'objet de la loi

Dans sa décision 2015-725 DC, le Conseil, saisi par les parlementaires de l'opposition, considère les dispositions de l'article 77 du PLF contraires à la Constitution, dans la mesure où "le législateur a ainsi traité différemment des personnes se trouvant dans des situations identiques dès lors qu'en vertu de l'article L.841-1 du code de la sécurité sociale sont éligibles à la prime d'activité 'les travailleurs aux ressources modestes, qu'ils soient salariés ou non salariés' ; que cette différence de traitement n'est pas en rapport avec l'objet de la loi".
Le versement d'une partie de la prime d'activité sous la forme d'une réduction de la CSG - calculée par l'employeur sans intervention du salarié et portée directement sur le bulletin de salaire - aurait certes facilité la perception de la prime d'activité par les salariés, mais - contrairement au versement par la CAF sous la forme d'une prestation - elle aurait créé une distorsion évidente avec les non salariés.
La réforme envisagée par l'article 77 du PLF aurait également soulevé d'autres difficultés, d'ordre technique, qui n'entraient pas dans le champ de l'analyse du Conseil constitutionnel.

Une décision à deux milliards d'euros

Dans un communiqué du 29 décembre 2015, Michel Sapin, le ministre des Finances, et Christian Eckert, le secrétaire d'Etat au Budget, dissimulent à peine leur satisfaction, en rappelant que cette censure "confirme les interrogations exprimées par le gouvernement au cours du débat parlementaire" et que la réforme "soulevait, par ailleurs, de réelles difficultés opérationnelles".
Dans leur communiqué, les deux ministres affirment que "le gouvernement est entièrement mobilisé pour la réussite de la prime d'activité [...]" et qu'il "est totalement engagé pour assurer le succès de ce dispositif, afin que les personnes ayant droit à la prime en bénéficient pleinement". Il reste que cette affirmation ne remet pas en cause la prévision d'un taux de recours à la prime d'activité de l'ordre de 50% des bénéficiaires potentiels. La décision du Conseil constitutionnel retire ainsi une sérieuse épine du pied du gouvernement. Un financement par le biais de la CSG aurait conféré un caractère automatique au versement de la CSG, portant le taux de recours à quasiment 100%, du moins pour les salariés. Une telle hypothèse se serait traduite par un coût budgétaire supplémentaire de l'ordre de deux milliards d'euros, peu compatible avec l'état des finances publiques.
De son côté, Jean-Marc Ayrault - l'auteur principal de l'amendement soutenu par 160 députés socialistes - a appelé le gouvernement "à reprendre rapidement ce chantier indispensable à la justice fiscale". Si un retour au rapprochement entre prime d'activité et CSG semble peu probable compte tenu de la prise de position très nette du Conseil constitutionnel, le débat sur la progressivité de la CSG est loin d'être clos et pourrait resurgir lors de la discussion du PLF 2017, à quelques mois des présidentielles.

Jean-Noël Escudié / PCA

Prime d'activité : le nombre de connexions au simulateur laisse présager un succès
La Caisse nationale d'allocations familiales (Cnaf) enregistrait le 23 décembre plus de 1,5 million de connexions en moins de 24 heures à la suite du lancement du simulateur de la prime d'activité. Ce simulateur, accessible sur le site www.caf.fr et lancé la veille par la ministre des Affaires sociales, Marisol Touraine, permet en quelques clics de savoir si l'on est éligible à cette nouvelle aide et d'en calculer le montant. Sur près de 650.000 simulations de droits, plus de la moitié ont conduit à une préinscription à la prime d'activité, a précisé la Cnaf. "C'est un succès pour notre simulateur", s'est réjoui Daniel Lenoir, directeur général de la Cnaf. L'accès au site avait même été saturé pendant deux heures le 22 décembre après les journaux télévisés et radio du soir.
Les demandes pourront être définitivement effectuées à partir du 6 janvier sur les sites de la CAF et de la Mutualité sociale agricole ( www.msa.fr). Aucun formulaire papier, ni justificatif, ne sera nécessaire. "La téléprocédure est très simple, pensée pour le grand public et testée, 100% personnalisée et 100% dématérialisée", a souligné Daniel Lenoir. Les déclarations trimestrielles de ressources pourront aussi être effectuées en ligne et, à partir de mars 2016, sur mobile. Un accompagnement en présentiel est toutefois aussi prévu par les CAF.
La prime d'activité sera versée chaque mois à partir du 5 février aux travailleurs modestes (moins de 1.500 euros nets par mois pour un célibataire) résidant en France et âgés d'au moins 18 ans, en fonction de leurs revenus au cours des trois derniers mois. La cible de cette prime, "ce sont ceux qui travaillent et ont parfois le sentiment qu'ils gagnent trop pour avoir droit à des aides de solidarité nationale et pas assez pour avoir droit aux baisses d'impôt votées il y a quelques mois", a déclaré la ministre des Affaires sociales.
Deux décrets d'application ont été publiés le 22 décembre au Journal officiel, précisant les règles d'éligibilité et de calcul, la gestion de la prime ainsi que son contrôle ( décret n° 2015-1709 et décret n° 2015-1710).
Un célibataire sans enfant dont le salaire mensuel est de 1.300 euros nets par mois, sans autres ressources, percevra par exemple une prime d'activité de 97 euros par mois. Un couple avec deux enfants dont les revenus mensuels sont au Smic (environ 1.140 euros nets par mois) percevra une prime d'environ 245 euros par mois. Les actuels bénéficiaires du RSA qui travaillent percevront automatiquement la prime d'activité. Nouveauté, les jeunes actifs de 18 à 25 ans y auront droit dans les mêmes conditions que les autres. Etudiants et apprentis seront également éligibles s'ils justifient, dans le trimestre concerné, de revenus d'activité suffisants (au moins égal à 893,25 euros/mois).
C.M., source AFP