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Logement social - Le gouvernement va assouplir l'article 55 de la loi SRU

Le 9 juillet, en même temps qu'elle transmettait au Conseil d'Etat l'avant-projet de loi de mobilisation pour le logement, Christine Boutin en a présenté les grandes lignes aux parlementaires du groupe UMP. Si les principales dispositions du texte étaient déjà connues (voir notre article ci-contre), celui-ci recèle néanmoins une demi-surprise : contrairement à ce qui était affiché jusqu'à présent, l'article 15 de l'avant-projet de loi prévoit en effet de modifier l'article 55 de la loi du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains (SRU). La ministre du Logement se félicitait pourtant, le 2 juillet, des bons résultats obtenus par l'article 55 au cours de la période triennale 2005-2007, avec des objectifs de construction de logements sociaux dépassés de 50%. Mais la correction des "dysfonctionnements" de la loi SRU était l'un des engagements du candidat Nicolas Sarkozy, également très attaché à l'instauration d'une "France de propriétaires", y compris dans le secteur social.

 

Les 20% demeurent, mais le calcul change

Les mesures envisagées par l'avant-projet de loi sont toutefois loin des précédentes tentatives de remise en cause de l'article 55. Elles ne modifient pas en effet le taux de 20% de logement social auquel doivent parvenir toutes les communes concernées (sauf à accepter d'acquitter des pénalités financières). Elles modifient en revanche les modalités de calcul de ces 20%, en prévoyant d'assimiler à de la production de logement social différentes opérations comme la construction de logements destinés à l'accession sociale à la propriété et réalisés au titre du Pass foncier ou du prêt social location-accession (PSLA). Cet assouplissement de l'article 55 sera toutefois assorti d'un certain nombre de garanties. L'assimilation de ces constructions à du logement social sera ainsi limitée à une durée de cinq ans (délai au terme duquel ces constructions sortiront de la base de calcul des 20%), ce qui obligera les maires à continuer de produire du logement locatif. Elle sera également soumise à une condition portant sur le niveau de ressources des accédants concernés. Par exemple, dans le cas des logements acquis par le biais d'un PSLA, seuls ceux dont les acquéreurs gagnent moins de 40.488 euros par an pour un couple avec deux enfants (44.425 euros en Ile-de-France) pourront être assimilés à du logement social et pris en compte dans le calcul du quota. Par ailleurs - et à l'autre bout de l'échelle -, les structures d'hébergement comme les maisons relais devraient également être intégrées au calcul du quota de logements sociaux.

 

Privilégier l'efficacité

Dans une interview au quotidien Libération du 10 juillet, Christine Boutin se défend de favoriser les communes aisées et rappelle que, parmi les 330 villes qui "ne remplissent pas les objectifs de construction de HLM qui leur sont assignés pour rattraper leur retard", seules 56% sont gérées par des municipalités de droite. Soulignant qu'elle s'est "beaucoup interrogée" avant de décider de modifier l'article 55, la ministre du Logement explique avoir finalement fait le choix de l'efficacité : "Que ce soit du locatif ou que ce soit de l'accession populaire à la propriété, on est toujours dans des dispositifs de création de logements aidés par la société" (notamment par le biais de l'application du taux de TVA à 5,5%).
En dépit de ces explications et des garde-fous apportés au nouveau dispositif, les réactions n'ont pas tardé à se manifester. Dans un communiqué, la Fondation Abbé-Pierre, tout en affirmant qu'elle "n'est évidemment pas opposée à l'accession sociale à la propriété", dénonce ainsi "un aménagement scandaleux qui profitera aux communes qui ne respectent pas l'article 55 de la loi SRU". Les débat parlementaires sur l'article 15 du projet de loi de mobilisation pour le logement devraient donc être très animés.

 

Jean-Noël Escudié / PCA

 

Référence: projet de loi de mobilisation pour le logement (présentation prévue au Conseil des ministres du 28 juillet 2008).

 

Les sanctions contre les "dodus dormants" se précisent

L'avant-projet de loi apporte également des précisions sur le mécanisme des sanctions financières à l'encontre des "dodus dormants", surnom familier donné aux organismes HLM à la tête d'une confortable trésorerie et très peu actifs en termes de construction. Les services du ministère du Logement estiment le nombre de ces organismes à environ 10% de l'ensemble des opérateurs sociaux.
Le texte prévoit de procéder à une évaluation régulière des organismes HLM, en se fondant sur les objectifs définis par les conventions d'utilité sociale (CUS), dont la signature deviendra obligatoire. Toutes les conventions devront avoir été signées avant le 31 décembre 2010. Si l'évaluation - dont les modalités pratiques restent à préciser - révèle que l'organisme ne s'est pas conformé aux objectifs de sa CUS, il fera l'objet de pénalités financières calculées sur la base de 100 euros par logement possédé. Les "dodus dormants" qui tenteraient de se soustraire à l'évaluation en ne fournissant pas les renseignements nécessaires écoperont d'une pénalité de 300 euros par logement, qui devrait se révéler rapidement dissuasive. 

 

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