Urbanisme - Le Conseil d'Etat précise les conditions de l'opposition d'un sursis à statuer à une confirmation de demande de permis de construire
Le Conseil d’Etat, par un arrêt du 16 juillet 2010, précise que les dispositions de l’article L.600-2 du Code de l’urbanisme (C.U.) ne font pas obstacle à ce qu’un maire puisse opposer un sursis à statuer à la confirmation de demande de permis de construire par le pétitionnaire. Cependant, ces dispositions s’opposent à ce que le sursis soit fondé sur le fait que la réalisation du projet de construction litigieux serait de nature à compromettre ou rendre plus onéreuse l’exécution du futur plan local d’urbanisme dont l’élaboration tarde à aboutir.
En l’espèce, la SARL Francimo s’est vu refuser la délivrance d’un permis de construire un immeuble à usage d’habitation par le maire d’Antibes le 3 août 2006. Le tribunal administratif de Nice a annulé ce refus le 26 novembre 2009. Le pétitionnaire a alors confirmé sa demande de permis de construire, mais le maire lui a opposé un sursis à statuer en se fondant sur l’article L.111-7 C.U. La SARL a alors demandé au juge des référés de suspendre cette décision, ce qu'il a refusé de faire. Le Conseil d’Etat a alors été saisi de la question.
Le maire ne pouvait à nouveau refuser de délivrer le permis en application de l’article L.600-2 C.U. qui énonce que "lorsqu’un refus opposé à une demande d'autorisation d'occuper ou d'utiliser le sol (…) a fait l'objet d'une annulation juridictionnelle, la demande d'autorisation (…) confirmée par l'intéressé ne peut faire l'objet d'un nouveau refus ou être assortie de prescriptions spéciales sur le fondement de dispositions d'urbanisme intervenues postérieurement à la date d'intervention de la décision annulée sous réserve que l'annulation soit devenue définitive et que la confirmation de la demande ou de la déclaration soit effectuée dans les six mois suivant la notification de l'annulation au pétitionnaire".
Pour s’opposer à la demande confirmative de permis, le maire s'est donc fondé sur l’article L.111-7 C.U. qui accorde la possibilité de surseoir à statuer sur toute demande d'autorisation concernant des travaux, constructions ou installations notamment dans le cas prévu par l’article L.123-6 C.U., selon lequel l’autorité compétente peut surseoir à statuer lorsqu’une demande d’autorisation concernant des constructions, installations ou opérations, serait de nature à compromettre ou rendre plus onéreuse l’exécution du futur plan d’urbanisme. Mais en l’espèce, le maire s'est prévalu d’un plan local d’urbanisme dont l’élaboration prescrite en 2002 n’était toujours pas achevée à la date du refus de permis du 3 août 2006.
Le Conseil d’Etat précise au vu de cette circonstance l’articulation des articles L.600-2 et L.111-7 C.U. : "Si les dispositions citées de l'article L.600-2 du Code de l'urbanisme ne faisaient pas obstacle à ce que le maire d'Antibes puisse opposer le sursis à statuer à la demande de permis de construire confirmée par le pétitionnaire, elles s'opposaient en revanche à ce que ce sursis puisse être fondé sur la circonstance que la réalisation du projet de construction litigieux serait de nature à compromettre ou à rendre plus onéreuse l'exécution du futur plan local d'urbanisme." Il annule ainsi l’ordonnance du juge des référés qui refusait de suspendre le sursis à statuer.
Le juge administratif, en conditionnant ainsi la possibilité de surseoir à statuer, limite les éventuels abus des communes qui tardent à adopter leur document d’urbanisme, et évite par la même occasion de faire supporter les conséquences de tels retards aux demandeurs d’autorisation d’occuper le sol.
Fanny Morisseau, Avocat à la Cour, Cabinet de Castelnau
Référence : Conseil d’Etat, 16 juillet 2010, SARL Francimo, n°338860.